2003. À qui sert l'accord avec le FMI ?

05/01/2004
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Toute l'année 2002 a été marquée par les négociations du gouvernement argentin avec le FMI. Les motifs avaient pour objet d'éviter la cessation de paiements de l'Argentine avec les organismes financiers internationaux et de créer les conditions pour régulariser les paiements avec les détenteurs de titres de la dette externe publique, qui étaient entrés en défaut depuis fin 2001. Il s'agit de "redonner confiance aux investisseurs nationaux et étrangers", comme le souligne l'accord enfin signé en janvier 2003. Les objectifs de l'accord sont de "garantir la solidité fiscale, monétaire et bancaire", "reconstituer la confiance..." et protéger les "droits contractuels". Il est clair que le privilège de la politique économique légitime l'ajustement permanent du budget public, la restriction monétaire et la défense du droit de propriété pour favoriser les affaires des investisseurs. Ceci est établi en indiquant les principaux composants du programme de transition, c'est- à-dire, jusqu'à août 2003. Ces composants se concentrent autour de "maintenir le déficit fiscal fédéral sous contrôle" ; mettre en oeuvre "des accords bilatéraux entre le gouvernement national et les gouvernements provinciaux" ; établir un programme monétaire pour contrôler l'inflation ; la préparation d'une réforme fiscale à moyen terme ; restructurer la dette ; assainir le système bancaire et assurer "les droits des créanciers en rétablissant la sécurité juridique". Aucun mot par rapport à la pauvreté, au chômage, le marché interne ou le rétablissement économique. Autant de sujets qui se sont aggravés pendant 2002. La baisse du PBI a dépassé 11% courant 2002 et a ouvert le chemin d'une cinquième année de récession profonde. Les seuils de pauvreté (des revenus de moins de 716 pesos par mois (1 $ peso= 3,25 €)) a atteint son maximum avec 57% de la population et plus de 21 millions de personnes, dont presque 10 millions sont considérées comme indigentes (revenus de moins de 220 pesos par mois). Ce dernier chiffre d'indigents est presque le double de celui de l'année précédente. Le chômage a atteint 21.5% de la population économiquement active et n'augmente pas plus par l'effet du Plan chef de famille au chômage qui assigne 150 pesos (loin de l'indice d'indigence) à presque 2 millions de personnes. Parmi eux sont très peu nombreux ceux qui effectuent des prestations de travail et toutefois ils ont un impact sur la diminution des indicateurs officiels de chômage. La somme du sous- emploi amène à plus de 40% la population économiquement active avec des problèmes d'emploi. Ces indicateurs révèlent la dureté de la crise dans les secteurs sociaux subordonnés et expliquent le pourquoi d'une poursuite de la récession qui affecte les producteurs petits et moyens et les chefs d'entreprise, les économies régionales et la majorité de la population argentine. Mais ce n'est pas le problème du FMI, ni des créanciers externes, ni des capitaux au pouvoir. Objectifs et mesures suggérées L'objectif de stabilisation économique condamne à repousser les questions de fond, comme réactiver la production et la distribution des revenus et de la richesse. De plus, l'accord étaye les formes d'accumulation établies durant les dernières années et c'est pourquoi il insiste sur les efforts à faire pour régulariser la situation de paiements avec l'extérieur. En ce sens on établit la rénovation des échéances avec les organismes financiers internationaux tant que durera l'accord et les conditions pour résoudre la restructuration de la dette publique entre les mains de créanciers privés. A cette fin, a été désignée (ce qui a un coût) une banque française comme conseiller externe ; on tient des réunions avec des créanciers afin d'élaborer un listing de détenteurs de titres et en ouvrant le chemin à une négociation qui assouplit les exigences en matière de taxes, de garantie et de délais. Un véritable plan de paiement qui compromet les possibilités budgétaires d'aborder les demandes croissantes de la société lésée par les politiques, favorisant de la concentration capitaliste. C'est pourquoi le mémorandum insiste pour fortifier la collecte. On peut affirmer que l'État demande une collecte pour assurer l'excédent qui permet l'achat de devises pour annuler des