Au bord de l’implosion et de l’explosion (3 de 3)

13/11/2015
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La zombification demeure le trait dominant du paysage politique en Haïti depuis la prise du pouvoir par Duvalier en 1957. Sa tendance lourde. Sa doxa. Le gouvernement continue d’agir de manière inadmissible avec des pratiques qui compromettent gravement l’avenir national. Les atouts majeurs que dispose le pays sur le plan géologique et minier sont gérés d’une manière scandaleuse qui empêche l’adoption d’un contrat social où chaque citoyen trouvera sa juste part. Les éléments communs qui structurent le discours politique se retrouvent dans le champ économique. La mentalité archaïque qui a permis de dilapider les 2 milliards de dollars du Fonds Petrocaribe et les taxes sur la diaspora pour constituer des fortunes personnelles travaille aujourd’hui pour étendre l’espace d’illégalité dans le secteur minier avec la connivence de la communauté internationale. Comme le souligne le journaliste Tate Watkins, les mines d’or découvertes risquent de porter à Haïti autant de malédiction que l’aide étrangère [1].

 

Dans une correspondance en date du 9 mars 2015, quatre-vingt treize (93) organisations de la société civile venant d’Haïti, des Etats-Unis, d’Europe, d’Afrique, de l’Asie et de l’Amérique Latine ont porté plainte auprès de la Banque mondiale en référence à son « Absence de responsabilisation pour son engagement dans le secteur minier haïtien » (Lack of Accountability for World Bank Involvement in Haitian Mining Sector). Cette plainte nationale et internationale redit avec force la demande formelle des Plaignants haïtiens en date du 7 janvier 2015 adressée à la Banque mondiale pour une « Demande d’inspection au Panel d’Inspection concernant les violations des Politiques de Sauvegarde Sociale et Environnementale de la Banque Mondiale résultant de l’appui de la Banque Mondiale au gouvernement d’Haïti pour des activités liées au secteur minier haïtien [2]. »

 

La transparence sur les 20 milliards de dollars américains de projets miniers

 

Le soutien à tout prix à Martelly, malgré le fait qu’il soit usé et discrédité, cache-t-il autre chose ? À cet égard, la découverte de mines d’or, de cuivre, d’iridium et d’argent et de gisements de pétrole dans le sous-sol haïtien d’une valeur estimée à 20 milliards [3] de dollars américains rend l’équation délicate. Un gigantesque effort est mis en œuvre pour exploiter ces mines. Depuis 2012, des permis de prospection, de recherche, et d’exploitation ont été délivrés sans la moindre transparence à quatre sociétés minières, deux américaines et deux canadiennes, couvrant une superficie de 2 400 kilomètres carrés, soit 8% du territoire [4]. Deux conventions ont été signées incluant de faibles taux de redevance (royalties) de 2.5% alors que, d’après Claire Kumar [5], experte en fiscalité minière et royalties, ils auraient dû être au moins de 5%. En Équateur, ils sont entre 5% et 8%, au Pérou de 12%.

 

Selon l’organisation Haïti Grassroot Watch, « cette superficie est de 3 885 kilomètres carrés de territoire haïtien, soit 15% de tout le pays [6]. » Mais le projet de loi minière préparé par la Banque mondiale a été enterré au Parlement haïtien qui s’est interposé entre le gouvernement Martelly et les compagnies minières. Selon les organisations Justice in Mining Collective et Accountability Counsel, « la Banque mondiale a soutenu un élément clé de cet effort en apportant son assistance à la rédaction d’une nouvelle loi minière nationale. Début 2013, le parlement haïtien a décrété un moratoire sur les activités minières sous le coup d’accusations de corruption dans l’accord de permis d’exploitation en vertu de la législation minière actuelle. Les investisseurs et les sociétés minières attendent actuellement la mise à jour de la loi avant de reprendre l’exploitation [7]. »

 

La nécessité de la transparence dans les projets miniers devient de plus en plus évidente. Les organisations de base telles que le Kolektif Jistis Min an Ayiti (le Collectif pour la Justice Minière en Haïti, ou le (« Collectif »), la Clinique de la Justice Globale de la faculté de droit de l’Université de New York (« la Clinique ») et l’organisation non-gouvernementale, Accountability Counsel, réalisent un travail de fourmi en Haïti. Avec fermeté, elles ont pénétré en profondeur dans les communes et les organisations sociales situées dans les Départements de l’Artibonite, du Centre, du Nord, du Nord-Est, et du Nord-Ouest, et ont eu plus de 40 réunions dans les zones d’activité minière aurifère avec les populations concernées. Elles ont été appuyées par six organisations des droits humains et du mouvement social qui sont préoccupées par l’exploitation minière en Haïti.

