Un Tea Party tropical?
- Opinión
Dans un contexte marqué par un brusque ralentissement économique et un nouveau scandale de corruption touchant les partis de la coalition gouvernementale, on assiste à la montée en puissance d’une droite « nouvelle », radicale et militante au Brésil. Apparue dans la foulée des mobilisations de juin 2013, elle forme un attelage hétéroclite d’organisations et de groupuscules de provenance et d’identité diverses, sans lien apparent, si ce n’est une commune aversion pour la gauche en général, le PT en particulier. Partageant plus qu’un air de famille avec le Tea Party aux États-Unis, dont elle reprend discours ultralibéral, sécuritaire et antisolidarité, elle s’est donnée pour mission d’enterrer les acquis du « lulisme », profitant du discrédit généralisé qui s’est abattu sur la classe politique depuis la mise au jour d’une importante affaire de corruption impliquant l’entreprise publique Petrobras. Capable désormais de mobiliser des dizaines de milliers de personnes, en surfant sur les mécontentements, elle constitue un nouveau défi pour la gauche brésilienne, de plus en plus affaiblie, divisée et désorientée.
« Nous ne laisserons jamais notre pays devenir une dictature totalitaire, ce qui est l’objectif du PT » (Kim Kataguiri, 20 ans, blogueur et leader du collectif de droite Movimento Brasil Livre, 2014)
« Les dames des Marches de la Famille avec Dieu [1] paraissaient elles aussi sympathiques et civilisées. Mais derrière elles sont venus les chiens de la répression, les assassinats, les tyrans et la nuit surtout qui s’est abattue sur le peuple brésilien » (Fernando Brito, « O vácuo político é estufa da direita », Tijolaço, 21 juin 2013)
Ils éructent contre les homosexuels, les indigènes, les Nordestins, les défenseurs de l’avortement et la politique des quotas réservés aux gens de couleur, et se déchaînent contre les mouvements progressistes. Ils dénoncent la mainmise des « Cubains » sur les institutions fédérales, fulminent contre les impôts, la corruption et les programmes sociaux du gouvernement. Ils exigent le rabaissement de la majorité pénale, la restauration de la peine de mort, la libre circulation des armes à feu, le retrait des garanties juridiques pour les prisonniers de droit commun, considérés comme des privilegios de bandidos (privilèges de bandits). Ils prônent un État minimal et réclament la privatisation des entreprises publiques, militent parfois pour l’indépendance de la région de São Paulo au prétexte de le soustraire au vote « clientéliste » des couches populaires et se mobilisent dans la rue ou sur les réseaux sociaux pour réclamer le départ de Dilma Rousseff, voire sa destitution par l’armée.
Formant une nébuleuse à géométrie variable d’organisations et de groupuscules aux frontières poreuses, ces activistes, souvent jeunes, souvent bien nés, ont aujourd’hui le vent en poupe au Brésil. En témoignent les nombreuses manifestations en faveur de l’impeachment qui déferlent sur le pays depuis début 2015. Inédit par son ampleur, ce mouvement anti-Dilma, qui a culminé avec la grande mobilisation du 13 mars 2015, laquelle a rassemblé près de 2 millions de personnes dans plus d’une centaine de villes, est d’ores et déjà considéré par certains comme la vague de protestation la plus importante depuis le mouvement des Direitas Já en 1983 et 1984.
Reste que, contrairement à cet élan massif qui contribua à renvoyer les militaires dans leurs casernes, il n’est plus question ici pour les protestataires de réclamer plus de droits ni plus d’avancées démocratiques. Leurs cibles ? La corruption de la classe politique, les militants progressistes, les leaders du PT, les taxes et les impôts ou encore les dépenses d’un gouvernement largement qu’comme corrompu, dispendieux, intrusif, voire totalitaire. Dopés par les mobilisations monstres de juin 2013 et trouvant actuellement un réel écho au sein des couches moyennes urbaines, ces activistes sont aujourd’hui les fers de lance d’une « nouvelle droite », ultra-radicale, agissante et militante, dont le surgissement récent dans l’espace public, politique et médiatique constitue, selon le philosophe Paulo Eduardo Arantes, l’un des phénomènes politiques les plus importants de l’histoire contemporaine du Brésil.
Un réveil bruyant dans le chaudron des « Journées de juin 2013 »
« L’élan d’impatience qui s’est manifesté dans les mobilisations de juin 2013 s’est accompagné d’un élan symétrique et antagonique : l’émergence d’une nouvelle droite …, une droite non conventionnelle qu’il est difficile d’appréhender à partir des catégories politiques traditionnelles » (Folha de São Paulo, 31 octobre 2014). À contre-courant des interprétations angéliques, essentialistes et fantasmées qui ont été faites des mobilisations de juin 2013, souvent vues comme le réveil politique d’une jeunesse à forte sensibilité progressiste, Arantes propose une grille de lecture bien différente. Il en appelle à l’adoption d’autres lunettes sociologiques permettant de mieux saisir l’événement, sa nature et sa portée. Plus concrètement, il invite à reconsidérer ces mobilisations à l’aune de ses dynamiques concrètes et de ses prolongements dans le contexte politique le plus immédiat : la montée en puissance d’une nouvelle droite réactionnaire, radicale et militante qui s’est donné pour objectif d’enterrer les acquis du lulisme.
Dans la chaleur des journées de juin, le phénomène n’avait guère échappé aux commentateurs brésiliens les plus avisés, témoins directs des événements. Deux semaines à peine après le début de ces mobilisations massives qui ont secoué les grandes villes du pays, tous font état d’un changement de cap, de ton et de composition de la protestation. Tous observent une transfiguration du mouvement. Tous notent un subit glissement des revendications progressistes initialement (baisse du prix des transports, meilleurs services publics, etc.) vers des slogans antisystème, irrationnels, poujadistes ou nationalistes, voire vers des mots d’ordre franchement réactionnaires sur le plan social.
Dans un éditorial publié le lendemain de la grande manifestation du 20 juin à São Paulo, le journaliste et historien Gilberto Maringoni, observateur attentif des dynamiques sociopolitiques brésiliennes, insiste déjà sur ce basculement. Les « demandes socialement positives et généreuses de la première vague de protestation » note-t-il alors, « ont fait place à une révolte conservatrice « contra todo o que está aí » (contre tout ce qui est en place) », contre la corruption, les impôts, Bolsa família [2] , Lula, Dilma, les partis politiques en général, ceux de gauche en particulier. Et d’insister ensuite sur la peur qui s’est emparée de très nombreux manifestants après l’agression de dizaines de militants de gauche par des groupes de protestataires : « J’ai vu, sur internet et au sein même des manifestations, beaucoup de gens effrayés. Des hooligans encapuchonnés ou masqués ont semé la peur à toute heure de la journée. Ceux-ci s’en sont d’abord pris à des militants de partis politiques et de mouvements sociaux, arrachant leurs drapeaux et y boutant le feu. Et après avoir poussé leurs cris de guerre – “suppression des partis”, “suppression du gouvernement”, “mon parti est le Brésil” -, ils en ont appelé à une “action contre le communisme” dans les prochaines semaines dans le plus pur style de la guerre froide. Ils sont venus là pour gâcher la fête. Et ils y sont parvenus en partie à São Paulo ». Alertant sur le danger de la situation, Maringoni n’hésite pas à comparer, dans le même billet, cette manifestation pauliste à la « Marche sur Rome » de sinistre mémoire (Carta Maior, 21 juin 2013).
