Premier anniversaire de la mort par asphyxie de 25 migrants haïtiens en territoire dominicain
11/01/2007
- Opinión
« Chèche lavi detwi lavi », Proverbe haïtien
(Traduction en français : « En cherchant la vie, on court le risque de la perdrebeaucoup de risques. »)
P-au-P.- AlterPresse.- Le 11 janvier 2006, 25 migrants haïtiens sont morts asphyxiés, alors qu’ils voyageaient clandestinement dans une fourgonnette à l’intérieur de la République Dominicaine.
Un an après, quels sont les défis à relever dans la lutte contre la criminalité binationale organisée (haïtiano- dominicaine), notamment le trafic illégal des migrants et la traite des êtres humains ?
Les antécédents et les suites de la tragédie
Le voyage clandestin ayant occasionné la tragédie du 11 janvier 2006 a été organisé par des trafiquants haïtiens et dominicains au nord de la frontière haitiano- dominicaine (Ouanaminthe-Dajabón). À partir de ce point frontalier, un total de 69 « sans-papiers » haïtiens ont été embarqués dans une fourgonnette hermétiquement fermée.
En dépit de l’insistance de ces migrants qui frappaient désespérément l’arrière de la fourgonnette quand ils commençaient à manquer d’oxygène, le chauffeur n’a pas arrêté le véhicule. Quand enfin celui-ci a été détenu à Navarette, commune de la province de Santiago située dans la zone du Cibao, 24 passagers avaient déjà rendu l’âme. Un autre n’a pas tardé à pousser le dernier soupir dans un Hôpital à Santiago, la deuxième ville de la République Dominicaine.
Au lendemain de la tragédie, 12 janvier 2006, le gouvernement dominicain a décidé d’enterrer les restes des 24 migrants haïtiens à Ouanaminthe. De commun accord avec le gouvernement provisoire du président Boniface Alexandre et du premier ministre Gérard Latortue, les autorités dominicaines ont dépêché vers le cimetière de cette ville frontalière haïtienne un camion contenant les cadavres des 24 « sans-papiers » et fortement escorté par des casques bleus de la Mission des Nations Unies pour la Stabilisation d’Haïti (MINUSTAH).
Barrière principale du cimetière de Ouanaminthe, à laquelle l’accès du camion transportant les cadavres des 24 migrants haïtiens fut interdit par des manifestants.
La population de Ouanaminthe s’est vivement opposée à ce que les dépouilles de leurs compatriotes soient inhumées dans ces conditions jugées par elle « irrespectueuses et inacceptables ». Organisations de droits humains, associations communautaires, églises (catholique et protestantes), écoliers, étudiants, commerçants, citoyens et citoyennes, ont manifesté devant la barrière principale du cimetière dans le but d’y interdire l’accès du camion.
Les manifestants ont demandé aux deux gouvernements de respecter la dignité humaine de ces 24 citoyens haïtiens, qui furent durement torturés et dont les restes ne devaient pas être basculés dans une fosse commune, ont-ils signalé. Ils ont aussi exigé qu’une enquête sérieuse soit menée par les autorités des deux pays pour arrêter, juger et punir les auteurs haïtiens et dominicains de cette tragédie, dont des passeurs (communément appelés « buscones » en Espagnol et « boukonn » en Créole), des militaires, des agents de migration et autres autorités dominicaines impliqués dans les réseaux de trafiquants.
Au cours de la protestation, un affrontement s’est produit entre les manifestants et les casques bleus, faisant un mort, un jeune de 17 ans du nom de Chrismane Pierre, et plusieurs autres victimes au sein de la population civile ouanaminthaise. La résistance opposée par celle-ci a contraint le chauffeur qui conduisait le camion rempli de cadavres ainsi que les autorités locales haïtiennes et les forces de l’ordre (policiers et casques bleus) à rebrousser chemin. Les autorités dominicaines ont fini par inhumer les cadavres des 24 migrants haïtiens dans une fosse commune à l’intérieur d’un cimetière proche de Dajabón.
La tragédie du 11 janvier 2006 a mis fin de manière dramatique à la vie de 25 migrants haïtiens qui pourtant « cherchaient la vie » et occasionné l’assassinat de Chrismane Pierre. Mais elle a aussi déclenché une lutte pour le respect de la dignité humaine.
Un an après la tragédie
Un an après la tragédie, où en est la lutte contre le trafic illégal des migrants ? Quels sont les résultats des examens des projectiles ayant assassiné Chrimane Pierre, examens conduits à l’étranger par des spécialistes en balistique ? Quel suivi la Justice haïtienne a-t-elle donné à cet homicide ?
