Le mouvement des femmes : un regard rétrospectif

25/04/2006
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Bien que les femmes aient obtenu quelques victoires dans les divers champs de la vie sociale au 20e et au début du 21e siècle, il reste encore beaucoup à faire en faveur de l’égalité des droits entre les sexes. Au Venezuela, au cours des trois dernières décennies, le mouvement des femmes a déployé un ensemble d’actions se sont traduites par des avancées et des reculs, des réussites et des échecs. Ceux-ci ont trouvé leur expression tant au niveau institutionnel, à travers des politiques publiques et plusieurs instruments légaux, que dans les organisations de femmes dont le nombre a augmenté, et qui travaillent pour, par et avec des femmes. Un bilan rétrospectif et critique du mouvement des femmes au Venezuela peut être dressé en abordant l’histoire du mouvement en deux périodes, la première s’étendant de 1975 à 1998 et la seconde de 1999 à 2005. Première période : des regards distincts La première période, celle de ladite « démocratie représentative » caractéristique du système politique vénézuélien de l’époque, a vu se développer des formes d’organisation qui ont été cataloguées d’« élitistes » dans le sens où la majorité des femmes étaient exclues des actions et des discussions, même si une série de progrès peuvent être répertoriés, qui de par leurs caractéristiques bénéficiaient à la population féminine et par conséquent à la société dans son ensemble. Il est possible de poser sur cette période deux regards distincts, mais non excluants l’un de l’autre : 1° La continuité dans l’action du mouvement des femmes au Venezuela est le fruit du pacte implicite entre les groupes de femmes, indépendamment de leur appartenance à des partis politiques aux idéologies différentes. Ce pacte a contribué à établir une reconnaissance mutuelle pour la réalisation de certains objectifs, et qui n’allaient pas au-delà de ceux portés par les organismes internationaux depuis 1975. 2° Le second regard, exposé dans l’ouvrage de Gioconda Espina et Kathy Rakoswski affirme que « au cours d’une première étape (1985-1990), il y a eu des succès politiques, certains s’inscrivant dans le cadre des accords internationaux contre la discrimination des femmes souscrits le gouvernement, mais il y eut aussi d’autres succès, obtenus par les femmes de la société civile. Le discours patriarcal public a commencé à évoluer (ce qui n’est pas nécessairement le cas du discours dans la sphère privée). Certaines femmes leaders de cette première étape ont fait partie du noyau - ou core group - qui a assuré la continuité de la lutte des femmes dans la seconde étape ». Au cours de cette « étape (surtout à partir de 1992), il y eut des succès politiques, s’inscrivant toujours dans le cadre des accords internationaux contre les discriminations entre les sexes souscrits par tous les gouvernements ... et des financements (de la part du PNUD, de l’Unicef, de la Banque mondiale et de la Banque interaméricaine de développement entre autres) pour les activités mise en place par les organisations qui étaient à l’origine et qui coordonnaient les actions ». Parmi les succès enregistrés au cours de cette période (1975-1998), on peut relever : — l’élaboration de projets et l’adoption de nouvelles législations : la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (1979), le projet et la réforme du Code civil (1982), la Chapitre VI de la loi organique sur le travail (1990), la loi relative à l’égalité des chances de la femme (1993), l’avant-projet de loi contre la violence domestique et le harcèlement sexuel (1993), la Convention interaméricaine sur la prévention, la sanction et l’élimination de la violence contre la femme, aussi appelée Convention de Belém do Pará (1994-1995), l’article 144 de la loi relative au suffrage et à la participation politique qui impose un quota de participation de 30% (1997) et la loi relative aux violences contre les femmes et dans la famille (1998). — deux congrès nationaux de femmes ont été organisés et ont permis la participation d’un plus grand nombre de femmes dans les discussions relatives aux situations de discrimination et de subordination les concernant. — les relations et les alliances entre l’Etat/gouvernements, les ONG de femmes et les instances académiques se sont resserrées et amplifiées. C’est ainsi