Même son de cloche de la part de Marco Aurélio Weissheimer, chroniqueur à Carta Maior, qui écrit également à chaud : « Ce qui avait commencé comme une grande mobilisation sociale contre l’augmentation des billets de bus et la défense d’un transport public de qualité est en train de déboucher, sous nos yeux, sur une expérience sociale incontrôlable possédant des caractéristiques fascistes on ne peut plus méprisables (…). Dans la nuit de jeudi à vendredi, tous les traits constitutifs de notre démocratie ont été menacés et attaqués, de diverses manières et dans plusieurs villes du pays. De la violence policière ? Il y en a eu, certes. Mais ce qui s’est passé hier n’est pas moins grave (…) : attaques perpétrées contre des militants de gauche et expulsion de ces derniers des manifestations, attaques contre des sièges de partis politiques et d’institutions publiques (…). Et ce ne sont pas seulement des militants pétistes qui ont été agressés et expulsés (…). Dans plusieurs villes du pays [ces agressions] se sont également multipliées contre des militants du PSOL, du PSTU, du MST [3] et même contre certaines personnes qui ne représentaient qu’elles-mêmes (….) » (21 juin 2013).
De São Paulo, Porto Alegre, Brasilia, Rio de Janeiro, Belo Horizonte et bien d’autres villes du pays afflueront ensuite quantité de témoignages similaires si bien que les militants de gauche (à l’exception peut-être de quelques groupuscules anarchistes et autonomistes) et de nombreux simples citoyens vont se retirer de la protestation. Alarmé par la tournure prise par les événements, le MPL (Movimento Passe Livre) [4] , à l’origine du mouvement, annoncera d’ailleurs lui aussi publiquement son désengagement et appellera ses militants à cesser l’action, dénonçant la violence envers les partis et militants de gauche, l’instrumentalisation de la protestation par des médias à la botte de l’opposition et son infiltration par des militants néofascistes (Fórum, 2013 ; Vainer et al, 2013).
Comment expliquer un tel retournement ? Qui sont ces activistes ? Que veulent-ils ? Et d’où viennent-ils ? Profitant de l’absence de leadership, de direction ou de mots d’ordre convenus de la part des organisateurs de ces mobilisations, ils ont cherché à investir le mouvement, lui donner leur propre impulsion, leur orientation. Personne ne les attendait. Personne, à de rares exceptions près, ne les a vus venir. Dans le chaos des journées de juin, rares étaient ceux qui étaient en mesure les identifier.
Et ce flou a ensuite été accentué par les lectures globalement positives et enthousiastes –singulièrement à l’extérieur du pays – qui ont été faites de ces mobilisations, parées par leurs interprètes de toutes les vertus (Vainer et al, 2013 ; Bringel, Pleyers, 2015). À l’évidence, ces lectures unidimensionnelles ont eu pour effet de dérober au regard cette autre dimension centrale, nettement plus sombre, de la révolte de la jeunesse brésilienne, comme le note, deux ans plus tard, Angela Alonso, sociologue brésilienne des mouvements sociaux : « Tout le monde a pris peur en juin 2013 – gauche et droite, gouvernement et opposition, médias et opinion publique. Puis des interprétations prometteuses, dans le sens de la renaissance du civisme, du retour d’une visée émancipatrice et d’une nouvelle gauche, ont été avancées. (…). Ont été mises en évidence les revendications réclamant plus d’État sinon un État meilleur, des politiques publiques universelles et efficientes. Le côté obscur [de ces mobilisations] était moins évoqué : la clameur en faveur d’un État minimal, contre la politique et les politiques. Ce qui n’était encore qu’une onde en 2013 s’est transformé en marée en mars 2015 et, maintenant, elle tend à croître tel un tsunami (Folha de São Paulo, juin 2015).
De fait, entamé en juin 2013, le « cycle de mobilisation » ne s’est pas terminé avec l’essoufflement de ces protestations dans les mois suivants (Vrydagh, 2015). Il a tout simplement pris une toute autre direction et, avec elle, un nouveau souffle. Faut-il encore le rappeler ici, un mouvement ne possède pas automatiquement des attributs progressistes quand bien même est-il jeune et massif ? Car, si l’on a beaucoup dit et écrit que cette mobilisation avait contribué à politiser une jeunesse que l’on a longtemps décrite comme inerte politiquement, force est de constater après coup que pour beaucoup de ces jeunes, cette entrée en politique s’est faite par la porte de droite.
Acteurs et protagonistes d’une nouvelle droite militante
Dissimulés dans les foules grimées de jaune et de vert qui ont envahi les rues dans la deuxième quinzaine du mois de juin 2013, ces activistes de droite faisaient alors figure d’objets non identifiés pour la plupart des analystes. Ce n’est qu’après coup, en multipliant les actes publics, les appels à l’action et à la mobilisation en leur nom propre, qu’ils ont fini par faire tomber le masque. Après Junho, ils ont continué à investir la rue, les médias, les réseaux sociaux révélant publiquement leur identité, et affichant leurs intentions et objectifs. Ils ont aussi créé de nouvelles organisations pour canaliser le mécontentement. Et leurs leaders font aujourd’hui la une des médias. Limitée au départ à une poignée de militants, cette nouvelle droite n’a cessé ensuite de monter en puissance au point d’être en mesure aujourd’hui de mobiliser sur un cahier de revendications réactionnaires des dizaines de milliers de personnes.
À première vue, cette nouvelle droite est loin d’être homogène. Dans ses manifestations publiques, elle s’apparente à un attelage hétéroclite et à géométrie variable de courants, de mouvances, de militants et de sympathisants de provenances et d’identités très diverses. On y croise pêle-mêle des fondamentalistes pentecôtistes et des traditionalistes catholiques ; les militants antiavortement du Movimento Legislação e Vida (Législation et Vie) ; des (ex)militaires et (ex)policiers du Partido militar brasileiro (Parti militaire brésilien) ; des nostalgiques de la dictature et des grandes Marches de la famille avec Dieu et pour la liberté ; d’anciens électeurs de l’excentrique tribun ultranationaliste Enéas Carneiro [5] et de fervents admirateurs du député Jair Bolsonaro ; des activistes venus du mouvement « anticorruption » Cansei [6] ; des néo-intégralistes ; des membres du Movimento Viva Brasil qui revendique la liberté du port d’armes ; de jeunes hipsters libertariens et art-activistes de droite ; des skinheads, des journalistes, des chroniqueurs, des vedettes du petit écran et un cortège extravagant de personnalités publiques : bimbos excentriques devenues égérie du mouvement et coqueluche des médias, un rocker bien connu pour ses positions extrême (Lobão), des clowns médiatiques ; et même un ex-acteur et producteur de films pornos. Viennent ensuite l’écrasante masse des manifestants peu ou prou politisés, souvent versatiles et séduits par les mots d’ordre antigouvernementaux et antiparlementaires des organisateurs de cette révolte réactionnaire, et quelques figures politiques de l’opposition désireux de tirer profit de ce mouvement (Solnik 2012 ; Nogueira 2013 ; Campos Mello 2014 ; Martin, 2014 ; [7], 2015).