 

Ces organisations de base donnent des frissons à Martelly. Elles ont collecté plus de 400 signatures dans une pétition demandant entre autres une consultation nationale sur l’exploitation minière en Haïti ; la traduction du Projet de Loi Minière en Créole ; une analyse de la capacité du gouvernement haïtien de surveiller l’industrie minière et de défendre les intérêts du public haïtien ; etc. De plus, ces organisations de base ont introduit une plainte contre la Banque mondiale dans laquelle on lit : « Nous craignons que le Projet de Loi Minière, élaboré avec le soutien de la Banque Mondiale, ait été rédigée par un petit groupe de travail (une « Task Force ») composé d’experts de la Banque Mondiale et de représentants du gouvernement haïtien, sans consultation adéquate avec les organisations de la société civile et les communautés directement touchées par l’activité minière ; que la nouvelle loi minière ne parvienne pas à protéger les droits humains et les droits environnementaux du peuple haïtien ; qu’elle viole la Constitution haïtienne de 1987 ; et qu’elle entrave la capacité du gouvernement haïtien à respecter ses obligations au respect des droits de l’homme et du droit international [8]. »

 

Martelly a ressenti comme une gifle le refus du Parlement d’entériner les promesses inconsidérées qu’il a faites aux sociétés minières et la demande de transparence sur les permis qui leur ont été octroyés [9]. La croisade qu’il mène avec le Parti Haïtien Tèt Kale (PHTK) s’inscrit dans une stratégie permettant à son parti politique de contrôler non seulement le pouvoir exécutif mais aussi et surtout le pouvoir législatif afin de prévenir tout débat sérieux sur les activités minières. L’objectif est de simplifier le parcours et les procédures juridiques en s’assurant que la niche parlementaire du PHTK facilite le vote de la loi minière telle que ficelée par les investisseurs. Martelly veut s’assurer qu’il n’aura plus à refaire le parcours du combattant qu’a été son mandat présidentiel. D’où son refus d’organiser les élections législatives et sa stratégie de rendre le Parlement caduc et de remplacer ses membres par des députés j’approuve et autres béni oui-oui issus des élections frauduleuses et prêts à voter ses désirs.

 

Le triomphe du mal absolu

 

Le pouvoir Tèt Kale reste fidèle aux prérogatives que les macoutes se sont donnés sous les Duvalier. Le PHTK reste fidèle à ce temps du pouvoir à vie. En faisant des passes courtes à la Poutine. Martelly président, Jovenel président, Martelly premier ministre, de manière cyclique. Avec un enthousiasme stupide. Des passes courtes qui sont en fait des passes en arrière. Comme au rugby. La logique est d’inspiration macoute. Le bon sens a disparu. La fausse sécurité produite par la dette au niveau du système économique international a son équivalent en Haïti avec la mascarade électorale du 25 octobre 2015 que le Core Group (les Ambassadeurs du Brésil, du Canada, de la France, de l’Espagne, des Etats-Unis d’Amérique, de l’Union Européenne, et le Représentant spécial de l’Organisation des Etats Américains), présente comme acceptable.

 

Le Core Group veut appuyer un ordre politique consolidant l’entre-soi destructeur des bandits pour s’assurer que, dans un pays où la moitié de la population n’a pas accès à l’eau potable, les compagnies minières faisant l’extraction de l’or à ciel ouvert aient carte blanche pour contaminer les cours d’eau avec des produits chimiques tels que le cyanure. À ce sujet, les « experts haïtiens se montrent préoccupés à l’effet qu’une mine à ciel ouvert — qui, à toutes fins utiles, s’approprie d’importantes quantités de cyanure pour séparer le minerai d’or de la gangue —, pourrait s’avérer dangereuse pour l’environnement déjà fragile d’Haïti [10]. » Il existe encore des Haïtiens qui croient fermement que si le seuil d’irréversibilité a été atteint sur le plan environnemental avec 2% de surface forestière, il ne l’est pas sur les plans psychique et politique. Les choses peuvent changer et doivent changer !