qu’ont émergé des formes d’organisation comme celle de la Coordination des organisations de femmes (CONGS de Mujeres, mars 1985), un réseau qui, comme le signalent Espina et Rakowski, est parvenu à réunir, entre 1985 et 1990, quelques 25 ONG et des personnalités de différents états (bien que la région de la capitale en ait toujours été l’épicentre). D’autres réseaux, composés par des ONG, des individus provenant d’états différents et des institutions gouvernementales, se sont formés au même moment. On peut recenser parmi ceux-ci le Réseau d’études universitaires vénézuéliennes d’étude de la femme (Red de Estudios Universitarios Venezolanos de Estudios de la Mujer, REUVEM), Femme et environnement, Contre les violences envers les femmes, Maisons de femmes, etc. qui ont permis d’amplifier l’action couverte par les organismes publics. Ces réseaux ont commencé à décliner vers la moitié des années 90, en partie à cause des activités préparatoires à la Quatrième conférence de l’ONU à Pékin qui les ont absorbés et, d’autre part, à cause d’un changement d’équipe à la tête du Conseil national des femmes (CONMU - Consejo Nacional de la Mujer), sous le mandat présidentiel de Rafael Caldera. Vu l’obédience politique et religieuse de la présidente en place, le Conseil s’est mis à défendre des politiques plus conservatrices. Ces structures organisationnelles reproduisaient les formes d’organisation dominantes de cette période de « démocratie représentative ». Elles étaient constituées par une « élite » du mouvement des femmes selon certaines (García) ou par un « core group » ou groupe noyau selon d’autres (Espina), qui s’est maintenue dans le temps et qui, tout en étant constituée de petits groupes de « femmes en mouvement », avait un certain niveau d’engagement qui leur permettait de s’organiser et de former des alliances quand la nécessité s’en faisait sentir ou que l’occasion s’en présentait. Des organismes publics ont été créés, qui ont mis en place des politiques publiques (de très faible incidence) mais qui ont commencé à rendre plus visible la problématique des violences commises envers les femmes. Parallèlement, plusieurs espaces de réflexion et d’action ont été mis en place au sein des ONG de femmes, mais avec peu de capacité de mobilisation. Selon l’auteure précédemment citée, « le cas du Venezuela est intéressant pour pouvoir connaître les processus de changement qui ont amené à la distanciation entre femmes de la société civile et celles du gouvernement. Il est intéressant de par les différences qui ont surgi dans les stratégies et chez les actrices à la base des réformes et de la reconnaissance légale des revendications des femmes. Mais les circonstances précédemment décrites et la distanciation en elle-même permettent de conclure qu’il n’y pas eu un « mouvement » continu des femmes de la société civile ». Finalement, au cours de cette première période, le mouvement commence à s’institutionnaliser, avec des avancées et des reculs, grâce aux pactes établis - explicites et implicites (inter-classes et inter-idéologiques) - et aux alliances entre femmes et entre celles-ci et l’Etat. Celles-ci permirent une continuité de l’action et l’obtention de quelques résultats positifs, essentiellement de nature législative (réformes, lois, ratifications de conventions) ou organisationnelle. Des succès cependant très fragiles. Seconde période : avancées et difficultés La seconde période (de 1999 à 2005) commence à partir de la discussion et l’approbation de la Constitution de la République bolivarienne du Venezuela, qui constitutionnalise la « démocratie participative et protagonique ». Ce postulat suppose que la population - dans notre cas, les femmes - commence à s’organiser depuis la base afin d’impulser les espaces de rencontre, considérés comme vitaux pour le processus de conscientisation et d’organisation visant à dépasser les formes d’organisation représentatives qui dominaient la période précédente. Cette forme d’organisation - et la conjoncture de crise politique des années 2002 et 2003 - a provoqué des ruptures dans le pacte entre les femmes et, de la sorte, fracturé encore plus le déjà fragile mouvement des femmes au Venezuela de la fin du siècle passé. Au début de cette période, le Secrétaire à la présidence de la République (poste occupé par un journaliste homme) a voulu supprimer le Conseil national