Parmi ces acteurs protestataires d’un nouveau genre dans le pays, quatre collectifs tiennent le haut du pavé, jouant un rôle mobilisateur clé : le Movimento Brasil livre (Mouvement Brésil libre), Revoltados On Line (Révoltés en ligne), Vem Pra Rua (Descend dans la rue) et le mouvement Endireitar Brasil (Droitiser le Brésil). Principales chevilles ouvrières des récentes manifestations anti-gouvernementales et pro-impeachment, ensemble, ces organisations ont très vite acquis une capacité de mobilisation qui dépasse de loin le MPL (Movimento passe Livre), le MST, les syndicats et les autres organisations de gauche. Sachant tirer profit d’un contexte politique, social et politique (révélation de corruption, récession, etc.) morose, ces collectifs n’ont cessé d’élargir et leur base et leur audience. Mobilisant contre la corruption et sur un agenda antigouvernemental, ils ont réussi à fédérer les mécontents et à les faire descendre en masse dans la rue. Établissant entre eux, et avec d’autres organisations, de nombreuses passerelles, ils ont donné à cette nouvelle droite des mots d’ordres et des orientations. Mieux structuré que la multitude de groupuscules dispersés de gauche, ces collectifs disposent désormais force de frappe politique inattendue capable de déstabiliser le gouvernement.
Bien que divergents sur plusieurs points, ces collectifs se réclament l’ultralibéralisme et militent activement pour la limitation, stricte ou non, du champ d’action de l’État à ses fonctions régaliennes classiques. Si Endireitar Brasil et Revoltados On Line partagent avec les courants néo-intégralistes, un attachement indéfectible à la nation, aux traditions, à la religion et un même culte de l’autorité et de la force virile, ces nouveaux acteurs de droite s’en distinguent cependant par une autre vision de l’économie, le refus de l’interventionnisme d’État et des solidarités organiques, le culte du marché et des libertés individuelles voire par la promotion d’un véritable darwinisme social [8] . Et tous se font les tenants d’une idéologie de type sécuritaire qui prend parfois dans la bouche de certains des leaders de cette nouvelle droite des accents ouvertement xénophobes et racistes, envers les Nordestins, « éternels assistés » et les migrants haïtiens ou africains. Tous enfin convergent sur une commune aversion du PT, de la gauche, de ses acteurs et de ses valeurs. Même les mouvements cyclistes ne trouvent pas grâce à leurs yeux.
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Encadré n° 1 :
MPL, Vem pra Rua, Révoltados On line, Endireitar Brasil : fers de la nouvelle droite brésilienne
Créés en novembre 2014 par une poignée des jeunes art-activistes proches du groupe Estudiantes pela Libertade (Étudiants pour la liberté), dont il serait une émanation [9] , le Movimento Brasil Livre est la première grande composante de cette nouvelle droite mouvementiste. Surfant sur la vague de mécontentement suscitée par l’enquête du Lava Jato, le MBL s’adresse principalement à un public jeune et souvent aisé. Passés maîtres dans l’utilisation des réseaux sociaux et des technologies de l’information, trois de ses fondateurs, Kim Kataguiri, Alexander et Renan Santos sont rapidement devenus des figures de proue du mouvement anti-Dilma. Se réclament à la fois de la pensée de Ludwig von Mises et Friedrich Hayek, le MBL prône un libéralisme intégral et un État minimal. Même s’il réfute les accusations de « golpismo » qui lui sont régulièrement adressées, son très jeune et arrogant leader, Kim Kataguiri n’a pas hésité à déclarer suscitant une vive polémique : « Il ne faut pas se contenter de faire saigner le PT, il faut lui donner une balle dans la tête ».
Composé aux dires même des membres du MBL de militants bien plus vieux et aisés, le mouvement Vem Pra Rua donne en quelque sorte une caution morale à la protestation anti-gouvernementale et anti-Dilma. Bien que plus tempéré que le MBL dans son discours, il partage toutefois avec ce dernier de nombreuses caractéristiques. Proche lui aussi des think tanks et fondations d’inspiration néolibérale et libertarienne, son jeune leader, Rogério Chequer, défend une vision économique similaire, un même culte du marché, de l’individualisme et une même défiance vis-à-vis de l’État et des dépenses publiques. Se réclamant de valeurs démocratiques et se disant au-dessus des partis et de la mêlée politique, le groupe n’en entretient pas moins des liens avec des personnalités politiques de l’opposition (PSDB notamment), et est régulièrement accusé, à l’instar du MBL, d’être financé de l’extérieur, par de puissantes fondations privées, dont celles les frères Koch notamment, principaux bailleurs de fonds du Tea Party aux États-Unis. Disposant des ressources les plus importantes et fort du soutien d’un vaste réseau de sympathisants, le collectif aurait réussi à mobiliser des sympathisants dans près de 240 villes lors des protestations anti-Dilma.
Fondé en 2010 par l’entrepreneur et webmaster Marcello Reis, Revoltados On Line est, avec le mouvement Endireitar Brasil, le plus à droite et le plus « moralistes » de ces quatre groupes. Proche des députés Jair Bolsorano, le collectif se définit comme « une initiative populaire de combat contre les corrompus du pouvoir ». Revoltados On Line prône le laissez-faire économique, la baisse des impôts et la fin des programmes sociaux, une moralisation de la vie publique et prives, la liberté du port d’armes, un renforcement des forces de politiques et militaires, et un anticommunisme viscéral. Depuis 2013, l’audience de ce petit collectif n’a cessé de croître auprès des petits entrepreneurs et commerçants, voire des cadres du privé. Son fondateur revendique aujourd’hui l’appui de centaines de milliers de sympathisants dans le pays (1,3 millions d’après la page Facebook de l’organisation). Récemment le groupe a lancé une violente campagne contre Lula, probable candidat du PT aux prochaines élections présidentielles, l’accusant de corruption, demandant son arrestation immédiates et n’hésitant pas à l’affubler de sobriquet qui masque mal le racisme social dont il fait preuve [10] .
Bénéficiant d’une audience plus régionale, Endireitar Brasil est le plus ancien de ces quatre groupes. Organisateur depuis sa fondation en 2006 du Dia da Liberdade de Impostos (Jour sans impôt) à São Paulo, le mouvement entend défendre la propriété et des libertés économiques contre l’« étatisation de la sphère privée ». Fondé par de jeunes cadres, formés aux États-Unis, Endireitar Brasil est membre de l’Institut Milenium le principal think tanks de la droite brésilienne. Son leader, l’avocat Ricardo Salles, ex-secrétaire particulier du gouverneur de São Paulo, Geraldo Alkmin, est aujourd’hui l’un des grands apologistes du coup d’État de 1964.
Sources : Amaral (2015), Autunes (2015), Alonso (2015)
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Un Tea Party tropical ?
