L'ambition démesurée et criminelle des Etats Unis : Le contrôle militaire de la planète
26/02/2003
- Opinión
1. Dès les années 1980, alors que s'annonce l'effondrement du système
soviétique, se dessine une option hégémoniste qui gagne l'ensemble de la
classe dirigeante des Etats Unis (ses establishments démocrate et
républicain). Emportés par le vertige de leur puissance armée, désormais
sans concurrent capable d'en tempérer les fantasmes, les Etats Unis
choissent d'affirmer leur domination d'abord par le déploiement d'une
stratégie strictement militaire de « contrôle de la planète » . Une
première série d'interventions – Golfe, Yougoslavie, Asie Centrale,
Palestine, Irak - inaugure dès 1990 la mise en œuvre de ce plan de
« guerres made in USA », sans fin, planifiées et décidées unilatéralement
par Washington.
La stratégie politique d'accompagnement du projet en prépare les prétextes,
qu'il s'agisse du terrorisme, de la lutte contre le trafic des narcotiques
ou de l'accusation de production d'armes de destruction massive. Prétextes
évidents quand on connaît les complicités qui ont permis à la CIA de
fabriquer un adversaire « terroriste » sur mesure (les Taliban, Ben Laden –
la lumière sur le 11 Septembre n'ayant jamais été faite …) ou de développer
le Plan Colombie dirigé contre le Brésil. Quant aux accusations de
production éventuelle d'armes dangereuses, portées contre l'Irak, la Corée
du Nord et demain n'importe quel Etat, elles font pâle figure face à
l'usage effectif de ces armes par les Etats Unis (les bombes de Hiroshima
et Nagasaki, l'emploi d'armes chimiques au Viet Nam, la menace avouée de
l'utilisation d'armes nucléaires dans les confits à venir …) . Il ne s'agit
donc là que de moyens qui relèvent de la propagande au sens que Goebels
donnait au terme, efficaces peut être pour convaincre l'opinion niaise aux
Etats Unis mais de moins en moins crédibles ailleurs.
La « guerre préventive » formulée désormais comme un « droit » que
Washington se réserve d'invoquer, abolit d'emblée tout droit international.
La Charte des Nations Unies interdit le recours à la guerre, sauf dans le
cas de légitime défense ; et soumet sa propre intervention militaire
éventuelle à des conditions sévères, la riposte devant être mesurée et
provisoire. Tous les juristes savent que les guerres entreprises depuis
1990 sont parfaitement illégitimes et donc qu'en principe ceux qui en ont
pris la responsabilité sont des criminels de guerre. Les Nations Unies sont
déjà traitées par les Etats Unis, mais avec la complicité des autres, comme
le fut naguère la SDN par les Etats fascistes.
2. L'abolition du droit des peuples, déjà consommée, substitue au
principe de leur égalité celui de la distinction entre un « Herrenvolk »
(le peuple des Etats Unis, accessoirement celui d'Israël) qui a le droit de
conquérir « l'espace vital » qu'il juge nécessaire et les autres, dont
l'existence même n'est tolérable que si elle ne constitue pas une
« menace » pour le déploiement des projets de ceux appelés à être les
« maîtres du monde ».
Quels sont donc ces intérêts « nationaux » que la classe dirigeante des
Etats Unis se réserve le droit d'invoquer comme bon lui semble ?
A vrai dire cette classe ne se reconnaît que dans un seul objectif –
« faire de l'argent » - l'Etat nord américain s'étant ouvertement mis au
service prioritaire de la satisfaction des exigences du segment dominant du
capital constitué par les transnationales des Etats Unis.
Nous sommes donc tous devenus, aux yeux de l'establishment de Washington,
des « Peaux Rouges », c'est à dire des peuples qui n'ont droit à
l'existence que dans la mesure où ils ne gênent pas l'expansion du capital
transnational des Etats Unis. Toute résistance sera réduite par tous les
moyens allant jusqu'à l'extermination si nécessaire, nous promet-on. Quinze
millions de dollars de sur profits supplémentaires pour les transnationales
américaines, en contre partie trois cents millions de victimes, aucune
hésitation. L'Etat « voyou » par excellence, pour reprendre le langage des
Présidents Bush père, Clinton et Bush fils, c'est bel et bien celui des
Etats Unis.
Ce projet est certainement impérialiste au sens le plus brutal, mais il
n'est pas « impérial » au sens que Negri donne à ce terme, car il ne s'agit
pas de gérer l'ensemble des sociétés de la planète, pour les intégrer dans
un système capitaliste cohérent, mais seulement de piller leurs ressources.
