La violence en Haïti est systémique, mais les Haitiens ne sont pas intrinsèquement violents, révèle une étude scientifique

02/07/2012
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P-au-P, 02 juil. 2012 [AlterPresse] --- Le Centre d’études et de recherches sur le développement des cultures et sociétés (Cerdecs) s’inscrit en faux contre l’idée que les Haïtiens seraient intrinsèquement violents en se basant sur les conclusions d’une enquête conduite dans diverses zones du pays.

« Je réfute cette définition ontologique d’un Haïtien intrinsèquement violent. Je réfute la notion que le destin de la nation haïtienne c’est de sombrer dans le chaos », martèle l’anthropologue Rachelle Charlier Doucet au cours de la présentation, le vendredi 29 juin 2012, de l’étude du Cerdecs sur la violence dans le pays, à laquelle a assisté l’agence en ligne AlterPresse.

Tandis qu’une mission de stabilisation onusienne se trouve en Haïti depuis 2004, on retrouve, dans le « filigrane » du discours des pays de la communauté internationale, une perception selon laquelle les natifs haïtiens seraient des êtres potentiellement voués à la violence, ce qui mettrait la société haïtienne sur la pente du chaos.

Une idée que l’enquête menée par le Cerdecs contredit !

« La violence est systémique », c’est-à-dire liée à « l’abandon de l’État, l’abandon de la société par les institutions publiques qui ne donnent pas les services de bases », soutient fermement l’anthropologue Rachelle Charlier Doucet, tout en prenant en compte les conclusions de son travail de terrain.

« La violence[en Haïti] est liée à un manque d’institutionnalisation des rapports entre les citoyens et l’État », indique la chercheuse.

La violence des citoyens est celle de l’État

Les résultats de cette étude, qui avait surtout pris en compte des zones du grand Sud d’Haïti et deux quartiers de Port-au-Prince, ont été présentés par les deux chercheurs Rachelle Charlier Doucet et Alain Gilles.

L’objectif poursuivi, tout au long de l’enquête, était « d’arriver à jeter les premières bases d’une cartographie de la violence et des conflits, et de ‘’dresser’’ des modèles de gestion de conflits en Haïti ».

Jérémie, Dame-Marie (Grande Anse / Sud-Ouest), les Irois, les Cayes et Chantal (Sud), la Vallée de Jacmel, Banane et Anse-à-Pitres (Sud-Est), Miragoâne (Nippes / Sud-Ouest), ainsi que les quartiers de Cité Soleil (muncipalite au nord de la capitale) et de Martissant (périphérie sud de Port-au-Prince) sont les principaux sites, où l’intégralité de l’enquête, réalisée en deux phases, a été déroulée.

Les concepts lien social et confiance ont été à la base de la démarche des chercheurs.

Méfiance et portes de sortie

« La méfiance constitue la norme qui régit les rapports sociaux », explique le rapport de recherche d’une quarantaine de pages.

La confiance de plus de 70 % des observés, en les gens de leur entourage ou dans les institutions, dépasse à peine 40 %.

Les gens des villages ruraux, des quartiers résidentiels et des quartiers périphériques sont les principaux répondants.

Les citoyennes et les citoyens des communautés visitées optent pour une gestion « consensuelle » des conflits et manifestent une certaine méfiance vis-à-vis du système judiciaire régulier.

Une résistance, liée à la culture d’aller au tribunal laquelle coûte (déjà) trop cher et tue l’intimité, est aussi constatée.

Pour résoudre leurs problèmes, les gens divisent les problèmes en « petits et en gros » ; ceux qui peuvent être solutionnés dans des échanges mutuels et ceux qui obligent la présence d’une tierce personne.

Ils se réfèrent à la police pour les questions de sang et aux tribunaux pour les voies de faits, les dettes et les questions liées à la terre.

Toujours attachés aux idéaux de la réputation de l’honneur, les gens commencent par se sentir bien du moment que l’autre est arrêté, menotté, ce qui est peut-être pris comme une sanction sociale, selon les informations communiquées par le Cerdecs.

Les « communautés ont des ressources, des mécanismes mis en place à travers les 200 ans d’histoire (de la nation), sur lesquels on pourrait avantageusement capitaliser », estime Rachelle Charlier Doucet

Elle préconise un « système de justice mixte », passant par la vision des gens de la justice et l’approche occidentale.

Un mariage qui devrait permettre une « justice de proximité », un « conseil de médiation ou une justice de quartier ».

http://www.alterpresse.org/spip.php?article13055

 

https://www.alainet.org/es/node/159275?language=es
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