des femmes. Cette décision n’a toutefois jamais pu être exécutée grâce aux mobilisations rapides et opportunes d’un groupe de femmes (le budget attribué au Conseil a toutefois été diminué) qui, durant toute l’année 1999, s’est mobilisé avec des femmes provenant de diverses ONG pour que la nouvelle constitution nationale incorpore et reconnaisse (comme cela s’est effectivement produit) la dernière génération des droits contenus dans les traités et conventions internationaux. Ces femmes se sont également positionnées pour que la Constitution soit rédigée en des termes non sexistes et selon un langage qui leur donne une visibilité aux femmes. Cette période s’est caractérisée au tout début par une augmentation de la participation des femmes à des hauts postes de décision, notamment par la nomination d’un nombre non négligeable d’entre elles comme ministres (entre autres, ministres de la Santé et du Développement social, de la Production et du Commerce, de l’Environnement, des Sciences et des Technologies) et comme vice-ministres (de l’Education, des Sports, etc.). Le poste de Vice-présidente a lui-même été occupé pendant un an par une femme, économiste de formation et provenant du monde académique. L’actuelle période présidentielle (2000-2006) a été marquée, entre autres caractéristiques, par l’avancée de la discussion nationale sur la situation des femmes vénézuéliennes, discussion qui s’est concrétisée dans le Plan national d’égalité des chances pour les femmes (2003). C’est également au cours de cette période que trois nouvelles institutions ont été créées : l’Institut national de la femme (INAMUJER) qui remplace le Conseil national des femmes (CONAMU) et est rattaché au ministère de la Santé et du Développement social (MSDS) ; la Defensoría de la Mujer [1] instituée en vertu de la précédemment citée loi relative à l’égalité des chances pour les femmes ; et la Banque de développement de la femme (Banco de Desarrollo de la Mujer), qui a pour but de démocratiser l’accès au capital en fournissant des micro crédits essentiellement aux femmes des secteurs populaires du pays. En plus des services financiers, cette banque développe d’autres programmes tel que l’animation d’ateliers de présentation des lois contre la violence et en faveur de l’égalité ou des droits relatifs à la sexualité et à la reproduction. Ces trois nouvelles institutions sont dirigées par des femmes issues du monde syndical (INAMUJER) et académique (Defensoria de la mujer et Banque de développement de la femme) qui ont toujours milité dans les ONG de femmes et/ou dans les mouvements de gauche. C’est aussi au cours de cette période que, dès 2002, a été élaboré et discuté au sein de l’Assemblée nationale, l’avant-projet de loi organique des droits de la femme pour l’équité et l’égalité de genre ; avant-projet qui, par ailleurs, n’a toujours pas été approuvé vu le peu d’intérêt porté actuellement à ces thèmes. Lamentablement, une autre caractéristique des dirigeants politiques du processus [bolivarien] est leur manque d’intérêt pour prendre des mesures permettant d’en finir avec les discriminations de genre. Ainsi, les femmes se sont intégrées aux différentes « missions » [2] aussi bien en tant que « facilitatrices » qu’en tant que participantes (bien que nous ne disposions d’aucun chiffre officiel, nous savons qu’il y a un grand pourcentage de femmes parmi les participants). Cette participation dans les missions leur a permis d’accéder à une série de services (dans les domaines de l’éducation, de la santé, de la consommation, du crédit) dont elles étaient jusqu’à présent exclues. En plus, de nouvelles organisations ont été mises sur pied (15 000 espaces de rencontres dans le pays selon des sources officielles) : réseau de bénéficiaires de crédits, syndicats de femmes au foyer, participation aux comités des terres urbaines [3] et aux Tables techniques de l’eau [4]. Cela a permis la création d’un nouveau tissu social et d’une conscience et identité politiques en faveur de la défense du projet national. Ces initiatives s’avèrent cependant dépourvues d’une vision de genre. En général, les mobilisations et organisations de femmes n’ont pas adopté de postures critiques à l’encontre de l’idéologie et la société patriarcales vénézuéliennes. Les traits des la domination masculine se sont maintenus et parfois même approfondis. Les femmes continuent d’être exclues des espaces où se prennent les décisions stratégiques. On peut également relever, dans cette seconde période, la mise en place du service téléphonique « 0800mujeres » (selon des sources officielles, 12 430 appels ont été recensés entre novembre 1999 et mars 2004. 