compromis externes. Celui-là est le fondement de la restitution de 21% comme assiette de la TVA depuis le milieu de janvier 2002 et de l'élimination des avantages fiscaux établis dans les "plans de compétitivité" constitués vers le milieu du 2001 pour essayer de réactiver la production locale. Cela inclut un paquet de réformes fiscales qui apportent des fonds au fisc et entre autres aspects il inclut les coopératives et les fondations comme assujetties à l'impôt sur les bénéfices. On sait que ce sont des organisations non lucratives et par conséquent non soumis à l'impôt. Toutefois, l'esprit de perception imprimé dans l'accord réinstalle une vieille aspiration du capital lucratif pour affecter les recettes du secteur solidaire de l'économie. Mais est également confirmée la politique de restriction des dépenses publiques et qui notamment nie "le paiement des réductions de salaires et des pensions de 13%, ordonnée par la justice et mise en oeuvre entre juillet 2001 et décembre 2002", qui "sera effectué par des bons qui ne s'amortiront pas pendant le 2003." Il est intéressant de souligner qu'en matière de dépenses, l'accord avec le FMI privilégie des "ressources suffisantes" pour payer la dette et d'autres bons du premier programme d'échange des dépôts bancaires ; les bons " compensatoires " à la banque de la " pesification " asymétrique et les paiements des banques pour les litiges judiciaires (sujet actuellement en discussion et qui porte quelque 2800 millions de dollars) et les obligations avec le FMI, BM et BID. Il est clair ici qu'une des préoccupations centrales du FMI est de reconstituer les conditions de fonctionnement du système financier, qui a été réduit de 20% au début le 2001. De 90000 millions de pesos équivalents à des dollars comme réserves en février 2001, le chiffre a été réduit approximativement à 58000 millions de pesos, quelque 18000 millions de dollars à janvier 2003. Là est la raison de l'importance donnée dans l'accord avec le FMI à la restructuration du système bancaire et qui implique de modifier la loi des organismes financiers pour renforcer un objectif de concentration installé initialement en 1977 pendant la gestion de Martínez de Hoz sous le gouvernement militaire meurtrier. L'accord promeut des facilités pour le transfert d'actifs entre les banques et favorise une législation de l'impunité pour les fonctionnaires du BCRA qui interviennent dans le processus de fusions et restructurations bancaires. On prévoit "de limiter la capacité du Pouvoir Judiciaire pour annuler des décisions du BCRA sur les transferts d'actifs à des tiers". Il est prévu que le BCRA redéfinisse les capitaux minima nécessaires avant le changement de gouvernement en mai prochain sur la base de projections d'affaires que les banques ont dû livrer à la fin de février. Il fait allusion expressément à ce qu' "on commence avec la réforme des trois banques publiques principales", la Banque de la nation, celle de la Province de Buenos Aires et celle de la Ville de Buenos Aires. Ainsi, il est fait allusion "à l'amélioration de l'exercice opérationnel", au "renforcement de la gestion" et au futur stratégique en incluant "des décisions sur la capitalisation à travers l'émission publique d'actions". Tel est le chemin de la privatisation partielle qui va dans le sens de la privatisation totale de la banque publique. Sans doute l'accord entre le gouvernement et le FMI est un soutien au prétendu redémarrage du cycle d'affaires du pouvoir économique, puisqu' outre le privilège faits aux investisseurs, aux créanciers externes et aux banques, le mémorandum inscrit les revendications des entreprises privatisées de services publics pour "réviser les contrôles prix et tarifs actuels" et les faciliter "la restructuration des dettes par les entreprises prêteuses". Nous ne devons pas oublier que ces entreprises privatisées exigent une intervention publique pour "s'occuper" de leurs prêts à l'extérieur, dont beaucoup sont en cessation de paiements et réclament de forts ajustements tarifaires que le FMI a synthétisés dans une demande de 30% moyenne et qui sont bloqués aujourd'hui par la convergence de la loi d'urgence, de l'action de la justice et de la résistance des utilisateurs. Que reste t-il pour le prochain gouvernement ? L'accord dit que "le programme de transition consignera les bases pour un programme plus