En fait, s’il est un phénomène politique avec lequel cette nouvelle droite militante partage non pas seulement un air de famille, mais de réelles accointances, c’est bien le Tea Party aux États-Unis. Le parallèle est évident. La ressemblance est frappante. Comme le Tea Party étasunien, cette droite qui mobilise dans la rue et multiplie les actes publics est formée d’une multitude d’organisations et de groupuscules plus ou moins reliés entre eux en réseau. Comme lui, elle est diffuse, présente à la fois dans le monde des médias, dans les administrations, dans les partis politiques et le monde de l’entreprise. Comme lui, elle s’est constituée en réponse à l’arrivée au pouvoir d’un gouvernement progressiste ou supposé tel (Barack Obama aux États-Unis, Lula au Brésil), et se présente comme le dernier rempart de la démocratie face à l’interventionnisme des pouvoirs publics, indistinctement taxés de communistes, de fascistes et de néonazis (sic).
Comme lui, elle se veut la gardienne des traditions fondatrices de la nation et une réponse au déclin des valeurs et à l’érosion des mœurs. Comme lui, elle se pose en défenseur, des classes moyennes, voire des petites gens face à la tyrannie de l’impôt, se présente comme le garant des libertés politiques et économiques face à un État et des politiques qu’elle juge intrusifs et oppressifs et combat toute idée de redistribution et de déconcentration des revenus et se vautre dans les thèses conspirationnistes et les diatribes anti-solidarité. Comme lui enfin, certaines de ses composantes sont proches, voire financées directement par des entreprises et de puissantes fondations privées (Guerlain 2012, 2015 ; Moreira Leite 2014 ; Campos Mello 2014 ; Amaral, 2015).
À noter que les principaux intéressés eux-mêmes se réclament de ce Tea Party nord-américain ; ou appellent de leurs vœux la formation d’un mouvement similaire. Certains ont même été jusqu’à proposer de manière anticipée un programme politique commun à ce Tea Party brésilien, à l’instar du directeur de l’Instituto Liberal, le publiciste Alexandre Borges, dans un article au ton prémonitoire, « Que venha o Tea Party brasileiro » (Mídia sem Máscara, 18 novembre 2014). Au Menu ? Réduction de la voilure de l’État, baisses drastiques de l’impôt sur les revenus, arrêt des flux migratoires, fin de l’intrusion de l’État dans la vie du citoyen, gel des dépenses publiques, promotion des valeurs traditionnelles, bref, simple copier-coller du programme défendu par le mouvement étatsunien, comme le notera d’ailleurs aussi l’hebdomadaire libéral The Economist (18 avril 2015).
Reste que la version brésilienne de ce Tea Party est plus radicale dans ses revendications et bien plus élitaire dans sa composition. Si elle agit pour le compte d’intérêts particuliers, à l’instar de son homologue étasunien, comme l’indiquent les liens de ses principaux acteurs avec le monde des affaires et quelques grands groupes et fondations privés, en revanche, ses membres appartiennent à des milieux beaucoup moins populaires, dans un pays aux inégalités bien plus abyssales qu’aux États-Unis. « Agissant dans un pays beaucoup plus pauvre et inégal (...), écrit ainsi le journaliste politique Paulo Moreira Leite, notre Tea Party est une traduction adaptée et appauvrie [de cette] même rhétorique. En se cachant derrière des causes présentées comme universelles, elle cherche à faire oublier qu’elle agit au nom d’intérêts bien particuliers. Dans sa version « tropicalisée » (ses membres) allèguent que tout ce que ce qui se maintient grâce à l’État constitue non seulement un embryon de communisme, mais est le fruit d’un vol (....). Quand ils s’expriment, ils se font passer pour des anarchistes de droite, mais ses véritables leaders et inspirateurs ont dans le passé flirté avec la dictature militaire, voire davantage » (Istoé-Independente, 2014).
Or, c’est précisément cette filiation avec les anciennes élites qui relativise la nouveauté de cette droite au Brésil. Si nouveauté il y a, elle ne tiendrait qu’à l’utilisation de répertoires d’action longtemps associés à la gauche et au détournement de ses symboles (Solnik, 2012). Parée de nouveaux atours, elle ne serait tout au plus que la dernière mouture du vieux fonds élitiste, réactionnaire, anticommuniste et antisocial de la société brésilienne, converti en idéologie anti-pétiste. Elle ne ferait que dissimuler de vieilles revendications derrière un langage nouveau destiné à « séduire et mettre dans sa poche les publics de gauche » (Amaral, 2015). « Au Brésil, explique ainsi l’historien pauliste Lincolm Secco, la recrudescence de l’idéologie anti-pétiste et la dégénérescence des Journées de juin ont donné à cette droite l’apparence de la nouveauté. Mais tout comme l’anticommunisme, l’antipétisme en tant que phénomène ne s’oppose pas à un parti en particulier. L’antipétisme existait déjà dans les années 1980 et ses motivations profondes sont les mêmes : la peur que les pauvres ne freinent l’ascension (sociale) des uns ou qu’ils ne gravissent les échelons et se rapprochent de vous » (Carta Maior, 7 novembre 2014).
Peur des élites bien entendu, mais aussi peur émanant des classes moyennes, anciennes et nouvelle, fragilisée par l’actuelle récession économique, déçues dans leurs aspirations et menacées par l’ascension sociale de certains groupes. Ce n’est certainement pas un hasard si l’écrasante majorité des participants aux mobilisations anti-Dilma et pro-impeachments de São Paulo sont issus des couches intermédiaires de la société brésilienne. Le profil social moyen du protestataire peut être esquissé à gros traits : jeune (entre 20 et 40), diplômé (en possession au minimum du diplôme d’études secondaire) et déclarant un revenu mensuel correspondant à au moins cinq salaires minima (260 dollars) ou plus (Cf. Pesquisa da Fundação Perseu Abramo, 22 mars 2015). Entre ces manifestants et ceux qui ont battu le pavé dans la seconde phase des mobilisations de juin 2013, la continuité sociale est indéniable [11] . Quelques soient les slogans, ces deux moments protestataires seraient révélateurs d’une même « révolte de classe » d’après Lincolm Secco (El País Brasil, 9 juin 2015).
Tant au niveau de leur profil de ses composantes que dans ses raisons d’action, le mouvement anti-Dilma ou pro-impeachment, partage en réalité bien plus de traits communs avec les « Marches pour la famille » qui ont précédé le coupe d’État de 1964 qu’avec le mouvement Occupy Wall Street ou celui de la place Gezi en Turquie. Analysant les motivations qui ont conduit l’élite à soutenir les coûts d’États anticommunistes dans les années 1960-1970, Alain Rouquié écrit avec brio dans son remarquable essai sur la démocratie en Amérique latine : « Les partisans du pouvoir au plus capables dénoncent ceux du pouvoir aux plus nombreux. L’élite ne reconnaît le principe de majorité que lorsqu’il répond à ses intérêts » (Rouquié, 2010). Le propos de Rouquié demeure pertinent aujourd’hui. Au fond, c’est la même haine du populaire, le même rejet des politiques sociales qui ont poussé leurs sympathisants dans la rue, c’est le même désarroi face à un contexte économique menaçant et une profonde crise politique qui a amené des dizaines de milliers de personnes à adhérer aux mots d’ordre de cette droite qui fusille le gouvernement pétiste et, aujourd’hui, l’ex-président Lula.
