Selon le Cerfas:
La reconstruction n’est pas qu’une affaire de réparation
24/07/2012
- Opinión
Environ 500,000 habitats manquent à Port-au-Prince depuis le 12 janvier 2010
La politique de logement doit devenir uns stratégie inscrite dans le programme d’actions du ministère des affaires sociales, dont le rôle est la refondation sociale…
La problématique du logement doit être vue comme celle des politiques publiques et des ministères.
Le plan d’action pour le relèvement et le développement national d’Haïti a introduit l’idée, selon laquelle le relogement des personnes - sinistrées à la suite du séisme du 12 janvier 2010 - constituait la condition à l’émergence d’Haiti. Sans, pour autant, proposer des mesures précises.
La pléthore d’organisations non gouvernementales (Ong), née le lendemain de la catastrophe, s’est donc attribué cette responsabilité.
“ Résultat : plus qu’à une refondation sociale, nous assistons aujourd’hui à une crise du logement, avec environ 500,000 habitats manquants à Port-au-Prince”.
Tel est le positionnement sur la reconstruction post-séisme, exprimé par l’observatoire des politiques publiques et de la coopération internationale (Oppci), dans une conférence de presse, donnée ce mardi 24 juillet 2012 et à laquelle a assisté l’agence en ligne AlterPresse.
Bien antérieur à la catastrophe du 12 janvier 2010, le problème du logement en Haiti concerne avant tout les politiques publiques, soulignent le père jésuite catholique romain, Kawas François, et Esther Schneider qui présentait les résultats des derniers travaux (sur la reconstruction post-séisme) de l’Oppci au centre de recherche, de réflexion, de formation et d’action sociale (Cerfas).
Il y a une différence d’essence entre l’organisation de coopération internationale - qui est, à l’origine, créée pour venir en aide dans l’urgence et tente de réparer le mal qui a été fait - et l’État - qui se doit de mener des politiques par la législation et le contrôle des actrices et acteurs -.
Ce qu’il y a à comprendre, c’est que les Ong et organisations internationales ne sont pas aptes à formuler la reconstruction d’Haïti.
Un leadership clair et affirmé de l’État pour parvenir à une stratégie nationale pour le logement
Les Ong finissent par être considérées comme des facteurs aggravants de la crise du logement, relève l’Oppci.
Les solutions provisoires ont, très souvent, été préférées à la reconstruction. De ce fait, de nombreuses personnes vivent dans des logements dits transitoires, depuis plus d’un an.
Une situation qui n’est pas près de s’achever !, déplorent François et Schneider.
Quant aux subventions au loyer, octroyées - pour une année - par les agences, dans le cadre de programmes de relocalisation - qui s’élèvent généralement à 20,000 gourdes [ US $ 1.00 = 43.00 gourdes ; 1 euro = 58.00 gourdes aujourd’hui] par famille -, le révérend père Kawas François dit s’inquiéter pour la situation, dans laquelle se trouveront ces personnes lorsque cette somme aura été dépensée.
Sur environ 256,000 familles, ayant quitté les camps de personnes déplacées, entre juillet 2010 et avril 2012, moins de 44,000 ont reçu une subvention, soit une personne sur cinq, révèle l’étude de l’observatoire des politiques publiques et de la coopération internationale.
Les causes de ces phénomènes ?
Par une action le plus souvent non concertée et non standardisée, les organisations humanitaires n’optimisent pas leurs efforts. Elles opèrent de façon complètement indépendante, voire anarchique, signale l’Oppci.
De plus, leur nombre ne facilite pas l’unicité dans l’action.
Il faut renforcer le pouvoir de contrôle de l’État sur ces agences, notamment en systématisant l’inscription des Ong à l’unité de coordination du ministère de la planification et de la coopération externe (Mpce) et surtout en réaffirmant le décret du 14 septembre 1989 qui règle la présence des agences sur le territoire, préconise Esther Schneider.
Un renforcement de toutes les institutions pour parvenir à une gestion complète de la reconstruction par l’État
Il s’agirait de faire de la politique de logement : non plus un élément isolé, mais une stratégie solide, qui s’ancrerait dans le programme d’actions du ministère des affaires sociales et du travail (Mast), dont le rôle est la refondation sociale, propose l’Oppci.
La politique de logement représenterait une partie du budget du Mast. Ce qui n’a pas été réalisé, pour l’instant.
C’est également dans un processus législatif, notamment à propos des titres fonciers, que le processus de reconstruction devrait prendre place dans un premier temps, afin de rendre cette politique tout à fait pérenne et cohérente.
Bien plus que par la création de nouveaux organes techniques, comme l’unité de construction du logement et des bâtiments publics (Uclbp) - solution plutôt secondaire, d’autant plus qu’elle ne repose que très partiellement sur l’État et qu’il existe, depuis longtemps, l’entreprise publique de promotion de logements sociaux (Eppls) -, il s’agirait de réhabiliter le problème du logement comme étant celui des politiques publiques et des ministères.
Tout cela, afin “d’aller plus loin” qu’un simple retour à la situation initiale, souhaite le révérend père Kawas François.
Source: Alterpresse www.alterpresse.org
https://www.alainet.org/fr/active/56755