global de réformes fondamentales qui sera développé après les élections et qui est nécessaire pour faire face aux problèmes structurels profonds auxquels fait face l'Argentine". Cela anticipe la suite. Nous devons rappeler que sous la seconde présidence de Menem (1995-1999) et lors de celle de la Rúa (1999-2001) on parlait de la "réforme dans la réforme" en faisant allusion aux réformes de seconde génération qu'il est nécessaire d'appliquer en Argentine. C'est le discours prôné par les organismes internationaux après avoir effectué les réformes de première génération, en général centrées sur les privatisations d'entreprises publiques. Il s'agit maintenant d'aborder des réformes sur le travail qui légalisent la flexibilité et la réduction salariale et l'élimination des pratiques juridiques de protection des droits des travailleurs. Mais aussi avancer sur les réformes de la santé, de l'éducation et des prestations sociales qui donnent une orientation de " marché " aux catégories des ayants droits sociaux et économiques. Il s'agit aussi d'avancer sur une réforme de la justice pour satisfaire la demande d'une plus grande rapidité et d'une sécurité juridique qui émane des investisseurs privés. C'est le message qu'essayent d'installer les organismes, y compris en essayant une autocritique devant l'échec des politiques dérivées du Consensus de Washington durant les années 90 et dans la toute Amérique latine et les Caraïbes. Cette autocritique a été écoutée lors de la Vème Rencontre d'Économistes sur la Globalisation et les Problèmes du Développement qui a été eu lieu à La Havane entre le 10 et le 14 février de 2003. Des erreurs dans l'application des politiques existent, c'est pourquoi on justifie les réformes dans la réforme. De cette façon on manipule un consensus critique qui émerge contre les politiques économiques hégémoniques et on convient que la réforme structurelle orientée vers le marché est une réalité incontournable et qu'il s'agit maintenant d'avancer dans d'autres secteurs à ouvrir. De cette façon on prétend conditionner le gouvernement qui émergera des élections avril et mai 2003. L'objectif latent est de normaliser l'ajustement et de reprendre les paiements aux créanciers externes, en contenant les conflits sociaux à travers l'assistance (plan chef de famille) et en même temps produire des occasions d'affaires pour le capital dominant en reconstituant la capacité de prendre des crédits à l'extérieur de l'État. Il est évident que la grande question à se poser est la société argentine et spécialement les secteurs qui jouent la résistance avec davantage d'ampleur favoriseront-ils ce schéma. L'histoire récente indique un probable développement instable avec de sérieuses difficultés pour rendre gouvernable le capitalisme argentin, au moins, à court terme. En ce sens, les pratiques sociales, alternatives culturelles et politiques économiques laissent penser un futur proche en termes antagoniques que laissent supposer les classes dominantes dans le pouvoir, le gouvernement, les partis traditionnels droite et gauche et ses cissions et le capital transnational, le FMI et autres organismes multilatéraux de crédit. La question sur la multiplicité d'inconnues que révèle le présent de l'Argentine indique deux chemins possibles. Le chemin de la continuité et l'approfondissement des réformes régressives. L'autre implique de penser de façon créative la construction d' initiatives et projets globaux qui soutiennent une perspective alternative, anticapitaliste, des solutions populaires et une intégration latino-américaine et des Caraïbes qui projette une autre mondialisation, qui définit une offensive pour la nouvelle société que beaucoup d'entre nous revendiquent comme socialiste. Cela dit au-delà des multiples médiations culturelles et politiques à mener pour sa matérialisation, avec la conviction que rien sera possible si la société ne se fixe pas de défis qui ne dépassent la frontière étroite de la conjoncture et fait face contre le pouvoir de la guerre et à la déprédation globale que propose le capital. Traduction pour El Correo : Carlos Debiasi Article en espagnol : "Argentina 2003 ¿A quién le sirve el acuerdo con el FMI ?" (c) COPYLEFT El Correo / ALAI, América Latina en Movimiento 2003
https://www.alainet.org/de/node/109683?language=en
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