Selon les spécialistes des Nations Unies en droits humains

Le Brésil doit accomplir ses obligations légales internationales

11/02/2019
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Le Brésil a l’obligation légale internationale d’établir des mécanismes nationaux de prévention pour combattre la torture et les mauvais traitements. En effet, ce pays sud-américain avait ratifié le protocole facultatif de la Convention contre la torture et autres traitements ou peines cruels, inhumains ou dégradants (connue sous son sigle anglais OPCAT).

 

Telles sont les déclarations de spécialistes en droits humains du sous-comité des Nations Unies pour la prévention de la torture. D’après l’information officielle communiquée par le siège genevois des Nations Unies (ONU), ceux-ci « sont profondément préoccupés par le récent veto du gouverneur de l’Etat de São Paulo contre la loi 1257, établissant un mécanisme anti-torture dans cet Etat ».

 

Le protocole facultatif, adopté par l’Assemblée générale des Nations Unies le 18 décembre 2002, est entré en vigueur le 22 juin 2006. Son objectif principal consiste à prévenir la torture, grâce à l’ouverture des lieux de détention pour un contrôle effectué par des entités indépendantes. Le Brésil a ratifié ce protocole le 19 avril 2007, grâce au décret 6.085 signé par Luis Inácio da Silva, alors président de la République en fonction.

 

« Que le Brésil applique »

 

« Nous espérons que le Brésil continuera à remplir ses obligations internationales, qu’il renverse cette décision [Ndr : de l’Etat de São Paulo] et maintienne son engagement de lutter contre la torture », affirme Sir Malcolm Evans, président du sous-comité pour la prévention de la torture.

 

En 2015, le Brésil a introduit une loi fédérale créant un système national de prévention et de combat contre la torture, basée sur une série de mécanismes préventifs à l’échelle nationale. Ces mécanismes furent adoptés par les Etats de Rio de Janeiro, Pernambouc, Roraima et par le District fédéral de Brasilia. « Le veto annoncé par le gouverneur de São Paulo inverse cette tendance positive », signale l’ONU dans un communiqué daté du 5 février 2019, à Genève (Suisse).

 

Ce communiqué rappelle que les mécanismes indépendants de prévention de la torture représentent l’un des moyens les plus efficaces pour protéger tous les détenus contre d’éventuels mauvais traitement et une manière de leur garantir le droit à un procès équitable, selon les normes de l’Etat de droit du pays concerné. Et de rappeler que « le gouvernement fédéral du Brésil est obligé, au niveau légal international, à garantir l’application de ces normes ».

 

Moro annonce des réformes préoccupantes

 

La position des experts internationaux en droits humains fut connue un jour après que Sergio Moro (ministre brésilien de la Justice) ait présenté le lundi 4 février 2019 – devant une dizaine de gouverneurs – un nouveau projet de loi anti-corruption et anti-crime. Ce projet prévoit la modification de 14 lois et d’articles du Code pénal, du Code de procédure pénale, de la Loi d’exécution pénale, du Code électoral et de la Loi sur les crimes atroces.

 

Selon le raisonnement du ministre de la Justice du gouvernement Bolsonaro, « le crime organisé utilise la corruption pour rester impuni. D’autre part, le crime est lié à une bonne partie des homicides commis dans le pays ».

 

Différentes organisations et personnalités de la société civile ont alerté des risques de cette proposition juridico-répressive en marche. « Je pense qu’elle cherche à supprimer diverses garanties fondamentales du citoyen, avec l’objectif de rendre plus effectif le processus pénal… une erreur déjà pratiquée durant les 40 ou 50 dernières années », souligne dans un entretien accordé à Carta Mayor l’avocat Cristiano Maronna, ex-président de l’Institut brésilien des sciences criminelles (IBCCRIM).

 

Pour cet expert, la proposition n’est pas surprenante, car elle s’inscrit dans la continuité des annonces faites par Jair Bolsonaro lors de sa campagne électorale. En réalité, ce qui suscite l’attention, « c’est que cette proposition émane d’un magistrat devenu aujourd’hui ministre de la Justice ». Même si, comme celui-ci est un membre historique de l’extrême-droite, « ça ne me surprend pas… Ce sont des mesures d’un gouvernement qui fait ce qu’il fallait en attendre », conclut Maronna.

 

- Sergio Ferrari, de l’ONU, Genève, Suisse

 

Traduction de l’espagnol : Hans-Peter Renk

 

https://www.alainet.org/fr/articulo/198052?language=en
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