 

Sans écarter la possibilité que Jovenel Moïse soit déclaré « Président » par un de ces tours de passe-passe que nous connaissons déjà, le Core Group préconise l’organisation d’un second tour le 27 décembre 2015. De quelles informations disposent ces plénipotentiaires pour donner leur allégeance à un pouvoir de mafieux ? Sommes-nous revenus au 13e siècle où des mercenaires européens servaient à titre d’ambassadeurs pour les sultans en Europe ? Les méfaits des « bandi legal » sont connus et documentés. Le CEP d’Opont vient de faire l’éloge du formidable laboratoire produisant des bandits à la chaine en nommant comme sénateurs et députés un ramassis de repris de justice, d’assassins patentés et des vendeurs de cocaïne. Malgré les avertissements du RNDDH qui avait publié un rapport détaillé donnant une liste de trente-cinq (35) de ces fieffés voyous dans son rapport intitulé Elections 2015 : Le RNDDH questionne la Moralité de certains Candidats publié le 2 Juin 2015. La révolution du mal absolu a triomphé.

 

La solution risquée du 2e tour que proposent les diplomates ne peut en aucun cas être efficace si le peuple haïtien est résolu à défendre son droit à l’auto-détermination et refuse de constamment passer ses intérêts au second plan en se laissant manipuler par des diplomates. Martelly est piégé par les coutumes macoutes qu’il a adoptées à la mamelle. Le grand public était averti et il ne devrait y avoir aucune surprise. La mascarade électorale avait été amplement dénoncée. On peut se référer à un article intitulé « Le scénario-catastrophe du 25 octobre 2015 en Haïti est-il évitable ? » publié à AlterPresse, le 15 septembre 2015. Nous disions alors : « la nouvelle catastrophe annoncée n’a aucune chance d’être évitée. Selon Catherine Charlemagne, " même si les dirigeants haïtiens avaient cent ans devant eux et disposaient de cent milliards de dollars américains pour préparer les élections, le résultat aurait été le même. Ce n’est pas une question de temps, ni de moyens. Il s’agit d’incompétence. " ».

 

Bulle politique et bulle financière

 

Les leçons émanant des élections frauduleuses de 2010 aboutissant à la sélection de Michel Martelly n’ont pas été apprises. Certains ont la mémoire courte ou manifestent carrément une volonté d’amnésie. Pierre-Louis Opont, le numéro deux du CEP d’alors qui a fini par avouer la forfaiture qu’il a orchestrée, après que cette dernière ait dénoncée par Ginette Chérubin et Ricardo Seintenfus, a été reconduit comme un bon apparatchik. Après s’être confessé en disant essentiellement « Le vainqueur aux urnes n’est pas le vainqueur proclamé » [11], il a emprunté le même chemin, prêt à redire et patati et patata…

 

Ensuite, nous assistons à la hausse démesurée et arbitraire du nombre de partis politiques et de candidats. La bulle politique a beaucoup évolué sans aucune justification réelle en ce qui concerne les fondamentaux de la gouvernance et la compétence des acteurs. Selon le RNDDH [12], Haïti est passée de 105 candidats inscrits aux élections législatives en 2009 à 923 inscrits et agréés aux élections en 2010 et à 1853 inscrits et agréés en 2015, deux cent trente deux (232) candidats au Sénat et mille six cent vingt et un (1 621) candidats à la députation. La même tendance inflationniste est observée au niveau des candidats à la présidence dont le nombre a plus que doublé en 5 ans, passant de 19 agréés en 2010 à 54 agréés en 2015.