Antipétisme, racisme social, xénophobie et violence verbale
De fait, l’anti-pétisme constitue le principal ciment de cette nouvelle droite, son plus solide trait d’union, son principe fédérateur, mais aussi son principal fonds de commerce. Toutes ses composantes partagent une commune aversion vis-à-vis de la gauche en général, du PT et du gouvernement pétiste de Dilma Rousseff en particulier. Sans exception aucune, le Parti des travailleurs et ses représentants au gouvernement sont affublés de tous les vices et rendus responsables de tous les maux de la société brésilienne : criminalité galopante, corruption, gabegie, dissolution des moeurs et des valeurs, crise, etc. Abondamment relayé par une presse carnassière, avide de sang et de larmes, chaque drame, chaque affaire, chaque scandale est mis sur le compte soit du PT, soit du gouvernement, soit des politiques, soit encore de l’environnement qu’ils auraient contribué à instaurer.
Dans un tel climat, il est aisé de comprendre que les mobilisations de juin 2013 aient été une véritable aubaine cette nouvelle droite. En se transformant en une violente charge contre les pouvoirs publics et le gouvernement fédéral, cette protestation massive lui a donné l’opportunité non seulement d’exister et de se faire entendre, mais aussi d’étendre son influence et son audience bien au-delà des cercles restreints dans lesquels elle demeurait confinée jusque-là. Saisissant l’opportunité offerte tant par la vague de protestation de juin 2013 et par les révélations faisant suite à l’opération Lava Jato, elle a finalement trouvé un réel écho au sein des classes moyennes urbaines, séduites par son discours antipétiste, anticorruption, autoritaire et sécuritaire, et effrayées par l’entrée du Brésil dans une nouvelle phase de récession économique. En témoignent, en autres, le succès du site d’information en ligne, Mídia sem Máscara (littéralement média sans masque), fondé par le journaliste d’extrême-droite, Olavo de Carvalho, la performance électorale de la famille Bolsonaro et du pasteur fondamentaliste Marco Feliciano, figures de proue de cette mouvance ultraradicale et surtout l’ampleur prise par les manifestations anti-gouvernementales et pro-impeachments à l’appel des principales chevilles ouvrières du mouvement.
Outre sa responsabilité dans la dégénérescence morale de la nation, le PT est accusé de vouloir instaurer une dictature socialiste dans le pays avec l’appui de ses alliés nationaux (mouvements sociaux, syndicats, Ordre des avocats du Brésil, enseignants et professeurs des universités, militants écologistes, féministes ou organisations de défense des droits de l’homme et des minorités, etc.) et l’aide des Cubains, des Vénézuéliens et des autres partis de gauche du continent. Ainsi, peu après les élections d’octobre 2014, plusieurs organisations de cette nouvelle droite publient un manifeste « Pour la démocratie » dans lequel elles déclarent dans un langage paranoïaque digne des pires moments de la guerre froide et truffé de références gramsciennes [12] :
« Nous descendons dans la rue pour défendre la démocratie brésilienne, sérieusement menacée par le projet totalitaire du PT, fomenté par le forum de São Paulo (organisation terroriste qui réunit les partis de gauche et des groupes criminels du continent) pour implanter le bolivarisme au Brésil et dans d’autres pays latino-américains, sous la direction des frères Castro). Nous savons que le PT s’emploie à éteindre les libertés individuelles au moyen des pires populisme et clientélisme, comme le montrent les désastreuses conséquences économiques, la dégradation morale généralisée et l’insécurité institutionnelle générées par l’accaparement de l’État et de la société civile par une idéologie hégémonique qui met en danger les libertés individuelles ». Et les signataires de ce manifeste de réclamer, après avoir déversé un torrent de haine et d’accusations mensongères contre le gouvernement, la destitution de Dilma Rousseff dans une rhétorique « golpiste » (promotion du coup d’État) à peine voilée, même s’ils s’en défendent (Mídia sem Máscara, 13 novembre 2014).
Si elle banalise la « rhétorique golpiste », cette diatribe anti-pétiste tend aussi à exclure de l’espace politique des catégories sociales entières, en réactivant les vieux préjugés sociaux et raciaux. La victoire étriquée de Dilma Rousseff face au candidat Aécio Neves a donné lieu par exemple à une violente campagne, relayée par les principaux médias (Veja, TV Record, Globo, etc.), contre les électeurs pauvres du Nordest-Est du pays, accusés d’avoir fait pencher la balance électorale en faveur de la candidate présidente pétiste. Un vote forcément clientéliste, caduc et non avenu pour cette nouvelle droite. Car, cette population « indolente », « mal éduquée » ; « ignorante » et « assistée » aurait été mobilisée, sinon instrumentalisée, à coup d’avantages et de programmes sociaux, dans le seul et unique but de servir les intérêts politiques hégémoniques du PT et de la gauche en général aux dépens des classes moyennes – blanches sous-entendu – des grandes villes du Sud du pays, poumon économique de la nation, comme le rappelait un journaliste de Mídia sem Máscara : « La grande vérité de 2014 » est celle-ci : « ce ne sont pas les pauvres qui ont besoin du PT, mais le PT qui a besoin des pauvres en situation de pauvreté. Pour qui ne s’en rend pas compte, là est la nouvelle relation de cause à effet de la misère au Brésil » (Puggina, 2014).
Cette captation apparaît ainsi d’autant plus scandaleuse à cette nouvelle droite qu’elle se ferait au détriment des autres groupes, obligés de mettre la main au portefeuille pour financer des politiques sociales instrumentales. « La justice sociale, affirmait ainsi avec aplomb, le jeune leader du MBL, est l’autre nom de charité avec l’argent d’autrui et de jouissance aux dépens des autres » (Cité in Antunes, 2015). Même l’enseignement public, qualifié de « fabrique d’idiots », ne trouve pas grâce aux yeux de cette droite. Outre les récentes affaires de corruption impliquant de nombreux parlementaires, cette « prise en otage » des « contribuables » par une population captive, justifie donc, pour une grande partie de cette droite, l’impeachment de Dilma Rousseff, l’intervention de l’armée ou encore les déclarations autonomistes de l’État de São Paulo.
Bien entendu, ces Nordestins pauvres, qui auraient volé la victoire aux classes moyennes du Sud, ne sont pas les seuls boucs émissaires de ce Tea Party. Les attaques de certaines de ses composantes visent aussi l’ensemble des catégories sociales pauvres, bénéficiaires des allocations sociales et des politiques de quotas, indigènes et populations afro-brésiliennes principalement, les « déviants » LGBT, les athées et les féministes, ainsi que l’ensemble des militants de gauche, dont il est affirmé avec aplomb – et preuve à l’appui – par les plus virulents porte-parole de cette droite qu’ils partagent tous des tendances « psychopathes » ou « hystériques » (De Carvalho, 2014).
Dans la bouche de quelques politiques, le propos se fait encore plus intolérant, le langage plus violent. Le champion toutes catégories de cette parole débridée est sans nul doute le député fédéral Jair Bolsonaro. Remonté par les accusations de violation à grande échelle des droits de l’homme par les militaires durant la dictature portée par la députée pétiste et ex-ministre des droits de l’homme de Dilma Rousseff, Maria do Rósario, il n’a pas hésité à lui lancer : « Je ne te violerai pas toi. Tu ne le mérites même pas », provoquant un tollé dans l’hémicycle. À un député du PSOL (Partido Socialismo e Libertade) qui avait proposé qu’une enquête soit ouverte contre lui pour des propos similaires, il avait rétorqué le plus sereinement du monde qu’il n’y répondrait « que sur du papier toilette », car le PSOL « est un parti de connards et de pédés » (Mauricio Tonetto, 2014 ; Vinogradoff, 2014).