La réduction de la pensée sociale aux axiomes de base de l'économie
vulgaire, l'attention unilatérale portée à la maximisation de la
rentabilité financière à court terme du capital dominant, renforcée par la
mise à la disposition de celui-ci des moyens militaires qu'on connaît sont
responsables de cette dérive barbare que le capitalisme porte en lui, dès
lors qu'il s'est débarrassé de tout système de valeurs humaines auquel il a
substitué les exigences exclusives de la soumission aux prétendues lois du
marché. Par l'histoire de sa formation le capitalisme nord américain se
prêtait à cette réduction mieux encore que celui des sociétés européennes.
Car l'Etat américain et sa vision politique ont été façonnés pour servir
l'économie et rien d'autre, abolissant par là même le rapport
contradictoire et dialectique économie/politique. Le génocide des Indiens,
l'esclavage des Noirs, la succession de vagues des migrations substituant
la confrontation des groupes partageant de prétendues identités
communautaires (manipulées par la classe dirigeante) à la maturation de la
conscience de classe, ont produit une gestion politique de la société par
un parti unique du capital, dont les deux segments partagent les mêmes
visions stratégiques globales, se partageant la tâche par leurs rhétoriques
propres à l'adresse de chacune des « constituencies » de la petite moitié
de la société qui croit suffisamment au système pour se donner la peine
d'aller voter. Privée de la tradition par laquelle les partis ouvriers
sociaux démocrates et communistes ont marqué la formation de la culture
politique européenne moderne, la société américaine ne dispose pas des
instruments idéologiques qui lui permettraient de résister à la dictature
sans contre poids du capital. C'est au contraire celui-ci qui façonne
unilatéralement le mode de pensée de la société dans toutes ses dimensions,
et en particulier reproduit en le renforçant son racisme fondamental qui
lui permet de se voir en « Herrenfolk ». « Play boy Clinton, Cow boy Bush,
same policy » ; se slogan entendu en Inde à juste titre place l'accent sur
la nature du parti unique qui gère la prétendue démocratie américaine.
De ce fait le projet nord américain n'est pas un projet hégémoniste banal
qui partagerait avec d'autres, qui se sont succédé dans l'histoire moderne
et ancienne, les vertus d'une vision d'ensemble des problèmes permettant de
leur donner des réponses cohérentes stabilisatrices, fussent-elles fondées
sur l'exploitation économique et l'inégalité politique. Il est infiniment
plus brutal par sa conception unilatérale simple à l'extrême et, de ce
point de vue, se rapproche davantage du projet nazi, également fondé sur le
principe exclusif du « Herrenfolk ». Ce projet des Etats Unis n'a rien à
voir avec ce qu'en disent les universitaires libéraux américains,
qualifiant cette hégémonie de « benign » (« indolore ») !
S'il doit se déployer pendant encore un certain temps ce projet ne pourra
générer qu'un chaos grandissant appelant une gestion de plus en plus
brutale au coup par coup, sans vision stratégique de long terme. A la
limite Washington ne cherchera plus à renforcer des alliés véritables, ce
qui impose toujours savoir faire des concessions. Des gouvernements
fantoches, comme celui de Karzai en Afganistan, font mieux l'affaire tant
que le délire de la puissance militaire permet de croire à
« l'invincibilité » des Etats Unis. Hitler ne pensait pas autrement.
3. L'ex amen des rapports de ce projet criminel aux réalités du
capitalisme dominant constitué par l'ensemble des pays de la triade (Etats
Unis, Europe, Japon) permettra d'en mesurer les forces et les faiblesses.
L'opinion générale la plus courante, véhiculée par ceux des médias qui
n'appelent pas à réfléchir, est que la puissance militaire des Etats Unis
ne constituerait que le sommet de l'iceberg, prolongeant une supériorité de
ce pays dans tous les domaines, notamment économiques, voire politiques et
culturels. La soumission à l'hégémonisme auquel il prétend serait donc de
ce fait incontournable.