 

Aux Etats-Unis, les conditions qui ont créé le krach financier de 2008 se sont encore aggravées. Dans la dette totale américaine de 60 mille milliards de dollars (60 trillions en anglais) [13], la portion fédérale est estimée en septembre 2015 à 18 mille milliards de dollars (18 trillions en anglais). La dette totale américaine représente un tiers de la dette mondiale globale. Mais cette dette totale aussi grande qu’elle soit n’est que la face émergée de l’iceberg, celle que l’on voit. Il faut y ajouter d’autres dettes dont celle du marché des produits financiers dérivés qui ne cesse d’augmenter et a atteint $1 500 mille milliards de dollars ($1 500 trillions). Une vraie bulle ! Le système est à la veille de l’explosion. Il faut de plus en plus de dettes pour financer la croissance.

 

Si, en l’an 2000, il fallait $2,4 de dette pour produire $1 de croissance du PIB, en 2014, il faut $4,6 pour produire cette même croissance de $1 du PIB. Le désendettement (deleveraging) n’a pas eu lieu et le commerce des valeurs mobilières et des changes ne fait qu’augmenter. D’abord, il y a le poids du trading haute fréquence (high Frequency Trading en anglais) qui, selon L’Autorité européenne de supervision des marchés, représente jusqu’à 43% des volumes traités (en valeur), sur les marchés d’actions de l’Union européenne [14]. Aux États-Unis le trading haute fréquence contrôle 70% du marché des bons du Trésor [15]. Ces activés de trading à haute fréquence existaient à peine avant le krach de 2008.

 

Ensuite, c’est le développement du shadow banking qui ne fait l’objet d’aucune régulation, contrairement aux banques traditionnelles. Se voye monte ! En effet, le shadow banking (finance parallèle) représente 75 000 milliards de dollars et concerne les activités de financement menées par les fonds spéculatifs (hedge funds), les sociétés privées de placement (private equity) et les trusts. La poursuite du gain à tout prix explique le développement du shadow banking étant donné que les rendements des placements traditionnels (obligations et actions) sont trop faibles pour attirer les investisseurs. Même en République Populaire de Chine, le shadow banking représente 43% du PIB [16]. Enfin, d’autres secteurs non régulés de la finance officielle sont le marché de prêts de titres, le marché des repos dont la taille s’est contractée à la fin de l’année 2014 à 5 500 milliards d’euros [17].

 

Pendant combien de temps ?

 

Sur le plan politique en Haïti, les incohérences, confusions et indécisions sont à la base de développements aussi bizarres. Tout le monde sait que Martelly ne passait pas la barre lors des élections de 2010. Il ne représente rien et les acteurs internationaux ont préféré le rien à Madame Manigat. Martelly n’a aucune compétence politique et sa propulsion au timon des affaires est une manière subtile de diminuer les ambitions des Haïtiens fiers de la geste de 1804. Une manière de caricaturer en comédiens les Haïtiens. Une façon de marteler que nous n’avons rien dans la tête. Que nous persistons à nous soustraire de la lumière en refusant d’informatiser notre système électoral. En nous abstenant de financer nous-mêmes nos propres élections. En nous nourrissant de dirigeants vides. En bloquant toute transparence. En excluant la diaspora. En empêchant depuis 40 ans la création de l’institution fondamentale du Conseil Électoral Permanent (CEP) prévu dans les articles 191 à 199 de la Constitution de 1986.

 

Pendant combien de temps durera la malédiction Duvalier qui s’est abattue sur Haïti traumatisant le peuple pour le porter à accepter de vivre sous n’importe quelle direction afin de ne pas mourir ? Pendant combien de temps le « pito nou lèd nou la » restera le motto dans notre inconscient de peuple ? Pendant combien de temps notre peuple vivra en dehors de la loi sous un système de mesures d’exceptions prolongées ? Martelly est là pour arranger des coups en humiliant, autant en se ralliant des gens qu’il méprise profondément tout en se débarrassant d’autres qu’il aime pourtant. Avec sa tête dérangée, il inverse les choses parfois. D’où son refus pathétique pendant quatre ans de laisser le Conseil Électoral Provisoire (CEP) organiser les élections législatives. Il a eu cette joie intense de bien montrer qu’il est un zéro, un homme sans aucune valeur intrinsèque, que les puissants de ce monde ont choisi pour diriger Haïti.