76,1% d’entre eux concernaient des cas de violences). Cependant, seuls deux centres d’accueil et d’assistance aux femmes victimes de violences ont été créés (à Caracas et à Maracay), laissant ainsi sans suite la majorité des dénonciations. En résumé, et sans vouloir minimiser les efforts réalisés par les femmes engagées dans la lutte pour l’égalité et occupant des postes au gouvernement ou agissant dans les nouvelles associations de femmes, il n’a pas été facile, au cours de cette courte période, d’établir un agenda de politiques publiques reposant sur une vision critique de genre. Les priorités se sont davantage centrées sur les moyens à mettre en œuvre pour accompagner le président de la République dans une période conflictuelle qui a vu l’opposition recourir au coup d’Etat [5] et à des grèves nationales affectant gravement l’industrie pétrolière [6], en plus de mettre en oeuvre une stratégie de déstabilisation médiatique, et d’autres actions : « guarimba » [7], attentats- et un long etcetera qui justifie le choix de telles priorités par les secteurs de la société qui participent au processus mené par le président Chavez [8]. Dans ces actions de l’opposition plusieurs dirigeantes des mouvements de femmes ont participé activement, ce qui nuit sans nul doute à la capacité du mouvement à maintenir son unité. Il n’empêche que, malgré la polarisation de la société, cet objectif d’unité a pu être réalisé dans une bonne mesure. Travail en commun Dans ce contexte de crise, qui polarise politiquement le pays, nous pouvons juste rappeler quelques moments de rencontre et de travail en commun entre les groupes de femmes actifs avant et après 1998 (sans distinction de credo politique). Parmi ceux-ci, on notera : le travail coordonné effectué afin d’élaborer des propositions qui furent présentées à l’Assemblée nationale constituante et incorporées à la constitution de 1999 ; le rejet unanime de la demande de recours en nullité contre plusieurs articles de la loi relative aux violences contre les femmes et dans la famille (1998) introduites par le procureur général en 2003 et laissant les femmes sans protection ; la défense publique de victimes de violence (cas de Linda L. Lopez) et la dénonciation de l’incapacité de l’Etat vénézuélien à remplir ses obligations en la matière ; la revendication de la parité (numérique) dans les postes et au moment de l’élaboration et remise d’une proposition d’un ensemble d’articles pour le nouveau Code pénal discuté à l’Assemblée nationale (2005), articles en lien avec la dépénalisation de l’avortement et les délits sexuels, entre autres. On peut donc conclure que, malgré tous ces contretemps et l’absence d’alliances et de pactes qui unissaient les groupes de femmes dans la période antérieure, les initiatives en faveur de l’organisation des femmes se sont amplifiées ces dernières années (avec les espaces de rencontre et les organisations promues par la Banque de développement des femmes) dans les secteurs populaires et dans les groupes issus des partis qui appuient le gouvernement actuel. C’est le cas du Mouvement de femmes Manuelita Saenz du parti Patrie pour tous (PPT, parti de la majorité présidentielle) et de la Force bolivarienne des femmes du Mouvement Cinquième République (MVR, parti du président Chavez). Une nouvelle relation s’établit entre l’Etat/le gouvernement et les femmes des communautés à travers ces organisations. La présence de femmes à de hauts postes de décisions (ministres, et surtout vice-ministres) a augmenté surtout au début, mais sans atteindre encore les 50% caractéristique, par exemple, du gouvernement de José Luis Zapatero en Espagne. De nouveaux espaces d’actions se créent (sans liens avec les espaces antérieurs du fait de la polarisation politique et de la rupture du pacte entre femmes) et donnent lieu à des mobilisations qui augmentent la conscience et l’identité politique dans un projet de changement et de transformation du pays, mais qui ne favorisent que peu la réflexion sur la condition de subordination et de discrimination des femmes dans une société