Accusé d’incitation à la haine, à la violence et au viol, le patriarche de la famille Bolsonaro n’en était évidemment pas à son premier coup d’essai. Ainsi, à la fille du célèbre chanteur afro-brésilien Gilberto Gil qui l’interrogeait dans une émission télévisée sur l’éventualité d’une relation entre son fils et une mulâtre, il répondit « Je ne vais pas parler de promiscuité avec toi ni avec personne. Cela ne risque pas d’arriver, car mes fils ont été bien élevés et n’ont pas grandi dans le type d’environnement qui a été le tien » ! Racisme non dissimulé, mais aussi homophobie complètement assumée ! Aussi, à plusieurs reprises, avait-il ouvertement déclaré qu’il préférerait voir son fils mort plutôt qu’homosexuel, que jamais il ne s’installerait à côté d’un couple de gays, car « (ces gens) faisaient baisser le prix de l’immobilier » (Ibid).
Dépeints comme « malodorants et mal-éduqués », les indigènes sont également la cible du sarcasme xénophobe du très populaire député d’extrême droite, toujours tiré à quatre épingles. Ainsi, se référant aux représentants indigènes venus défendre la délimitation de leur territoire, il déclara : « L’Indien, c’est celui qui est en poste ici à Brasilia, voyage en avion, mange désormais une côtelette de porc, prend une chope et probablement un whisky (...) qui sait se montrer agréable au téléphone…. Cet indien est celui qui vient ici nous parler de réserves indigènes. Il devrait plutôt sortir là dehors, aller brouter de l’herbe et retrouver ainsi ses origines » (Guerreiro, 2008). Si le propos choque, il n’est pas surprenant de la part de celui qui considère les droits de l’homme comme de « excrément de vagabondage » (esterco do vagabundagem) et la torture comme un moyen légitime d’investigation (Istoé-Gente, 2000).
Malgré le feu nourri de critiques et de réactions outrées, le discours musclé de Jair Bolsonaro et ses fréquents écarts de langage et de conduite n’ont pas entamé le capital de sympathie dont il jouit à Rio de Janeiro. Loin de là ! Surfant sur la vague de contestation anti-PT, antigouvernementale et sécuritaire, le charismatique leader de l’extrême droite brésilienne a été l’un des députés les mieux élus au Congrès brésilien lors des dernières élections d’octobre 2014. Avec 464 572 voix de préférence, soit le quatrième meilleur score et un résultat quatre fois plus élevé qu’aux élections de 2010, il se situe juste devant son fidèle allié, le pasteur néopentecôtiste homophobe, Marco Feliciano, qui avait déclaré lui que le meurtre de John Lennon était un châtiment divin (Veja, 2013) ! Bénéficiant de la popularité de leur père, les trois fils Bolsonaro ont eux aussi été confortablement élus dans diverses assemblées (Oualalou, 2014). Le petit dernier, Eduardo, qui siège aux côtés de son père au Congrès – mais dans le parti de Feliciano - s’était fait remarquer lors d’une manifestation anti-Dilma l’action de la police militaire, un revolver clairement visible à la ceinture (El País Brasil, novembre 2014).
Mais cette parole ouvertement xénophobe est tantôt enfouie dans tantôt tempéré par d’autres discours censés captiver davantage les publics urbains jeunes et éduqués, voire même ceux de gauche pour les convertir à la bonne parole libérale. Comme l’expliquait doctement aux jeunes activistes de l’Université pontificale du Rio Grande do Sul, rassemblés à l’occasion du Forum des libertés – grande messe néolibérale sponsorisée par des entreprises aussi diverses que Ipiranga, RBS, Souza Cruz et PWC – , l’une des figures de proue de cette nouvelle droite au Guatemala, le militant devait faire preuve de pédagogie pour convaincre ses adversaires, pour séduire la gauche. Et de rajouter : « Un gauchiste, intellectuellement honnête, doit reconnaître que l’unique porte de sortie est l’emploi et les militants de cette droite du 21e siècle, qui s’est déjà modernisée, doivent reconnaître que la sexualité, la morale ou les drogues sont des problèmes qui appartiennent à chacun, elle n’est pas une autorité morale. (…) Il y a une vérité que tous les êtres humains doivent intégrer pour être en paix et cesser de vivre dans l’hypocrisie. Tous autant que nous sommes, nous les 7 milliards et demi d’êtres humains qui vivent sur cette planète, sommes égoïstes. Voilà la vérité, mes chers amis du Brésil, nous sommes tous égoïstes. Est-ce une bonne chose ? Est-ce mauvais ? Non, c’est tout simplement la réalité » (cité in Amaral, 2015).
Polarisation asymétrique
Depuis les élections d’octobre 2014, le Brésil est davantage polarisé et l’action du gouvernement davantage entravée, avec un Congrès plus morcelé et réactionnaire que jamais, dans lequel les lobbies parlementaires (« bancadas ») conservateurs ont tous renforcé leur présence : bancada évangéliste, bancada ruraliste regroupant les grands propriétaires terriens et/ou les députés qui leur sont favorables et bancada da bala (littéralement « de la balle ») favorable à la vente libre des armes à feu. En proie déjà à une grave crise politique, le gouvernement doit cohabiter jusqu’au prochaine avec un Parlement fédéral qui n’a sans doute jamais été aussi marqué à droite depuis cinquante ans, hormis bien sûr la longue période de dictature militaire (Oualalou, 2014). Autant dire, dans ces conditions, que toute réforme politique – en particulier celle du parlement fédéral – réclamée pourtant par de nombreux manifestants durant les Journées de juin, et promises par Dilma Rousseff, est morte et enterrée. Enterrés eux aussi, ou sérieusement remis en question, les projets les plus progressistes du gouvernement. Remanié aux dépens de ses composantes les plus ancrées à gauche, le gouvernement a d’ailleurs lui-même donné un sérieux coup de barre à droite.
C’est sans doute là l’une des leçons à tirer des mobilisations de juin 2013, mais aussi leur principal paradoxe. L’effet pervers auquel ceux qui en ont été les instigateurs, en particulier les membres du Movimento Passe Livre, ne s’attendaient pas, en dépit des quelques rares mises en garde (Sader, 2013). Comme le soulignent en effet plusieurs commentateurs de la vie politique brésilienne, en se transformant peu à peu en un assaut contre le gouvernement et les partis au pouvoir, ces mobilisations qui se voulaient au départ progressistes ont ouvert une sorte de boîte de pandore, scellée depuis l’arrivée à la présidence du candidat Lula, et libéré les forces les plus ataviques et les plus réactionnaires du pays. Massivement mobilisés, les protestataires ont créé une dangereuse brèche dans le consensus politique instauré par la gauche brésilienne au prix d’importants renoncements, brèche dans laquelle ces forces n’ont pas tardé à s’engouffrer. En ternissant l’image du PT et affaiblissant le gouvernement, ces protestations ont d’une certaine manière fait le jeu – involontairement il est vrai – de cette droite décomplexée qui jusque-là demeurait isolée, politiquement inexistante, du moins dans sa forme organisée, et pratiquement inaudible, comme s’en alarmait encore en 2011 le très conservateur et populaire hebdomadaire Veja (O caso incrivel de um país sem direita, 3 juin).
