L’année de tous les dangers ou « la santé du malheur » ?

24/10/2010
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Un malheur dit-on n’arrive jamais seul. On s’accrochait dans l’attente angoissante des ravages de la saison cyclonique, lorsqu’en début de semaine, on apprit l’apparition dans nos contrées du Nord d’une maladie du fond des âges, le choléra.
 
C’est une maladie de la pauvreté, une plaie du sous-développement qui pourtant nous avait jusqu’ici épargnée. La faucheuse n’a pas finie d’endeuiller nos familles et semble s’impatienter devant notre refus obstiné de construire un espace national vivable et « potable », pour sortir du cliché de l’île misérable et ensorcelée qui nourrit les fantasmes exotiques de certains.
 
Le sursaut espéré après le 12 janvier n’a pas encore eu lieu. Une certaine mentalité magique est encore à chercher l’antéchrist responsable de tous nos malheurs. Le problème est que dans ce cas comme dans d’autres, une fois que l’on croit l’avoir trouvé et le vouer aux gémonies médiatiques, chacun peut reprendre sa petite vie faite de magouilles, de coup bas, de trahisons, de contrebandes, de manœuvres à courte vue, de victoires sans grandeur, ou de délire verbal, la chose du monde la mieux partagée dans le landerneau politico-médiatique.
 
La violence des catastrophes qui nous affectent n’a pas encore changé nos pratiques citoyennes. Un refus d’aller profondément dans les causes de notre vulnérabilité nous pousse à rechercher dans un discours facile et factice de vaines solutions. Bousculé par nos échéanciers formels, nous manquons de temps pour bien baliser les chemins de la refondation. Et comme il faut faire vite, l’on revient aux vieilles recettes qui ont donné les résultats que l’on sait.
 
Pour l’heure, la campagne électorale n’a pas encore changé la donne. Elle se déroule au passé et s’arrête d’un côté comme de l’autre à …2004. Il semble qu’il y a de ces horizons politiques qui nous sont indépassables : le Duvaliérisme et ou l’Aristidisme. Soit nous les ressassons à l’envi en jouant sur la veine émotionnelle des masses, soit nous les rejetons dans une sorte de mauvais exorcisme qui fait le nid des charlatans de toutes les idéologies. Il n’y a qu’à voir le nombre de candidats qui se battent pour endosser le manteau de l’ancien président Aristide et réclamer son onction même silencieuse. Il y a d’autres qui capitalisent sur des slogans au romantisme fané. Vous avez dit mentalité magique !
 
Il y a aussi ceux qui croient que le pouvoir leur revient comme s’il s’agissait d’une succession seigneuriale. Et qu’il n’ait pas trop besoin de vision et de programme. Comme quoi, il y a des manières déjà éprouvées de gagner les élections chez nous.
 
Une dernière catégorie attend la fin des élections pour commencer la prochaine crise ! Elle guette une catastrophe pour se refaire dans le malheur une santé politique.
 
Et pourtant, chez certains de ces citoyens qui ont le courage de s’engager, en dehors de l’ambition légitime de « diriger la tribu », il y a une volonté patriotique de changer ce pays. Il faut donc comme leaders qu’ils donnent gravement le ton et portent l’espérance de ce peuple qui a déjà fait preuve de sa résilience. Loin des sentiers battus de nos traditionnelles campagnes à la « boute nègre » ou « Rénélus Rorotte ».
 
Nous avons besoin de cette audace qui ose l’avenir. Nous avons besoin de leadership responsable et d’un sursaut national pour faire échec aux pestes émotionnelles et autres pandémies du sous-développement.
 
- Roody Edmé
Éducateur, éditorialiste
 
https://www.alainet.org/es/node/145165
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