Le contexte international des indignations mondiales (3/5)

Du printemps arabe à Occupy Wall Street en passant par le mouvement des Indignés

11/01/2012
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En Tunisie et en Egypte, pays non exportateurs de matières premières (sauf à la marge), les conditions de vie des populations se sont aggravées au cours des dernières années, conduisant à des protestations sociales réprimées très durement. Cela provoque, en Tunisie d’abord, une réaction massive qui prend rapidement une dimension politique. Le peuple réuni dans la rue et sur les places publiques affronte la répression (qui fait 300 morts) et exige le départ du dictateur Ben Ali. Il doit abandonner le pouvoir le 14 janvier 2011. A partir du 25 janvier 2011, le mouvement s’étend à l’Egypte dont la population a été soumise à des décennies de contre-réformes néolibérales dictées par la Banque mondiale et le FMI combinées à un régime dictatorial allié comme celui de Tunisie aux puissances occidentales (et totalement compromis dans une alliance avec les autorités israéliennes). Le 11 février 2011, moins d’un mois après Ben Ali, Moubarak est obligé de quitter le pouvoir. D’autres pays de la région s’embrasent, la répression s’abat. Les luttes sont toujours en cours, le processus n’est pas terminé au niveau régional.
 
En Tunisie et en Egypte, les classes dominantes locales essaient, avec l’aide des grandes puissances occidentales, de contrôler la situation afin que le mouvement ne débouche pas sur une révolution sociale.
 
Le vent de la rébellion traverse la Méditerranée de l’Afrique du Nord vers le Sud de l’Europe. Au Portugal, le 12 mars 2011, le mouvement des précaires manifeste par centaines de milliers dans les rues mais le mouvement ne dure pas. Le 15 mai, la protestation atteint l’Espagne et se prolonge jusqu’au 23 juillet puis rebondit dans un cadre mondial le 15 octobre 2011. Pendant ce temps, le mouvement a touché la Grèce dès le 24 mai 2011. La place Puerta del Sol à Madrid, la place Catalunya à Barcelone, la place Syntagma à Athènes et des centaines d’autres places d’Espagne et de Grèce vibrent au même rythme en juin 2011. En juillet-août, la protestation sociale secoue également Israël, le boulevard Rotschild à Tel Aviv est occupé mais sans mettre en danger le gouvernement (et sans chercher à faire la jonction avec la cause palestinienne). En septembre, le mouvement réussit à traverser l’Atlantique Nord. Il a atteint les Etats-Unis par la côte Est en commençant par New-York et Wall Street pour s’étendre à une grande partie du territoire des Etats-Unis jusqu’à la côte Ouest où Oakland vit l’expérience la plus radicale.
 
Le 15 octobre 2011, date définie par le mouvement des Indignés en Espagne, plus d’un million de personnes manifestent dans le monde, du Japon à la Côte Ouest des Etats-Unis, essentiellement dans les pays les plus industrialisés. Le 15 octobre, les manifestations les plus imposantes ont lieu à Madrid, Barcelone, Valence, Athènes et Rome. En Espagne, d’où l’action est partie près de 500 000 manifestants ont défilé dans les rues d’environ 80 villes différentes dont 200 000 ou plus à Madrid. Les deux principaux centres financiers de la planète, New York et Londres, sont le lieu de manifestations dans le cadre de ce vaste mouvement. Plus de 80 pays et près d’un millier de villes différentes ont vu défilé des centaines de milliers de jeunes et d’adultes qui protestent contre la gestion de la crise économique internationale par des gouvernements qui courent aux secours des institutions privées responsables de la débâcle et qui en profitent pour renforcer les politiques néolibérales : licenciements massifs dans les services publics, coupes claires dans les dépenses sociales, privatisations massives, atteintes aux mécanismes de solidarité collective (systèmes publics de pension, droits aux allocations de chômage, convention collectives entre salariés et patronat,…). Partout le remboursement de la dette publique est le prétexte utilisé pour renforcer l’austérité. Partout les manifestants dénoncent les banques.
 
Aucune organisation ne dirige le mouvement et celui-ci ne cherche pas à se doter d’une structure de coordination internationale, mais la communication passe manifestement très bien.
 
- Éric Toussaint, docteur en sciences politiques, président du CADTM Belgique, membre du Conseil international du Forum social mondial depuis sa création  et du Conseil scientifique d’ATTAC France. A dirigé avec Damien Millet le livre collectif La Dette ou la Vie, Aden-CADTM, 2011. A participé au livre d’ATTAC :  Le piège de la dette publique. Comment s'en sortir, édition Les liens qui libèrent, Paris, 2011.
https://www.alainet.org/es/node/155188?language=es

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