Le premier anniversaire de la mort des 25 migrants haïtiens en République Dominicaine offre l’occasion de poser ces questions aux autorités des deux pays, notamment aux responsables des appareils judiciaires respectifs. Des citoyennes, citoyens et représentants des organisations et des institutions dans les deux sociétés, surtout les organismes de défense des droits humains, vont jusqu’à qualifier de « laxiste » l’attitude des deux gouvernements envers les réseaux de trafiquants opérant le long de la frontière haitiano- dominicaine.
La commémoration souligne une fois de plus la nécessité et l’obligation pour les deux Etats de s’entendre en vue de prendre des mesures énergiques contre la criminalité binationale organisée, notamment le trafic illégal des migrants et la traite des être humains. Dans ce contexte, la relance de la Commission Mixte Haitiano-dominicaine récemment annoncée par l’ambassadeur haïtien à Santo Domingo, Fritz Cinéas, est vue comme une priorité « binationale » afin que les deux Etats reprennent les négociations sur des thèmes bilatéraux et de coopération en général.
Le Parlement haïtien est également appelé de manière urgente à légiférer contre le trafic illégal des migrants et la traite des êtres humains, en prenant des dispositions destinées non seulement à punir les organisateurs des voyages irréguliers (traitants et trafiquants), comme le stipule le Décret du 17 novembre 1980 sur « les voyages irréguliers », mais aussi à prévenir ces deux problèmes, à protéger et à assister les victimes, spécialement les femmes et les enfants.
D’un autre côté, le gouvernement haïtien est de jour en jour confronté au défi de mettre en place des programmes, des politiques et des structures orientées à prévenir, ou tout au moins, à réduire l’émigration irrégulière de plus en plus massive de ses ressortissants, surtout les plus pauvres, vers la République Dominicaine.
Cette stratégie de prévention doit être susceptible d’offrir aux migrants réels et potentiels des alternatives concrètes, par exemple : des emplois, des services sociaux de base (santé, éducation, eau potable), des infrastructures (routes, électricités) et un climat stable et sécuritaire.
Source: AlterPresse
(Traduction en français : « En cherchant la vie, on court le risque de la perdrebeaucoup de risques. »)
P-au-P.- AlterPresse.- Le 11 janvier 2006, 25 migrants haïtiens sont morts asphyxiés, alors qu’ils voyageaient clandestinement dans une fourgonnette à l’intérieur de la République Dominicaine.
Un an après, quels sont les défis à relever dans la lutte contre la criminalité binationale organisée (haïtiano- dominicaine), notamment le trafic illégal des migrants et la traite des êtres humains ?
Les antécédents et les suites de la tragédie
Le voyage clandestin ayant occasionné la tragédie du 11 janvier 2006 a été organisé par des trafiquants haïtiens et dominicains au nord de la frontière haitiano- dominicaine (Ouanaminthe-Dajabón). À partir de ce point frontalier, un total de 69 « sans-papiers » haïtiens ont été embarqués dans une fourgonnette hermétiquement fermée.
En dépit de l’insistance de ces migrants qui frappaient désespérément l’arrière de la fourgonnette quand ils commençaient à manquer d’oxygène, le chauffeur n’a pas arrêté le véhicule. Quand enfin celui-ci a été détenu à Navarette, commune de la province de Santiago située dans la zone du Cibao, 24 passagers avaient déjà rendu l’âme. Un autre n’a pas tardé à pousser le dernier soupir dans un Hôpital à Santiago, la deuxième ville de la République Dominicaine.
Au lendemain de la tragédie, 12 janvier 2006, le gouvernement dominicain a décidé d’enterrer les restes des 24 migrants haïtiens à Ouanaminthe. De commun accord avec le gouvernement provisoire du président Boniface Alexandre et du premier ministre Gérard Latortue, les autorités dominicaines ont dépêché vers le cimetière de cette ville frontalière haïtienne un camion contenant les cadavres des 24 « sans-papiers » et fortement escorté par des casques bleus de la Mission des Nations Unies pour la Stabilisation d’Haïti (MINUSTAH).
Barrière principale du cimetière de Ouanaminthe, à laquelle l’accès du camion transportant les cadavres des 24 migrants haïtiens fut interdit par des manifestants.
La population de Ouanaminthe s’est vivement opposée à ce que les dépouilles de leurs compatriotes soient inhumées dans ces conditions jugées par elle « irrespectueuses et inacceptables ». Organisations de droits humains, associations communautaires, églises (catholique et protestantes), écoliers, étudiants, commerçants, citoyens et citoyennes, ont manifesté devant la barrière principale du cimetière dans le but d’y interdire l’accès du camion.
