Le déracinement, un des plus grands drames que révèlent les migrations d’aujourd’hui

17/12/2015
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Célébrée le 18 décembre, chaque année, la Journée internationale des migrants est l’occasion de dissiper les préjugés et de sensibiliser l’opinion à leurs contributions dans les domaines économique, culturel et social, au profit tant de leur pays d’origine que de leur pays de destination.

 

La Journée des migrants a été proclamée par l’Assemblée générale le 4 décembre 2000 (résolution A/RES/55/93). Elle commémore l’adoption de la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille.

 

Alors que les problèmes liés à la guerre, aux désastres environnementaux, au changement climatique, aux effets délétères du développement, sont considérés comme « mondiaux » et dont la solution exige une approche « mondiale » de la part de tous les États, tel n’est pas le cas pour les migrations, en dépit des efforts de l’Organisation des Nations Unies (Onu), de l’Organisation internationale pour les Migrations (Oim) et d’autres organismes internationaux, observe l’agence en ligne AlterPresse.

 

Aucun État ne veut céder sa souveraineté sur l’entrée et la permanence des étrangères et étrangers sur son territoire, sans tenir compte de la forte interdépendance existant entre les pays à tous les niveaux et du caractère, de plus en plus commun et inextricable, du destin de l’humanité.

 

Pourtant, les migrations sont transversales aux grands problèmes « mondiaux », dont ceux susmentionnés, dans la mesure où elles en sont la conséquence directe. [1]

 

En temps de guerre, les personnes meurent sur place ou sont forcées à se déplacer, loin des territoires en conflits. Elles n’ont pas d’autres alternatives.

 

Le cas de la Syrie est symptomatique de l’ « exode » forcé de millions de Syriennes et de Syriens vers les pays limitrophes, tels que la Turquie, le Liban, la Jordanie et l’Irak, et vers les pays de l’Union européenne (Ue).

 

Les désastres environnementaux, dus aux tremblements de terre, aux éruptions volcaniques, aux phénomènes hydrométéorologiques ou aux effets du changement climatique, provoquent également des migrations massives des habitants, confrontés à ces drames humains.

 

Le cas d’Haïti, frappé par le séisme meurtrier du 12 janvier 2010, met sous les projecteurs la vulnérabilité aux mains des trafiquants, le manque de protection juridique, les difficultés d’intégration, auxquels sont victimes les migrantes et migrants haïtiens, dont la majorité sont des jeunes, ayant « choisi » de se réfugier dans des pays latino-américains, par exemple, en quête d’un futur moins sombre.

 

Le Brésil, qui constitue l’exception dans la région, en régularisant massivement les migrantes et migrants haïtiens en situation irrégulière, déçoit ces derniers, en raison du manque d’emplois, d’un salaire peu attractif et d’une société en proie au racisme, pour des motifs liés à la couleur et à la condition économique du pays d’origine des Haïtiennes et Haïtiens.

 

La présence des migrantes et migrants haïtiens en Amérique Latine met à nu le racisme, hérité de l’époque coloniale, qui survit encore dans bon nombre de sociétés de la région.

 

En outre, le poids de l’héritage séculaire colonial explique, en grande partie, l’actuel appauvrissement des anciennes colonies, surtout caribéennes et africaines, et les migrations de leurs citoyennes et citoyens vers la « forteresse » européenne, de plus en plus blindée à tous les points frontaliers.

 

Érythréens, Nigérians et Somaliens frappent aux portes de l’Union européenne (les anciennes métropoles).

 

La « charité » de quelques pays de l’Occident, sous l’œil « désapprobateur » de bon nombre de leurs citoyennes et citoyens, a permis l’accueil, quoique limité, de quelques « exilés » de la guerre et de la misère.

 

Ces nouveaux exilés, dans presque tous les continents, ont perdu leur foyer ; ils emportent avec eux, comme seul bagage, le spectre d’une langue, d’une culture et d’un monde à jamais disparu.