Incapables jusqu’ici de trouver une expression commune et forte, dans un champ politique dominé par la bipolarisation PT-PSDB, les composantes les plus radicales de cette droite ont très vite pris conscience du profit qu’elles pouvaient tirer de ces mobilisations. Les principaux protagonistes de cette nouvelle droite en ont profité pour se rapprocher, se réorganiser, s’unir en dépit de leurs divergences, descendre main dans la main dans la rue et recruter très largement, en exploitant la lassitude des classes moyennes vis-à-vis de la corruption, des trop nombreux dysfonctionnements des services publics, les taux d’imposition, de la criminalité endémique et des jeux politiciens. Et, aujourd’hui, comme le Tea Party états-unien, cette nouvelle droite ultraradicale est capable de mobiliser dans la rue plusieurs dizaines de milliers de personnes dans la rue, près de 2 millions d’après certaines estimations le 15 mars 2015. Du jamais vu au Brésil pour un mouvement réactionnaire depuis les rassemblements des grands propriétaires terriens liés à l’UDR (União democrática ruralista) avant le vote de la Constitution de 1988 (Payne 2000 ; Revista Forum, 21 décembre 2014). Et, comme le Tea Party aux États-Unis, enfin, cette nouvelle droite militante tend à privilégier une stratégie d’opposition asymétrique au débat démocratique.
« La droite nord-américaine, explique ainsi Paulo Arantes, n’est pas intéressée par la formation d’une majorité gouvernementale. Ce qui l’intéresse, c’est d’empêcher que les gouvernements gouvernent. Elle ne désire pas vraiment élaborer de politiques dans le cadre législatif et ignore le vote de l’électeur moyen. Elle n’a pas besoin de voix parce qu’elle est directement financée par les grandes entreprises (... ») . Voilà pourquoi ses partisans peuvent « se donner le luxe de prendre des positions à la fois très claires et non négociables (....) rendant impossible toute modification du statu quo ». Des prises de positions radicales que la gauche au pouvoir ne peut de son côté pas se permettre, précisément parce qu’elle doit, elle, « gouverner, constituer des majorités, négocier et emballer le tout”. Aux États-Unis, ajoute-t-il encore, « les démocrates et les ‘libéraux’ (liberals au sens anglo-saxon) se caractérisent par une certaine modération, tout comme la gauche officielle au Brésil qui est modérée, tandis que de l’autre côté c’est l’absence de modération qui prévaut. De là, le fait que cette polarisation soit asymétrique” (Folha de São Paulo, 31 octobre 2014).
La parole libérée et décomplexée est caractéristique de l’absence de modération de cette droite. Dans ses interventions politiques et ses actes publics, il s’agit avant tout d’attaquer, de blesser, de discréditer, de délégitimer, d’offenser, de discriminer et d’exclure. Tous ses projets, toutes ses propositions, s’inscrivent délibérément en dehors ou à la marge du « politiquement acceptable », sur le plan de l’éthique, un phénomène qui, soit dit en passant, renvoie au problème plus général – observé ailleurs également – d’estompement des normes et des seuils de tolérance démocratique coulés dans le droit international et la législation nationale. En témoigne notamment la banalisation de la rhétorique « golpiste » par ces nouveaux protestataires capables aujourd’hui de mobiliser en masse (de Souza, 2014). Passée maître dans l’art de cultiver les préjugés, la rumeur et la calomnie, prenant le « peuple » à témoin dans les procès publics qu’elle intente constamment à ses adversaires, ignorant toute forme de compromis démocratique, elle ne brigue pas vraiment le pouvoir, mais cherche surtout à entraver son action.
Certes, cette droite radicale demeure minoritaire politiquement n’ayant que quelques représentants au Congrès. Mais, elle peut désormais compter sur l’appui ponctuel et négocié de certains partis et formations, d’autres députés, acquis à l’une ou l’autre de ses causes, dans un parlement toujours plus morcelé, dominé par les groupes de pression conservateurs déterminés à mettre des bâtons dans les roues du gouvernement. Comme la montrer ses mobilisations en faveur de l’impeachment, elle ne se prive donc pas de mobiliser ces alliés de circonstance pour attaquer le gouvernement et ne se privera à l’avenir de saboter tout projet qui ne cadre pas avec sa lecture ultra-réactionnaire du monde. Elle continuera ainsi à obliger les partis de gouvernement à se livrer à d’interminables et, souvent, douteux marchandages avec l’opposition, ce qui renforcera à son tour le discrédit de la classe politique dans son ensemble.
En pleine croissance, cette droite trouve aussi dans les médias de précieux alliés. Jouissant dans ces espaces d’une résonance inversement proportionnelle à son poids électoral, elle bénéficie aussi de la sympathie, plus ou moins appuyée, plus ou moins explicite, d’intellectuels de plateaux, invités permanents qui se font les chantres de cette « nouvelle pensée de droite » décomplexée, comme les philosophes et écrivains Denis Lerrer Rosenfield et Luiz Felipe Pondé, le sociologue Demétrio Magnoli, le journaliste politique Reinaldo Azevedo, l’économiste et éditorialiste de Vejá Rodrigo Constantino ou encore l’historien Marco Antonio Villa (Vision Brésil, mai 2012). Alimenté également par les « experts » de l’Institut Millenium, un réseau de think tanks ultralibéraux et néoconservateurs, proches des figures de proue du mouvement, ce paysage médiatique très marqué à droite et dominé par quelques grands groupes médiatiques, offre maintenant une tribune inespérée à cette mouvance qui sait tirer profit de cette formidable caisse de résonance (Solnik, 2012 ; Campos Mello 2014).
Reste que cette vague droitière est révélatrice aussi d’une réceptivité plus grande de la société brésilienne aux thèses néoconservatrices, sécuritaires et anti-pétistes, tout comme elle est symptomatique d’un essoufflement du lulisme et d’une chute de confiance vis-à-vis du gouvernement, empêtré dans une seconde affaire de corruption, contrainte au compromis et à la modération politiques, ne parvenant plus à proposer un vrai projet mobilisateur et devenu de plus en plus sourds aux demandes des classes moyennes fragilisées dans un contexte économique morose. Pour le PT et la gauche en général, moins bien représentée au Congrès depuis les dernières élections (le PT a perdu près de 17 députés), cette montée en puissance de la droite est indiscutablement annonciatrice de grandes difficultés à venir. Tandis que certains pointent déjà le risque d’une « venezualização » de la vie politique brésilienne, la gauche sociale tente d’organiser vaille que vaille la riposte. Mais peut-être est-il déjà trop tard !
- Laurent Delcourt est sociologue et historien, chargé d’étude au CETRI.
Notes
[1] Annonciatrices du coup d’État militaire du 31 mars 1964, des « Marches de la Famille avec Dieu pour la liberté » ont été organisées entre le 19 juin et le 8 mars. Mobilisant des milliers de personnes, issues principalement des classes moyennes urbaines des villes du Sud du pays, elles s’opposaient aux réformes progressistes du gouvernement de João Goulart (1961-1964), dénonçant une prétendue mainmise communiste sur le pays.
