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22/02/2007
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Il est curieux de voir comment cette île qui ne dispose pas plus de ressources économiques significatives qu'il ne représente d'intérêt stratégique attise tant de convoitises et déchaîne tant de passions. Mais Cuba bénéficie d'un patrimoine historique et d'une valeur symbolique inestimables : ce pays représente l'insoumission et la résistance pratique dans tous les pays du Tiers-Monde. Incapable de saper la Révolution cubaine dans ses fondements, ses adversaires visent à la déstabiliser par le biais de l'argument ad hominem. Il est en effet plus aisé de discréditer la personne qui défend des arguments plutôt que les arguments eux-mêmes.

Il est très intéressant d'observer que la perception de Fidel Castro des Sud-américains diverge totalement de celle des Européens. Pour les uns, c'est un personnage bienveillant et courageux tandis que pour les autres, c'est le dictateur type. Les pays occidentaux n'ont eu de cesse de lui lancer l'anathème depuis son accession au pouvoir. On laisse entendre que tous ceux qui menacent son pouvoir personnel sont au mieux embastillés et au pire assassinés : il aurait fait tuer Camilo Cienfuegos, un de ses plus proches compagnons d'arme, pour avoir remis en cause ses ordres ; il aurait lâché le Che en Bolivie en raison d'approches irréconciliables et fait exécuter Arnaldo Ochoa qui plaidait pour des réformes. Avance-t-on le moindre commencement de preuves pour étayer des accusations d'une telle importance ? Non, il faudra se contenter de rumeurs, suppositions ou conclusions hâtives. La cible est atteinte : il s'agit d'instiller le doute et d'écorner son image. Ce qui ne fait pas de doute par contre, ce sont les programmes d'assistance médicale (« Operación Milagro ») et d'instruction (« Misión Robinson ») que Cuba a développé dans le cadre d'une coopération Sud-Sud et de l'aide au développement. Cuba a envoyé dans les contrées les plus désœuvrées d'Amérique latine des médecins et des professeurs pour lutter contre les infections sociales et l'analphabétisme. Au seul Venezuela, ce sont plus de 20.000 travailleurs médicaux qui sont à pied d'œuvre. Il faut saluer au même titre l'aide significative que Cuba a apporté au Pakistan à l'occasion du séisme dévastateur. La presse dominante n'éprouve pas le moindre intérêt pour ces missions humanitaires à grande échelle que Cuba mène en Amérique latine, en Afrique ou en Asie.

Le traitement de l'information à l'endroit de Cuba se fait uniquement sous l'aune idéologique et la subjectivité des journalistes n'est en aucun cas assumée. La surexposition de la maladie de Fidel Castro est un cas emblématique de cette dérive informationnelle. Les medias institutionnels ont servi de porte-voix aux rumeurs les plus alarmantes sur son état de santé et se contentent de simples mentions de son rétablissement en cours.

Que reproche-t-on en définitive à Cuba ? Qu'est-ce qui justifie cette hystérie contre Fidel Castro ? On lui reproche de ne pas ouvrir les portes du pays à l'économie de marché ou autrement dit d'avoir commis un crime de lèse-capitalisme. Toutes les autres admonestations ne sont que des figures de rhétorique destinées à masquer le véritable enjeu. Dans l'ordre actuel, un pays qui souhaite choisir ses propres orientations économiques et sociales doit être prêt à affronter une implacable propagande noire. La stratégie des Etats-Unis a été définie dans le rapport de la Commission d'Assistance à une Cuba Libre destiné à soutenir une « transition » rapide et pacifique vers la « démocratie ». Lorsqu'on le parle de transition ou de démocratie, on fait référence en fait à une restauration de l'ordre capitaliste. Ces ambitions ne sont même plus dissimulées : « le gouvernement des Etats-Unis, fort de son expérience dans les transitions d'autres économies non libérales, se tiendra prêt à encourager une Cuba libre à supprimer à court terme le contrôle des prix, y compris le prix de l'énergie … à offrir une assistance à une Cuba libre pour l'aider à la mise en oeuvre d'un programme efficace de privatisation ainsi qu'à préparer les entreprises à la privatisation, y compris les entreprises contrôlées ou gérées par les Forces Armées Cubaines ». Pour ces opérations de subversion, un budget de 80 millions de dollar a été alloué pour les années 2007-2008 et se réparti entre la création d'une opposition interne, le sabotage des ressources économiques du pays, la diffusion de programmes télévisuels et de radio depuis des émetteurs aériens, le soutien aux ONG qui secondent fort opportunément la critique contre l'île,…

Alors que les Etats-Unis mènent une guerre des mots pour imposer ses intérêts, Cuba livre la bataille des idées pour préserver ses valeurs. Alors que les Etats-Unis déploient leurs soldats aux quatre points cardinaux du globe, Cuba envoie des bataillons de médecins en aide aux plus démunis. Et pourtant…
https://www.alainet.org/es/node/119349

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