 

Des spécialistes en migration, comme Saskia Sassen (sociologue et économiste néerlando-américaine, spécialiste de la mondialisation et de la sociologie des très grandes villes du monde), dans une entrevue récemment donnée à des médias européens [2], parlent d’ « un nouvel ensemble de migrations », dont « les causes ne sont pas tant la recherche d’une vie meilleure, que des conflits assassins, des guerres.., la destruction de leurs habitats par la contamination de la terre et de l’eau, les sécheresses, la désertification, le resurgissement des activités minières, en vue d’obtenir les métaux dont notre révolution électronique a besoin ».

 

Il résulte, de cette situation complexe, que « des familles et des communautés sont en train d’être expulsées de leur territoire d’origine ; il reste de moins en moins de ‘foyers’ où retourner », conclut la sociologue hollandaise.

 

Les migrantes et migrants d’aujourd’hui sont donc des déracinés : ils sont en quête (pas seulement) de bien-être pour eux et pour leurs parents (à l’instar des migrants économiques ou volontaires), ou pour sauver leur vie et celles de leurs familles (comme les réfugiés) ; ils ont aussi besoin d’un foyer, d’un monde, d’une terre où habiter et où plonger leurs nouvelles racines.

 

Le déracinement est peut-être le plus grand défi de l’actuelle mondialisation hégémonique, sérieusement mise en question par les flux migratoires ayant eu lieu au cours de cette année 2015.

 

Les migrations signalent un monde qui marche à double vitesse : d’une part, il catapulte le développement économique, la révolution technologique, le marché global (où circulent librement des biens, des capitaux, de l’information), le discours des droits humains et de la démocratie ; d’autre part, il provoque, pour les mêmes raisons, l’appauvrissement et l’exploitation outrancière d’une région du monde par une autre, la déprédation de la nature, l’élimination de tout ce qui n’est pas utile au capital et n’est pas « marchandisable », etc.

 

Les migrations mettent à nu le fonctionnement cynique d’une certaine mondialisation, qui fragmente l’humanité et qui rabaisse l’humain au rang de moyen utilisé pour une fin autre que l’humain lui-même. La mondialisation néolibérale, au détriment de la mondialisation humaine et hospitalière !

 

Le drame des migrantes et migrants dans le monde est celui d’une humanité déraillée, d’une mondialisation « excluante » et d’un système global qui déracine les majorités pauvres de leurs foyers en les éjectant vers des « non-lieux ». Enfin, un monde qui les exclut de son sein et les oblige à errer sans cesse, en quête d’hospitalité, jusqu’à ce que mort s’ensuive dans la Méditerranée, à la frontière étasunienne avec le Mexique, dans la Mer des Caraïbes, etc.!

 

Le déracinement, voilà l’un des plus grands drames que révèlent les migrations d’aujourd’hui, de manière éloquente ! [wel rc apr 17/12/2015 0:00]

 

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[1] Depuis la nuit des temps, la migration a été pour l’individu une manière courageuse de manifester sa volonté de surmonter l’adversité et d’avoir une vie meilleure.

 

Aujourd’hui, en raison de la mondialisation et des progrès des communications et des transports, le nombre de personnes qui désirent s’installer dans d’autres régions et qui en ont les moyens a considérablement augmenté.

 

Cette nouvelle ère est porteuse aussi bien de défis et d’opportunités pour les sociétés du monde entier. Elle met aussi en relief la corrélation manifeste entre les migrations et le développement, de même que les possibilités que la migration offre pour le co-développement, c’est-à-dire les possibilités d’amélioration concertée des conditions économiques et sociales aussi bien dans les régions d’origine que dans celles de destination. // http://www.un.org/fr/events/migrantsday/

 

[2] http://www.eldiario.es/canariasahora/sociedad/Saskia_Sassen-inmigracion-flujos-perdida-habitat_0_443756541.html

 

http://www.alterpresse.org/spip.php?article19386#.VnMbak9lGyc

https://www.alainet.org/fr/articulo/174326?language=es
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