[2] Programme de transfert conditionnel de revenu à destination des familles les plus pauvres du pays mis en place et élargi par le premier gouvernement Lula (2003-2006). Il bénéficie aujourd’hui à près de 14 millions de familles
[3] Le Parti Socialisme et Liberté (PSOL) est une dissidence du PT. Avec les trotskystes du Parti socialiste des travailleurs unifiés (PSTU), il représente au Brésil la gauche radicale. Lié officiellement à aucun parti, le Mouvement des travailleurs ruraux sans terre (MST) est quant à lui considéré comme le plus grand mouvement paysan d’Amérique latine.
[4] Créé durant le Forum social mondial de Porto Alegre de 2005 par des activistes de São Paulo, le Movimento Passe Livre lutte pour la gratuité des transports publics, qu’il considère comme un « droit à la ville ». Il est à l’initiative des premières mobilisations de juin 2013
[5] Décédé en 1997, Enéas Carneiro était le fondateur et la figure de proue du Prona (Partido da Reedificação da Ordem Nacional – Parti de la réédification de l’ordre national) aujourd’hui disparu. Classé à l’extrême droite, ce cardiologue fut longtemps le député fédéral le mieux élu au Congrès.
[6] Connu par son slogan (Cansei !), le Mouvement civique pour les droits des Brésiliens est né peu après le crash du vol 3054 de la TAM en juillet 2007, à l’initiative de quelques personnalités des mondes médiatique, sportif et politique. Qualifié d’élitiste par ses détracteurs, ce mouvement entendait initialement dénoncer les supposés « désordres » de l’administration Lula et l’affaire dite du Mensalão qui a éclaboussé le PT quelques années plus tôt.
[7] El País Brasil
[8] Fondée au début des années 1930 par Plínio Salgado, l’Action intégraliste brésilienne était un mouvement de masse qui comptera près d’un million de membres et sympathisants jusqu’à son interdiction en 1937 par Getúlio Vargas. Ses sources d’inspiration étaient le fascisme mussolinien, le salazarisme portugais, le franquisme espagnol, la doctrine sociale de l’Église, l’Action française de Mauras et le courant moderniste brésilien. Vêtus d’un uniforme et portant un brassard frappé du sigma grec, ses adeptes dénonçaient le capitalisme, revendiquaient un État fort, corporatiste et centralisé ; et valorisaient, contrairement à leur alter ego européen, la miscégénation, défendant une identité brésilienne unique fondée sur la fusion de trois races (blanche, noire et indienne). En 2004, s’est tenu à São Paulo un premier congrès néo-intégraliste réunissant les deux mouvements qui s’en réclament, le Frente Integralista Brasileira (FIB) et le Movimento Integralista e Linearista Brasileiro (MIL-B). Mais la fusion n’a pas abouti en raison de dissensions internes et de visions idéologiques franchement différentes (Nogueria, 2013)
[9] Les propos de Julian Torres, directeur exécutif de Estudiantes pela Liberdate (EPL), donnent de nombreux éclaircissements sur les origines du MPL et sa liaison avec EPL : « Quand eurent lieu les protestations de 2013 pour le Passe Livre, plusieurs membres d’Estudiantes pela Liberdade voulaient être de la partie. Mais comme nous recevions de l’argent de diverses organisations, comme Atlas et Students for Liberty, nous ne pouvions pas développer des activités politiques pour une question d’impôt sur les revenus. On nous a dit ceci : Les membres de EPL peuvent participer à titre individuel mais non en tant que représentants d’une organisation pour éviter les problèmes. Nous nous sommes alors résolus à créer une marque. Ce n’était pas une organisation, mais bien une marque derrière laquelle ils pouvaient se vendre en tant que Movimento Brasil Livre. Alors, (…), nous avons créé un logo et lancé une campagne sur Facebook. Et cela a débouché sur des manifestations, sur un projet (…). Puis nous avons rencontré Kim [Kataguiri] et Renan [Haas], lesquels ont donné une incroyable impulsion au mouvement en organisant des marches contre Dilma. Kim lui aussi est membre du EPL » (cité in Amaral, 2015).
[10] Sur la page Facebook de l’organisation un photomontage représente Lula menottes au point entouré de deux policiers de la cellule opérationnelle de la police fédéral de Curitiba, dont le chef de cette même cellule, Newton Ishii, chef de devenu une véritable star au Brésil pour son enquête à propos des affaires de corruptions et ses arrestations spectaculaire. Le texte qui apparaît sur la même page se passe de commentaire : « Et là-bas, crapaud barbu ! Tu vas tomber par la faute de ton arrogance, ton omnipotence, ta bêtise et la vanité de tes prêches d’alcoolo…Lave ta bouche immonde avant de prononcer le nom de Jésus Christ ! ». (consulté le 17 février 2016).
[11] Une étude réalisée en juin 2013 pour le journal Globo donne les résultats suivant : 43 % des manifestants avaient moins de 24 ans, 20 % étaient âgés de 25 à 29 ans, 18 % de 30 à 39 % et 19 % avaient 440 ans ou plus. Quarante neufs % d’entre eux avaient commencé des études supérieures, et 43 % avaient achevé des études universitaires. Soixante-quinze % d’entre eux avaient un emploi. Trente pour cent avaient un revenu allant de 2 à 5 salaires minima ; 26 % de 5 à 10 salaires minima et 23 % un revenu de plus de 10 salaires. Par ordre décroissant les thèmes de mobilisation les plus souvent évoqués par les protestataires étaient les suivants : le système politique (65 %), les transports publics (54 %), la santé (37 %), les coûts de la Coupe du monde de football (31 %), l’éducation (30 %), la sécurité, la justice et la police (14%) (Cf. Fauré, 2015)
[12] Depuis longtemps déjà, la droite brésilienne s’est approprié cette référence. En 2013, la très médiatique représentante des grands propriétaires terriens et de l’agrobusiness, la sénatrice Katia Abreu, écrit ainsi dans un éditorial de la Folha de São Paulo : « Gramsci enseignait que le théâtre d’opérations de la révolution communiste n’était pas un champ de bataille (proprement dit), mais l’environnement culturel (...) il soutenait que l’homme nouveau, annoncé par Marx, émergerait non pas à l’issue d’une terreur révolutionnaire, mais d’une transformation des mentalités. Elle s’impose (la gauche) donc par l’infiltration et le contrôle par le parti des moyens de communication – journaux, cinéma, théâtres, éditeurs, etc. - et la destruction graduelle des valeurs chrétiennes au moyen d’une guerre psychologique (...). Inutile de dire que cette révolution est en marche actuellement au Brésil – et ça ne date pas d’hier ». Plus étonnant encore est l’utilisation par les plus jeunes adhérents de cette nouvelles droites de références foucaldiennes pour dénoncer la pseudo hégémonie de la gauche dans les universités et d’autres milieux (Voir Nogueira, 2013, Autunes, 2015).
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Source : Recherches Internationales
8 mars 2016
http://www.cetri.be/Un-Tea-Party-tropical-La-montee-en?lang=fr
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