L'examen des réalités économiques infirme cette opinion. Le système
productif des Etats Unis est loin d'être « le plus efficient du monde ». Au
contraire presque aucun de ses segments ne serait certain de l'emporter sur
ses concurrents sur un marché véritablement ouvert comme l'imaginent les
économistes libéraux. En témoigne le déficit commercial des Etats Unis qui
s'aggrave d'année en année, passé de100 milliards de dollars en 1989 à 450
en 2000. De surcroît ce déficit concerne pratiquement tous les segments du
système productif. Même l'excédent dont bénéficiaient les Etats Unis dans
le domaine des biens de haute technologie, qui était de 35 milliards en
1990, a désormais laissé la place à un déficit. La concurrence entre Ariane
et les fusées de la Nasa, Airbus et Boeing témoigne de la vulnérabilité de
l'avantage américain. Face à l'Europe et au Japon pour les productions de
haute technologie, à la Chine, à la Corée et aux autres pays industrialisés
d'Asie et d'Amérique latine pour les produits manufacturés banals, à
l'Europe et au cône sud d'Amérique latine pour l'agriculture, les Etats
Unis ne l'emporteraient probablement pas sans le recours à des moyens
« extra économiques » qui violent les principes du libéralisme imposés aux
concurrents !
En fait les Etats Unis ne bénéficient d'avantages comparatifs établis que
dans le secteur des armements, précisément parce que celui-ci échappe
largement aux règles du marché et bénéficie du soutien de l'Etat. Sans
doute cet avantage entraîne-t-il quelques retombées pour le civil (Internet
en constitue l'exemple le plus connu), mais il est également à l'origine de
distorsions sérieuses qui constituent des handicaps pour beaucoup de
secteurs productifs.
L'économie nord américaine vit en parasite au détriment de ses partenaires
dans le système mondial. « Les Etats Unis dépendent pour 10 % de leur
consommation industrielle des biens dont l'importation n'est pas couverte
par des exportations de produits nationaux » (E. Todd, Après l'Empire, p.
80).
La croissance des années Clinton, vantée comme étant le produit du
« libéralisme » auquel l'Europe aurait malheureusement trop résisté, est en
fait largement factice et en tout cas non généralisable, puisqu'elle repose
sur des transferts de capitaux qui impliquent la stagnation des
partenaires. Pour tous les segments du système productif réel, la
croissance des Etats Unis n'a pas été meilleure que celle de l'Europe. Le
« miracle américain » s'est exclusivement alimenté de la croissance des
dépenses produites par l'aggravation des inégalités sociales (services
financiers et personnels : légions d'avocats et de polices privées etc …).
En ce sens le libéralisme de Clinton a bel et bien préparé les conditions
qui ont permis l'essor réactionnaire et la victoire ultérieure de Bush
fils. De surcroît, comme l'écrit Todd (p. 84) « gonflé par les fraudes le
PNB américain commence à ressembler, pour la fiabilité statistique, à celui
de l'Union soviétique » !
Le monde produit, les Etats Unis (dont l'épargne nationale est
pratiquement nulle) consomment. « L'avantage » des Etats Unis est celui
d'un prédateur dont le déficit est couvert par l'apport des autres,
consenti ou forcé. Les moyens mis en œuvre par Washington pour compenser
ses déficiences sont de nature diverses : violations unilatérales répétées
des principes du libéralisme, exportations d'armements (60 % du marché
mondial) largement imposées à des alliés subalternes (qui de surcroît –
comme les pays du Golfe – n'utiliseront jamais ces armements !), recherche
de sur-rentes pétrolières (qui supposent la mise en coupe réglée des
producteurs, motif réel des guerres d'Asie centrale et d'Irak). Il reste
que l'essentiel du déficit américain est couvert par les apports en
capitaux en provenance de l'Europe et du Japon, du Sud (pays pétroliers
riches et classes compradore de tous les pays du tiers monde, plus pauvres
inclus), auquel on ajoutera la ponction exercée au titre du service de la
dette imposée à la presque totalité des pays de la périphérie du système
mondial.
Les raisons qui rendent compte de la persistance du flux des capitaux qui
alimente le parasitisme de l'économie et de la société américaine et
permettent à cette super puissance de vivre au jour le jour sont
certainement complexes. Mais elles ne résultent en rien de prétendues
« lois du marché » à la fois rationnelles et incontournables.
La solidarité des segments dominants du capital transnationalisé de tous
les partenaires de la triade est réelle, et s'exprime par leur ralliement
au néo-libéralisme globalisé. Les Etats Unis sont vus dans cette
perspective comme les défenseurs (militaires si nécessaire) de ces
« intérêts communs ». Il reste que Washington n'entend pas « partager
équitablement » les profits de son leadership. Les Etats Unis s'emploient
au contraire à vassaliser leurs alliés, et dans cet esprit ne sont prêts à
consentir à leurs alliés subalternes de la triade que des concessions
mineures. Ce conflit d'intérêts du capital dominant est-il appelé à
s'accuser au point d'entraîner une rupture dans l'alliance atlantique ? Pas
impossible, mais peu probable.