capitaliste et patriarcale telle que la société vénézuélienne. A l’égal, du côté de l’opposition, la présence massive de femmes dans les mobilisations et les initiatives ne s’est pas traduite par une augmentation des espaces de pouvoir leur revenant, ni par une augmentation de leurs propositions. Celles-ci n’abondent d’ailleurs pas, mais sont soutenues avec force par des femmes historiquement engagées dans les luttes du mouvement des femmes au Venezuela. Dans un contexte de polarisation, les centres et espaces académiques, ainsi que d’autres organisations comme les maisons de la femme, ont assumé des rôles de coordination et d’impulsion d’initiatives. Ils ont en leur faveur leur force institutionnelle et se sont transformés en lieux de rencontres de femmes aux positions politiques définies. On peut citer parmi eux le Centre d’étude de la femme de l’Université centrale du Venezuela, les centres de l’Université de Zulia, de l’Université des Andes, de l’Université de Carabobo et le CMJR qui ont soutenu les initiatives et donné un appui à la construction d’un agenda de revendications pour le mouvement vénézuélien des femmes. Six ans après l’adoption de la nouvelle constitution et au bout de sept ans de gouvernement « bolivarien », certaines réflexions finales viennent à point. Le mouvement de femmes au Venezuela s’est montré, selon nous, extrêmement patient et peu efficient dans la formulation de ses revendications. Voici deux ans que les mesures de précaution permettant de lutter contre les situations de violence affectant des femmes ont été paralysées par un acte administratif du procureur général de la Nation alors qu’aucune décision de Tribunal suprême de justice (TSJ) ne va dans ce sens. En dépit des initiatives prises par INAMUJER et la Defensora Nacional de los Derechos de la Mujer afin qu’on ne leur ôte pas ces conquêtes, et bien que l’Etat du Venezuela soit obligé de les respecter, aucune décision démontrant une véritable volonté de restituer, au minimum, les droits protégés par les mesures de précaution n’a été prise. Or, il ne s’agit pas d’une affaire mineure. Une application à juste droit de mesures de précaution permet de sauver, et a déjà sauvé, des vies de femmes. Ce n’est d’ailleurs pas la seule conséquence de l’action du procureur, qui a notamment causé un recul dans le chemin parcouru en faveur de la formation des fonctionnaires (masculins et féminins). Le contenu d’une loi qui est remise en question ne peut pas continuer à être diffusé et travaillé avec effectivité. En matière législative, on voit arriver au terme de sa législature [9] une Assemblée nationale qui n’aura même pas approuvé une seule loi parmi toutes celles qui sont en projet concernant les femmes, ni même n’a adopté d’articles contenus dans d’autres lois, comme celui relatif à la sécurité sociale de la femme au foyer, dont l’importance est capitale selon nous [10]. Cette assemblée n’a pas non plus donné la priorité au nouveau code pénal pour lequel le mouvement des femmes au Venezuela avait remis une proposition le 1er décembre 2004. En matière des droits sexuels et reproductifs, nous ne voyons pas encore d’impulsion à la mise en œuvre des normes étudiées si longuement et finalement approuvées, puis publiées, voici plus d’un an par le ministère de la Santé et du Développement social. Nous reconnaissons comme une avancée significative l’appui donné par l’exécutif national à l’élaboration de propositions sensibles sur les questions de genre (nous espérons qu’une première manifestation de cette mesure sera l’augmentation des budgets publics attribués aux organismes travaillant pour et avec des femmes). Cette décision, conjointement avec les initiatives de la Banque de développement des femmes, devrait permettre des changements et contribuer à diminuer les différences de droit entre les genres... pour si tant est qu’il en existe la volonté politique. Quant à la situation de la représentation des femmes, il faut bien constater qu’il n’y a pas eu de progrès, mais plutôt, dans bien des cas, des reculs. Les chiffres sont alarmants. Malgré les exhortations du Conseil national électoral (CNE), lors des récentes élections locales - un niveau où nous savons tous et toutes que les femmes sont majoritaires -, ces dernières n’ont même pas atteint en moyenne les 30% de candidatures prévus par l’ancienne législation. Dans ce domaine, le