 

La défiance croit à vue d’œil

 

Dans le domaine de la haute finance, les puissants de ce monde ont décidé depuis sept ans d’appliquer un taux d’intérêt zéro et d’inonder les marchés monétaires et financiers avec du papier monnaie sans valeur, grâce aux interventions des banques centrales. L’assouplissement quantitatif est la solution mirifique appliquée par la Réserve Fédérale (la banque centrale américaine) pour arrêter la dégringolade de 2008. D’un côté, les banques centrales déversent des milliers de milliards de dollars sur les marchés afin de produire de l’inflation pour diminuer la valeur de la dette en augmentant celle de la monnaie. De l’autre, les forces technologiques et démographiques produisent la déflation [18]. En bref, la guerre est engagée. En effet, la déflation est systématique avec l’effondrement du prix du pétrole qui diminue drastiquement passant de 115 dollars le baril en janvier 2014 à 49 dollars en octobre 2015. Cette dégringolade affecte aussi ainsi les prix de l’or, du cuivre, de l’aluminium et d’autres métaux. La diminution de la demande affecte le secteur de l’automobile et d’autres biens de consommation. La déflation qui a été à la source de la Grande Dépression de 1929 représente le plus grand danger pour le système global. On l’a vu, la Chine a vite dévalué sa monnaie pour que ses biens manufacturés demeurent compétitifs tandis que le dollar fort contribue à la déflation. C’est la guerre des monnaies.

 

La fuite en avant a lieu dans la bourse où les gains des actionnaires ont. augmenté dix fois plus que ceux de l’économie réelle. En effet, l’indice Dow Jones qui était de 7 000 points en 2008 est passé à 18 000 points en 2015, tandis que le PIB américain n’a progressé que de 15 000 milliards à 16 3000 milliards de dollars au cours de la même période Cette tendance est aussi mesurée par l’indice S&P 500 qui atteint des sommets exceptionnels comme celui de 2 122 points le 15 mai 2015. Une hausse qui n’a aucun rapport avec l’économie réelle. À Wall Street, le cours des actions a doublé en l’espace de sept ans, à Tokyo en 2 ans et la même dynamique est enclenchée dans les bourses européennes. L’argent injecté par les banques centrales ne finance pas l’économie réelle des ménages et des entreprises mais les marchés financiers.

 

Tout comme sur le plan international les grands marchés financiers ne reflètent nullement l’offre et la demande et sont manipulés par la corruption (délits d’initié, capture des institutions réglementaires, blanchiment de capitaux, paradis bancaires, manipulation du LIBOR [19]), les élections sont également l’objet de manipulations systématiques en Haïti. C’est le tout voum se do (on fait à sa guise) comme le dit le créole haïtien pour traduire l’absence de remèdes pour les incurables. Les violations et autres irrégularités orchestrées lors des zélections du 9 août 2015 ont été multipliées lors des zélections du 25 octobre 2015. Les 100 000 réfugiés en provenance de la République Dominicaine et les 100 000 femmes participant au programme « Ti manman chéri » ont été instrumentalisés pour voter PHTK afin de recevoir un subside. La politique des sans vergogne est insupportable. Aucun développement n’est possible avec le ras-le-bol produit par ces élections frauduleuses.

 

Les risques de l’implosion et de l’explosion n’ont jamais été aussi grands et la défiance croît à vue d’œil. C’est ce qu’indique l’indice Baltic Dry ( BDI en anglais ) regroupant les 24 routes maritimes les plus fréquentées pour le transport des matières premières. En l’année 2008, l’indice Baltic Dry a augmenté au niveau record de 11 793 points en mai 2008 pour descendre à 663 points en décembre 2008, soit une chute de 93%. Cet indice a continué sa dégringolade et atteint le creux de 608 points le 30 janvier 2015. Il est de 631 points le 6 novembre 2015. Une inquiétante situation traduisant le triomphe du rien ! Qu’on se détrompe, le rien n’est pas du néant. Avec le commerce mondial qui se rétracte, la politique du rien n’est pas vide. Elle est remplie de conneries et est immense tant aux Etats-Unis, sur le plan international, qu’en Haïti. Dans ce contexte global, la résistance n’est jamais inutile.

