Le gouvernement Lafontant entre crises sectorielles et promesses
- Opinión
P-au-P, 23 juin 2017 [AlterPresse] --- Depuis plusieurs semaines, le pays est secoué par une vague de mouvements de protestations, issus notamment de secteurs sociaux, ouvriers et enseignants, entre autres, alors que le gouvernement se limite, pour le moment, à des promesses.
Des ouvriers de la branche textile ne cessent de réclamer un ajustement salarial à 800 gourdes et menacent même de reprendre, dans les jours qui viennent, la mobilisation dans les rues pour exiger la satisfaction de leurs revendications.
Ils réclament également des accompagnements et d’autres avantages sociaux non-négociables en faveur du secteur ouvrier.
Le président de la république, Jovenel Moïse a promis de créer des conditions pour sortir la population de la misère et augmenter la production de richesses au bénéfice de tous.
Pour sa part, le titulaire du Ministère des affaires sociales et du travail (Mast), Roosevelt Bellevue, a prévu une assistance alimentaire et médicale pour les ouvriers.
Il a aussi annoncé que plus de 300 bus seront disponibles pour faciliter leur transport.
Un nouveau Conseil supérieur des salaires (Css), mis en place par le président de la république, Jovenel Moïse, suite à un arrêté publié dans le journal officiel Le Moniteur, le lundi 5 juin 2017, n’a pas réussi à calmer l’ardeur des syndicats d’ouvrières et d’ouvriers qui critiquent certains membres du Css, trop habitués à défendre la cause des patrons.
Ces nominations ont été également rejetées pour cause d’ingérence grave de l’exécutif.
Quant aux enseignants, l’incapacité de trouver un terrain d’entente avec le gouvernement les a poussés, à travers l’Union nationale des normaliennes et normaliens haïtiens (Unnoh), à annoncer une seconde phase dans la mobilisation enseignante à la réouverture des classes, prévue début septembre 2017.
L’Unnoh a déjà réalisé plusieurs manifestations à Port-au-Prince pour contraindre les autorités à répondre aux revendications des enseignants qui réclament le paiement de tous les arriérés de salaire, leur nomination, un ajustement salarial en fonction de l’augmentation du coût de la vie et l’application de la loi sur les frais scolaires.
Le jeudi 1er juin 2017, plusieurs élèves des écoles publics ont gagné les rues de Port-au-Prince pour exiger la présence de professeurs dans les salles de classes.
Selon Josué Mérilien, de l’Unnoh, le gouvernement n’a pas pu répondre aux revendications des enseignants.
Diverses autres revendications liées surtout à la réforme universitaire sont exprimées du côté des étudiants de plusieurs entités de l’Université d’État d’Haïti (Ueh) notamment ceux de l’École normale supérieure (Ens), des Facultés des sciences humaines (Fasch), d’Ethnologie (Fe) et de l’École nationale des arts (Enarts).
Des incidents violents, survenus le lundi 12 juin 2017, impliquant particulièrement le doyen de la faculté d’Ethnologie, Jean Yves Blot, et un étudiant en anthropo-sociologie de la faculté, Jean John Rock Gourgueder, expulsé de la faculté, sont venus empirer la situation de crise qui prévaut à l’université.
Le doyen a été accusé d’avoir fait rouler un véhiculé sur Gourgueder, ce jour-là. Version démentie par le doyen et d’autres professeurs, qui affirment que la victime s’est délibérément jetée sur le véhicule, au moment où le professeur laissait l’espace après une « tentative de séquestration » par les étudiants.
Une manifestation d’étudiants organisée pour dénoncer le comportement de Blot a été dispersée, le jeudi 22 juin 2017, devant le Rectorat où le doyen donnait une conférence de presse sur l’incident malheureux survenu le 12 juin 2017.
Les étudiants protestataires rejettent la décision du Rectorat de l’Ueh de prendre en charge les soins médicaux de la victime.
Le Rectorat a également mis sur pied, le jeudi 15 juin 2017, une commission d’enquête, constituée essentiellement de professeurs de l’Ueh, en vue de faire la lumière autour de l’incident.
Les membres de la commission sont Laënec Hurbon, Roland Louis-Charles, Odonel Pierre-Louis et Djacamann Charles.
A part la mobilisation étudiante, d’autres mouvements sporadiques ont éclaté dans plusieurs autres institutions publiques sous l’impulsion d’employés et de syndicats de travailleurs qui exigent de meilleures conditions de travail.
Suite à un arrêt de travail observé le 4 avril 2017, par le Syndicat des fonctionnaires de la Cour supérieure des comptes et du contentieux administratif (Synfo Csc/ca) pour exiger, entre autres, une augmentation salariale, 27 de ses membres ont été interdits de pénétrer l’enceinte de l’institution depuis le 20 avril.
Le lundi 15 mai 2017, un nouvel arrêt de travail a été observé par le syndicat pour réclamer la réintégration d’employés suspendus de l’institution.
Les pourparlers se sont révélés infructueux, à plusieurs reprises.
Depuis lors, aucune information n’a été donnée sur la situation qui prédomine à la Csc/ca depuis le début du mois d’avril.
De plus, des employés de l’Office d’assurance des véhicules contres tiers (Oavct) sont en grève depuis plus d’un mois pour exiger la révocation du directeur général de l’institution, Elie Blaise, qu’ils accusent de corruption et de gabegie administrative.
Les employés ont décidé de surseoir à leur mouvement de protestation suite à la promesse du président Jovenel Moïse de résoudre cette crise qui perdure dans l’institution, fait savoir, la semaine dernière, le porte-parole du syndicat de l’Oavct, Jean Roudy Saint-Juste.
Les contribuables se plaignent de la paralysie des services au niveau du bureau central et des bureaux régionaux de l’Oavct, provoqué par ce mouvement.
Des contribuables qui ne peuvent pas renouveler leur police d’assurance à cause de cette perturbation se voient, tout de même, sanctionnés pour absence ou expiration de ce document.
23 juin 2017
http://www.alterpresse.org/spip.php?article21777#.WU7_AumQzIU