Mouvement Cinquième République (MVR, parti du président Chavez) a fait des efforts en incorporant dans son règlement interne des orientations reconnaissant la parité et l’alternance. Les résultats n’ont toutefois pas été ceux espérés. Lors des prochaines élections de députés et députées, les 30% (de présentation de candidatures de femmes) ne seront d’ailleurs pas plus respectés par les organisations et groupes d’électeurs [11]. C’est donc à la réflexion et à l’unité du mouvement des femmes au Venezuela, quant à son agenda de revendications, qu’il faut appeler. Ou nous restons unies et combatives sans nous soucier de ceux à qui nous adressons nos revendications ; ou nous resterons à écouter les mêmes promesses de toujours, que ce soit du côté de l’opposition « pour le jour où le gouvernement actuel changera », ou que ce soit du côté bolivarien « pour le jour où le processus aura accumulé assez de forces ». Ces deux promesses sont fausses, l’histoire nous l’a montré mille et une fois. - Carmen T. García R., Carmen Rosillo , Magdalena Valdivieso Bibliographie — Espina, Gioconda et Rakoswski, Cathy. Movimiento de mujeres o mujeres en movimiento. El caso Venezuela. Dans Cuadernos del Cendes. Año 19. Nº 49. Tercera Época. Janvier-avril 2002. pp 31-48 — Espina. Gioconda. Conversación personal dans Maracay, 12 novembre 2004 — García, Carmen Teresa. Las convenciones internacionales y sus incidencias en los cambios sociopolíticos en la sociedad venezolana. Un balance desde las políticas públicas y ongs de mujeres. Rapport présenté au 49e congrès des américanistes. Quito, du 7 au 11 juillet 1997 — García, Carmen Teresa y Rosillo, Carmen. 8 de marzo : día para reflexionar y hacer balances http://www.rebelion.org/noticia.php.... Publié le 10/3/05. Revue électronique espagnole dans la section « femme » : http://www.rebelion.org/http://www.inamujer.gov.ve/. NOTES: [1] [NDLR] Institution de l’Etat chargée de surveiller le respect des droits des femmes et de défendre les citoyennes. [2] [NDLR] Les « missions » sont les programmes sociaux d’alphabétisation, de santé et d’éducation notamment lancés par le gouvernement vénézuélien à partir de 2003. [3] [NDLR] Lire Benjamin Durand, La réforme urbaine vénézuélienne : politique pour le « développement durable » et la démocratie participative, RISAL, 20 juin 2004. [4] [NDLR] Au Venezuela, actuellement, les entreprises publiques d’eau ont le devoir d’impulser au sein des communautés l’organisation de « conseils communautaires de l’eau » afin que celles-ci participent à la gestion des réseaux de distribution et que les habitants prennent conscience de la rareté de ce bien si convoité. C’est à travers les « tables techniques de l’eau » que se rencontrent l’entreprise publique, les techniciens, des représentants de la communauté, la mairie, etc. Ce type de réforme promeut la coresponsabilité et l’identification de la population avec les services de distribution d’eau. [5] [NDLR] Consultez le dossier « Coup d’État au Venezuela » sur RISAL. [6] [NDLR] Consultez le dossier « Lock out & sabotage pétrolier » sur RISAL. [7] [NDLR] Protestations violentes sous forme de blocages de rues qui ont fait au moins sept morts et des dizaines de blessés en février 2004. [8] D’autres stratégies de défense du processus, qui incluent le renforcement des organisations populaires, requièrent des développements politiques qui sont encore balbutiants. [9] [NDLR] Une nouvelle Assemblée nationale est entrée en fonction depuis la rédaction de cet article, suite aux élections législatives du 4 décembre 2005. [10] [NDLR] Notons qu’en février 2006, le gouvernement a annoncé qu’il octroierait une aide aux femmes au foyer se trouvant dans une situation précaire, une aide équivalente à 8% du salaire minimum pour 100 000 d’entre elles dans un premier temps. [11] [NDLR] Les élections ont eu lieu le 4 décembre 2005. Voir : www.cne.gob.ve/. En cas de reproduction de cet article, veuillez indiquer les informations ci-dessous: RISAL - Réseau d\'information et de solidarité avec l\'Amérique latine URL: http://risal.collectifs.net/ Source : revue América Latina en Movimiento (http://www.alainet.org/index.phtml.es), n°401, Quito, octobre 2005. Traduction : Gregory Van De Put, pour le RISAL (www.risal.collectifs.net).
https://www.alainet.org/pt/node/114996

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