Les manifestants ont demandé aux deux gouvernements de respecter la dignité humaine de ces 24 citoyens haïtiens, qui furent durement torturés et dont les restes ne devaient pas être basculés dans une fosse commune, ont-ils signalé. Ils ont aussi exigé qu’une enquête sérieuse soit menée par les autorités des deux pays pour arrêter, juger et punir les auteurs haïtiens et dominicains de cette tragédie, dont des passeurs (communément appelés « buscones » en Espagnol et « boukonn » en Créole), des militaires, des agents de migration et autres autorités dominicaines impliqués dans les réseaux de trafiquants.
Au cours de la protestation, un affrontement s’est produit entre les manifestants et les casques bleus, faisant un mort, un jeune de 17 ans du nom de Chrismane Pierre, et plusieurs autres victimes au sein de la population civile ouanaminthaise. La résistance opposée par celle-ci a contraint le chauffeur qui conduisait le camion rempli de cadavres ainsi que les autorités locales haïtiennes et les forces de l’ordre (policiers et casques bleus) à rebrousser chemin. Les autorités dominicaines ont fini par inhumer les cadavres des 24 migrants haïtiens dans une fosse commune à l’intérieur d’un cimetière proche de Dajabón.
La tragédie du 11 janvier 2006 a mis fin de manière dramatique à la vie de 25 migrants haïtiens qui pourtant « cherchaient la vie » et occasionné l’assassinat de Chrismane Pierre. Mais elle a aussi déclenché une lutte pour le respect de la dignité humaine.
Un an après la tragédie
Un an après la tragédie, où en est la lutte contre le trafic illégal des migrants ? Quels sont les résultats des examens des projectiles ayant assassiné Chrimane Pierre, examens conduits à l’étranger par des spécialistes en balistique ? Quel suivi la Justice haïtienne a-t-elle donné à cet homicide ?
Le premier anniversaire de la mort des 25 migrants haïtiens en République Dominicaine offre l’occasion de poser ces questions aux autorités des deux pays, notamment aux responsables des appareils judiciaires respectifs. Des citoyennes, citoyens et représentants des organisations et des institutions dans les deux sociétés, surtout les organismes de défense des droits humains, vont jusqu’à qualifier de « laxiste » l’attitude des deux gouvernements envers les réseaux de trafiquants opérant le long de la frontière haitiano- dominicaine.
La commémoration souligne une fois de plus la nécessité et l’obligation pour les deux Etats de s’entendre en vue de prendre des mesures énergiques contre la criminalité binationale organisée, notamment le trafic illégal des migrants et la traite des être humains. Dans ce contexte, la relance de la Commission Mixte Haitiano-dominicaine récemment annoncée par l’ambassadeur haïtien à Santo Domingo, Fritz Cinéas, est vue comme une priorité « binationale » afin que les deux Etats reprennent les négociations sur des thèmes bilatéraux et de coopération en général.
Le Parlement haïtien est également appelé de manière urgente à légiférer contre le trafic illégal des migrants et la traite des êtres humains, en prenant des dispositions destinées non seulement à punir les organisateurs des voyages irréguliers (traitants et trafiquants), comme le stipule le Décret du 17 novembre 1980 sur « les voyages irréguliers », mais aussi à prévenir ces deux problèmes, à protéger et à assister les victimes, spécialement les femmes et les enfants.
D’un autre côté, le gouvernement haïtien est de jour en jour confronté au défi de mettre en place des programmes, des politiques et des structures orientées à prévenir, ou tout au moins, à réduire l’émigration irrégulière de plus en plus massive de ses ressortissants, surtout les plus pauvres, vers la République Dominicaine.
Cette stratégie de prévention doit être susceptible d’offrir aux migrants réels et potentiels des alternatives concrètes, par exemple : des emplois, des services sociaux de base (santé, éducation, eau potable), des infrastructures (routes, électricités) et un climat stable et sécuritaire.
Source: AlterPresse
https://www.alainet.org/fr/active/15870
Del mismo autor
- Haití y República Dominicana: disputas en torno a la historia común 06/12/2021
- Una foto simplemente vergonzosa 22/09/2021
- El terremoto de Haití y sus invisibilidades 16/08/2021
- Los rituales de la muerte en plena pandemia en América Latina y el Caribe 05/07/2021
- Notas para una reflexión identitaria sobre América latina y el Caribe 16/06/2021
- Lo político versus la política en América Latina y el Caribe 02/06/2021
- ¿Quiénes fabrican los problemas del mundo? 19/04/2021
- ¿Por qué oponerse a la construcción de un muro entre R. Dominicana y Haití? 25/03/2021
- Haití a 11 años del terremoto: Los cuerpos que murieron nos interrogan 12/01/2021
- Tres lecciones de vida para construir un mundo justo 22/12/2020