Haïti-2012 : Pente raide

28/12/2012
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L’ouragan « Sandy » a été le pire d’une saison cyclonique qui, en 2012, a fait près d’une centaine de morts en Haïti, dont le gouvernement compte beaucoup sur les investissements étrangers pour dynamiser l’économie du pays, qui se trouve au bord de la crise alimentaire.
 
L’ouragan, qui a touché Haïti à la fin du mois d’octobre, a aggravé une situation qui ne s’est pas véritablement améliorée plus de 2 ans après le terrible séisme du 12 janvier 2010, tandis que la crise socio-politique tend à s’aiguiser davantage.
 
Selon des chiffres officiels, plus de 18,000 maisons ont été inondées, endommagées ou détruites et 24 écoles ont été affectées durant le passage de Sandy, sans parler d’infrastructures comme des ponts détruits ou devenus inutilisables.
 
Entre-temps, dans des camps de fortune, 390,000 sinistrés du tremblement de terre continuent de vivre sous des tentes crasseuses et fragiles, exposés à toutes formes de risques environnementaux et sociaux.
 
Plus d’un mois après la catastrophe, des zones entières étaient encore isolées, particulièrement dans le département de la Grand-anse (extrême sud-ouest), selon les témoignages de plusieurs parlementaires. Ces derniers ont aussi informé d’une situation alimentaire d’urgence frappant une population, dont 80% vivent en dessous du seuil de pauvreté.
 
De fait, les plantations situées dans 4 départements (Ouest, Sud-Est, Sud, Nippes et Grande Anse) ont été en grande partie ravagées.
 
La malnutrition guette 1/5 de la population
 
Sans fournir des données précises sur l’étendue exacte des dommages au niveau de l’agriculture, la coordination nationale de la sécurité alimentaire (Cnsa) a estimé à 2 millions le nombre de personnes qui pourraient souffrir de malnutrition à cause du passage de Sandy.
 
Au cours des dernières semaines de l’année, les prix de quelques produits alimentaires de base ont presque doublé, comme celui du pois qui est passé à 1.80 USD la livre.
 
La tendance à la hausse a été observée depuis la fin de l’été, et plusieurs mouvements de protestation ainsi que des grèves ont eu lieu, entre autres, contre l’augmentation des prix des produits de première nécessité.
 
Bien que le gouvernement ait annoncé un budget de 6 millions de dollars pour faire face aux urgences de Sandy, des organisations sociales comme celles réunies au sein de la plate-forme de plaidoyer pour un développement alternatif (Papda) ont estimé que l’investissement dans l’agriculture paysanne est « la meilleure solution » pour répondre à des priorités nationales.
 
Choléra : de pic en pic
 
Étant donné qu’un malheur ne vient jamais seul, Sandy a été accompagné d’une relance de l’épidémie de choléra dans les régions inondées. Des dizaines de nouveaux cas ont été enregistrés.
 
Depuis 2010, plus de 630,000 personnes ont été contaminées et plus de 7,800 d’entre elles sont décédées de cette maladie dont l’éradication prendra du temps.
 
La recrudescence de l’épidémie a réanimé les revendications de secteurs sociaux qui réclament de l’ONU le dédommagement des victimes. Plusieurs études ont démontré les responsabilités de la mission des Nations Unies pour la stabilisation d’Haïti (Minustah) dans le déclenchement de l’épidémie dans l’Est du pays en octobre 2010.
 
A ce sujet, le collectif de mobilisation pour le dédommagement des victimes du choléra (Komodevik) a fortement critiqué le gouvernement, après que le chancelier haïtien Pierre Richard Casimir a déclaré, le 19 octobre devant la commission Santé de la Chambre des Députés, qu’« il n’y a aucune preuve » démontrant que la force onusienne est à l’origine de cette épidémie dans le pays.
 
La rue se fâche pendant que le pouvoir clame ses « succès »
 
Généralement, on a observé un début de mobilisation sociale et politique contre la gestion de l’administration du président Michel Martelly, bien que le gouvernement se soit félicité, en substance, de mettre les bases pour des avancées du point de vue économique et institutionnel.
 
Le parc industriel controversé de Caracol (Nord-Est), inauguré le 22 octobre en présence de la secrétaire d’État américaine Hillary Clinton, est considéré comme la carte de visite de l’administration en place.
 
Les officiels n’ont pas cessé de souligner la dimension et le caractère d’avant-garde de cette zone industrielle, qui serait l’une des plus grandes et des plus modernes de la Caraïbe. Mais, selon les spécialistes, l’impact environnemental de ce parc industriel pourrait dépasser de loin le niveau de revenus qu’il pourrait générer au plan national.
 
A propos des institutions, le conseil supérieur du pouvoir judiciaire (Cspj) a été officiellement établi en juillet après la confirmation, en juin, par le chef de l’État des amendements constitutionnels, suspendus depuis mai 2011.
 
Désaccord entre les trois pouvoirs
 
Mais l’année entière a été marquée par des désaccords entre les pouvoirs exécutifs et législatifs et des critiques sur les irrégularités dans l’établissement du conseil électoral permanent (Cep), tandis que des élections législatives partielles et locales sont en retard d’une année.
 
L’organe, qui doit avoir 9 membres, dont 3 représentants de chacun des trois pouvoir (exécutif, législatif et judiciaire), ne compte pas de délégués du Parlement. Ce dernier ne parvient pas à réunir le quorum nécessaire pour désigner ses représentants, à cause de l’absence de 10 sénateurs (sur 30) dont le mandat est arrivé à terme.
 
Des négociations entre l’exécutif et le législatif ont abouti le 24 décembre à la signature d’un accord qui prévoit la création d’une entité nommée Collège Transitoire du Conseil Électoral Permanent, qui sera chargée de réaliser les prochaines élections.
 
On craint que cet accord, paraphé par des parlementaires et un conseiller du président, Gregory Mayard Paul, ne pose plus de problèmes qu’il n’en résout, laissant presque intact la situation et n’engageant pas le pouvoir judiciaire à travers le Cspj.
 
Tendances inquiétantes
 
Entre-temps, à travers tout le territoire, les maires ont été remplacés par « des agents de l’exécutif », nommés par le gouvernement, ce qui a suscité la réprobation d’organismes civils nationaux et internationaux.
 
Ils ont aussi critiqué la recrudescence de l’insécurité avec des cas de séquestration à Port-au-Prince et dans des villes de province. Le plus médiatisé d’entre eux a surement été celui de Coralie et Nicolas Moscoso, en octobre, qui a conduit à l’arrestation de l’homme d’affaires Clifford Brandt, membre d’une des plus riches familles du pays.
 
Cette affaire a fait resurgir, dans les milieux de défense des droits humains, des questionnements autour de « grandes faiblesses » qui handicapent la justice et la police, perçues comme dépendantes et politisées.
 
Durant toute l’année, des cas ont suscité des interrogations et même des critiques des organisations de droits humains, en commençant par la décision judiciaire prononcée en janvier sur l’affaire de l’ex dictateur Jean-Claude Duvalier.
 
La justice haïtienne a déclaré prescrites les accusations de crime contre l’humanité formulées contre l’ancien tyran. Mais un comité de victimes a fait appel de l’ordonnance de clôture du juge d’instruction Carvez Jean.
 
 
https://www.alainet.org/pt/node/163732
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