Accros à la malbouffe

17/01/2013
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Que peut-il t’arriver si pendant un mois tu ne
manges que des Big Macs, des Cheese Burgers, des
milkshakes à la fraise et des Mc Nuggets ?
Réponse : onze kilos de plus, un foie hypertrofié,
des maux de tête, une dépression et une explosion
du taux de cholestérol. Telle est l’expérience
personnellement vécue par le réalisateur Morgan
Spurlock et qu’il raconte dans son film « Super
Size Me » (2004). Dans ce dernier, il relate les
conséquences d’un régime particulier où il prend
quotidiennement son petit-déjeuner, son dîner et
son souper chez Mc Donald's. Mais le problème du
fast-food n’est pas seulement qu’il nous rend
malade : il nous rend également accro à ce type de
nourriture.

« L’important ce n’est pas que tu viennes, c’est
que tu reviennes » énnonce le dernier slogan
publicitaire de Mc Donalds. On ne peut mieux le
dire. La malbouffe devient indispensable pour ceux
qui fréquentent ses établissements. Ainsi le
constate une recherche menée à bien par « The
Scripps Research Institute » des Etats-Unis et
publiée en 2010 dans la revue « Nature
Neuroscience ». Ses conclusions ne laissent planer
aucun doute : l’ingestion de malbouffe développe
dans le cerveau les mêmes mécanismes moléculaires
que ceux provoqués par l’addiction aux drogues. En
conséquence, consommer de la malbouffe nous rend
en dépendants. Nous devrions peut être suggérer
aux autorités sanitaires qu’elles alertent les
consommateurs sur le fait que manger chez Mc
Donalds, Kentucky Fried Chicken, Pizza Hut, Burger
King, Dunkin' Donuts... « nuis gravement à la santé ».

Mais il n’est pas nécessaire d’entrer dans un
établissement de restauration rapide pour
consommer des aliments de basse qualité. La
majeure partie de la nourriture que nous achetons
est élaborée avec de fortes doses d’additifs
chimiques de synthèse tels que des colorants, des
conservateurs, des antioxidants, des
épaississants, des stabilisateurs, des exhausteurs
de goût, des régulateurs d’acidité, des amidons
modifiés, etc. qui altèrent l’aliment en fonction
des intérêts de l’industrie. On parvient ainsi à
donner au produit une couleur plus attirante, une
apparence de fraîcheur ou une saveur intense.
L’objectif : en vendre le plus possible.

Quelles sont les conséquences pour notre santé ?
Plusieurs recherches soulignent l’impact négatif
qu’une consommation récurrente de certains de ces
additifs peut avoir dans l’apparition de maladies
telles que les allérgies, l’hyperactivité
infantile et les problèmes de surpoids qui n’ont
fait qu’augmenter ces dernières années. C’est ce
que confirmait une recherche réalisée par
l’Université de Southampton en 2007, à la demande
de l’Agence alimentaire britannique et publiée
dans « The Lancet », qui démontrait le lien entre
la consommation d’additifs par des enfants avec le
développement de l’hyperactivité. La solution
réside dans le remplacement de ces additifs
artificiels par d’autres naturels, mais ces
derniers sont plus chers et l’industrie
alimentaire les écarte. C’est l’argent qui commande.

La journaliste française Marie Monique Robin
l’analyse en détaille dans son dernier reportage
au titre sans ambiguité : « Notre poison
quotidien ». Elle y expose les conséquences sur
notre organisme d’une agriculture
rendue complètement dépendante des additifs
chimiques : augmentation de maladies comme le
cancer, stérilité, tumeurs cérébrales, parkinson…
résultat, entre autres choses, d’un modèle
agricole et alimentaire soumis aux intérêts du
capital. Comment comprendre autrement – comme le
souligne le film – qu’il soit, par exemple,
possible que l’industrie alimentaire continue
d’utiliser un édulcorant non calorique comme
l’aspartame dans les produits « light » sans sucre
alors que plusieurs expériences ont démontré que
la consommation continue de cette substance peut
être cancérigène ?

Certains diront que ces travaux, rapports et
recherches sont alarmistes et que tous les
additifs chimiques appliqués dans l’Union
européenne sont préalablement évalués par une
agence indépendante : l’Autorité européenne de
sécurité des aliments (EFSA). Il y a quelques
mois, l’organisation « Corporate European
Observatory » a publié un rapport qui souligne les
liens étroits entre l’EFSA et l’industrie
biotechnologique et agro-alimentaire, ainsi que la
dynamique de « vases-communicants » entre les
deux. Le conflit d’intérêt entre ceux qui
réglementent et les entreprises du secteur est
clair. Un phénomène qui, à n’en pas douter, et
pour notre malheur, n’affecte pas seulement ce
domaine et se reproduit dans de nombreux autres.

Dans sa course à la réduction des coûts et au
profit maximal, l’industrie agro-alimentaire a mis
à l’arrière plan la qualité de ce que nous
mangeons. Des scandales alimentaires comme la
« Vache folle », la grippe aviaire, les poulets à
la dioxine, l’e-coli, etc., ne sont que la pointe
de l’iceberg d’un modèle agricole et alimentaire
qui place la soif du profit d’une poignée
d’entreprises qui monopolisent le secteur avant
les besoins alimentaires des personnes.

Nous sommes ce que nous mangeons. Et si nous
consommons des produits élaborés avec de fortes
doses de pesticides, d’organismes génétiquement
modifiés, d’édulcorants, de colorants et de
substances qui nous rendent accros à la malbouffe,
cela finira, tôt ou tard, par avoir des
conséquences sur notre santé. L’heure est sans
doute venue de dire à Ronald McDonald et à ses
amis: « I'm NOT lovin' it. »

*Article publié dans « Público », 16/01/2013.
**Traduction française pour Avanti4.be : Ataulfo
Riera. 

https://www.alainet.org/es/node/164022
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