 

- Leslie Péan est économiste, écrivain

 

Notas

 

[1] Tate Watkins, « Curses of Aid and Gold in Haïti », Medium, juin, 2013.

 

[2] World Bank, « Request for inspection (french) », Project ID:P144931, January 7, 2015, p. 1.

 

[3] Jane Reagan,« Haiti’s rush for gold gives mining firms a free rein over the riches », The Guardian, London, May 30, 2012.

 

[4] Prospery Raymond, « Haiti’s Wealth of Untapped Mining Resources Must Benefit the Poor » (La Richesse d’Haïti des Ressources Minières Inexploitées doit Bénéficier aux Pauvres), The Guardian, London, January 21, 2014. Lire aussi du même auteur « In Haiti, we must make mining revenue work for us », (En Haïti, nous devons faire que les revenus miniers nous soient profitables), The Guardian, London, July 2, 2012.

 

[5] Haïti Grassroot Watch, « Haïti bon dernier dans la course dans la "course aux royalties" », 31 mai 2012.

 

[6] Haïti Grassroot Watch, Ruée vers l’or en Haïti, 31 mai 2012.

 

[7] Peterson Derolus et Nixon Boumba, Justice in Mining Collective, et Caitlin Daniel, « Soutien de la Banque mondiale à l’exploitation minière en Haïti : loin de normes ‘en or’ », Accountability Counsel, 30 septembre 2015.

 

[8] World Bank, « Request for inspection (french) », op. cit., p. 2.

 

[9] Jane Reagan, « Haitian Senate Calls for Halt to Mining Activities, Inter Press Service, 14 Février, 2013.

 

[10] « Ressources minières : Que recèlent les collines d’Haïti ? (II) », AlterPresse, mercredi 6 juin 2012.

 

[11] Sékou Chérif Diallo, Guinée : Comment peuvent-ils dire qu’ « Une mauvaise élection vaut mieux que pas d’élections du tout » ?, 224 News, Guinée, 14 octobre 2015.

 

[12] RESEAU NATIONAL DE DEFENSE DES DROITS HUMAINS (RNDDH), Bilan de la Présidence de René PREVAL en matière de droits humains mai 2006 - mai 2011, Port-au-Prince, Mai 2011, p. 9. Voir également RESEAU NATIONAL DE DEFENSE DES DROITS HUMAINS (RNDDH), Conseil National d’Observation Electorale (CNO), Conseil Haïtien des Acteurs Non Etatiques (CONHANE) Rapport sur le premier tour des élections législatives partielles 25 août 2015, p. 7.

 

[13] Board of Governors of the Federal Reserve System, Z.1 Financial Accounts of the United States, Flow of Funds (section L.100), Second Quarter 2015, September 18, 2015, p. 74. Lire aussi « Fed Quietly Revises Total US Debt From 330% To 350% Of GDP, After "Discovering" Another $2.7 Trillion In Debt », Zero Hedge, First Quarter 2015.

 

[14] Economic Report, High-frequency trading activity in EU equity markets, Number 1, 2014.

 

[15] Portia Crowe, « High-frequency traders are now dominating another huge market », Risk, September 23, 2015.

 

[16] Douglas Elliott, The Brookings Institution, Economic Studies Arthur Kroeber, The Brookings-Tsinghua Center Yu Qiao, The Brookings-Tsinghua Center, Shadow banking in China : A primer, Brookings institution, Washington, D.C., March 2015, p. 8.

 

[17] « Contraction du marché du "repo" », Les Échos, Paris, 26/02/2015.

 

[18] Jessica Menton, « Oil Prices 2015 : Why Economists Fear ’Nightmare’ Deflation », The Economist, January 7, 2015.

 

[19] Leslie Péan, « La corruption du LIBOR et par le LIBOR », AlterPresse, 1ère partie, 13 août 2012 et 2e partie, 15 août 2012

 

Source: AlterPresse, 13 novembre 2015

http://www.alterpresse.org/spip.php?article19197#.VkYgql5lGyc

https://www.alainet.org/en/node/173607
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