Investissements trop faibles pour favoriser la croissance économique

16/06/2015
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Les investissements prévus dans le budget rectificatif 2014-2015 seraient insuffisants pour favoriser la croissance économique et la creation d’emplois durables en Haiti, analysent des experts haïtiens, environ 3 mois après la promulgation de la loi des finances modifiée.

 

Depuis plus de 20 ans, le budget national n’a jamais fait avancer économiquement le pays en raison du fait que les fonds d’investissements proviennent en grande partie de l’aide internationale, explique l’économiste et professeur d’Université, Eddy Labossière, dans une interview accordée à AlterPresse.

 

Dans un contexte marqué par une forte décote de la gourde, Labossière indique que plus de 60 % des fonds de ce budget sont pris en charge par la coopération internationale. Le plus souvent, beaucoup de ces montants ne sont pas décaissés.

 

Dans le budget rectificatif 2014-2015, les investissements ont chuté de 16.5 % alors qu’une légère modification a été apportée aux dépenses de fonctionnement à moins de 3 %.

 

« En Haïti, le budget n’a jamais été utilisé comme un véritable outil de politique publique, mais comme un budget de fonctionnement », regrette Labossière pour qui « les résultats attendus vont être encore négatifs » après l’amputation du budget de 10% des fonds attendus suite à sa révision.

 

Passant de 122. 6 milliards de gourdes à 109. 7 milliards de gourdes, l’enveloppe budgétaire a connu une variation de 10. 7 % de moins, soit une réduction de 12, 9 milliards de gourdes par rapport au budget initial.

 

Le taux de croissance réelle de l’économie, évalué à 4, 6% dans le budget initial est revu à la baisse, soit à 2, 5% dans le budget rectificatif 2014-2015.

 

Le budget de l’exercice 2013-2014 était de 118 milliards de gourdes.

 

La réduction actuelle de l’enveloppe budgétaire résulte de la baisse des ressources provenant des fonds Petro Caribe, la réalisation des prochaines élections durant l’année 2015 pour les collectivités locales, les 119 députes et les deux tiers du sénat de la République, a expliqué le gouvernement.

 

Depuis le 12 janvier 2015, le parlement haïtien est dysfonctionnel. Seulement dix sénateurs sont restés en fonction.

 

Ce parlement est « budgétivore », reconnait Eddy Labossière rappelant que les dépenses mensuelles pour un sénateur s’élèvent à 14 mille dollars américains et pour un député à 12 mille dollars.

 

Le budget révisé, priorités et doutes exprimés

 

Adopté en conseil des ministres le 18 mars 2015, le budget rectificatif (2014-2015) a été promulgué dans le journal officiel Le Moniteur du vendredi 27 mars 2015, sans passer par le parlement.

 

La promotion de la croissance, de l’emploi, du développement des Petites moyennes entreprises (Pme) constituent, entre autres, les grandes orientations et priorités du gouvernement dans ce budget révisé.

 

Ce budget ne va rien changer aux conditions de travail des ouvriers et ouvrières, qui demeurent « très graves », déplore Reginald Jules, membre de la direction du syndicat « Antèn ouvriye » (Antenne ouvrière).

 

« Le traitement salarial et physique des ouvriers est inhumain. A chaque forme de protestation ouvrière pour exiger de meilleures conditions de traitement, les patrons augmentent leurs travaux en guise de sanctions », dénonce le syndicaliste.

 

Il souligne la nécessité d’un accompagnement en santé ainsi qu’un ajustement salarial pour les travailleurs haïtiens à cause de l’augmentation du coût de la vie.

 

Il faut, à présent, plus de 50 gourdes pour un dollar américain alors que ce taux de change était de 47 gourdes en décembre 2014.

 

Insuffisance d’investissements et impacts des politiques néolibérales

 

Les faibles ressources investies par l’Etat ne sont pas capables de permettre la création d’emplois durables, estime l’économiste Camille Chalmers et également directeur exécutif de la Plateforme haïtienne de plaidoyer pour un développement alternatif (Papda) qui dit observer un ralentissement des activités économiques.

 

Le gouvernement haïtien a préféré opter pour une application des politiques néolibérales qui ont causé du tort au pays depuis plusieurs années, fustige-t-il.

 

Les dirigeants haïtiens ont parié sur les secteurs externes et non locaux, l’interventionnisme en économie et la sous-traitante, incapables, dit-il, de conduire à une croissance économique durable.

 

Les conditions ne sont pas réunies pour attirer de bons investissements privés, déplore Chalmers appelant le gouvernement à miser, de préférence, sur l’épargne nationale et réduire la dépendance économique par rapport à l’extérieur sur le plan alimentaire.

 

L’économiste plaide pour une réorientation des liquidités vers des investissements productifs dans l’agriculture et l’industrie.

 

Ceci contribuerait, selon lui, à créer beaucoup plus d’emplois dans une perspective de rompre avec la déprime et le désespoir de la plupart des jeunes condamnés au chômage.

 

16 juin 2015

http://www.alterpresse.org/spip.php?article18340#.VYgw21J1yyc

https://www.alainet.org/es/node/170561
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