Le conflit prometteur se situe sur un autre terrain. Celui des cultures
politiques. En Europe une alternative de gauche demeure toujours possible.
Cette alternative imposerait simultanément une rupture avec le néo-
libéralisme (et l'abandon de l'espoir vain de soumettre les Etats Unis à
ses exigences, permettant ainsi au capital européen de livrer bataille sur
le terrain non miné de la compétition économique), comme avec l'alignement
sur les stratégies politiques des Etats Unis. Le surplus de capitaux que
l'Europe se contente jusqu'à ce jour à « placer » aux Etats Unis pourrait
alors être affecté à une relance économique et sociale, à défaut de quoi
celle-ci restera impossible. Mais dès lors que l'Europe choisirait, par ce
moyen, de donner la priorité à son essor économique et social, la santé
artificielle de l'économie des Etats Unis s'effondrerait et la classe
dirigeante américaine serait confrontée à ces propres problèmes sociaux.
Tel est le sens que je donne à ma conclusion « l'Europe sera de gauche ou
ne sera pas ».
Pour y parvenir il faut se débarrasser de l'illusion que la carte du
libéralisme devrait – et pourrait- être jouée « honnêtement » par tous et
que dans ce cas tout irait mieux. Les Etats Unis ne peuvent pas renoncer à
leur option en faveur d'une pratique asymétrique du libéralisme, parce que
celle-ci est le seul moyen pour eux de compenser leurs propres déficiences.
La « prospérité » américaine a pour prix la stagnation des autres.
Pourquoi donc, en dépit de ces évidences, le flux des capitaux au bénéfice
des Etats Unis se poursuit-il ? Sans doute pour beaucoup le motif est-il
simplement que les Etats Unis sont « un Etat pour les riches », le refuge
le plus sûr. C'est le cas pour les placements des bourgeoisies compradore
du tiers monde. Mais pour les Européens ? Le virus libéral – et la croyance
naïve que les Etats Unis finiront par accepter « le jeu des marchés » -
opère ici avec une puissance certaine auprès des grandes opinions
publiques. Dans cet esprit le principe de « libre circulation des
capitaux » a été sacralisé par le FMI, en fait simplement pour permettre
précisément aux Etats Unis de couvrir leur déficit par le pompage des
surplus financiers générés ailleurs par les politiques néo-libérales,
auxquelles ils ne se soumettent, eux, que très sélectivement ! Néanmoins
pour le grand capital dominant l'avantage du système l'emporte sur ses
inconvénients : le tribut qu'il faut payer à Washington pour en assurer la
permanence.
Il y a des pays qualifiés de « pays pauvres endettés », qui sont contraints
de payer. Mais il y a aussi un « pays puissant endetté », dont on devrait
savoir qu'il ne remboursera jamais ses dettes. Ce véritable tribut imposé
par le chantage politique des Etats Unis demeure, de ce fait, fragile.
4. Le choix militariste de l'establishment des Etats Unis se situe dans
cette perspective. Il n'est rien d'autre que l'aveu que les Etats Unis
n'ont pas d'autres moyens à leur disposition pour imposer leur hégémonie
économique.
Les causes qui sont à l'origine de l'affaiblissement du système productif
des Etats Unis sont complexes. Elles ne sont certainement pas
conjoncturelles, pouvant de ce fait être corrigé par exemple par l'adoption
d'un taux de change correct, ou par la construction de rapports
salaires/productivités plus favorables. Elles sont structurelles. La
médiocrité des systèmes de l'enseignement général et de la formation,
produit d'un préjugé tenace favorisant systématiquement le « privé » au
détriment du service public, est l'une des raisons majeures de la crise
profonde que traverse la société des Etats Unis.
On devrait s'étonner donc que les Européens, loin de tirer les conclusions
que le constat des insuffisance de l'économie des Etats Unis impose,
s'activent au contraire à les imiter. Là également le virus libéral
n'explique pas tout, même s'il remplit quelques fonctions utiles pour le
système, en paralysant la gauche. La privatisation à outrance, le
démantèlement des services publics ne pourront que réduire les avantages
comparatifs dont bénéficie encore la « vieille Europe » (comme la qualifie
Bush). Mais quels que soient les dommages qu'elles occasionneront à long
terme, ces mesures offrent au capital dominant, qui vit dans le court
terme, l'occasion de profits supplémentaires.
L'option militariste des Etats Unis menace tous les peuples. Elle procède
de la même logique qui fut naguère celle d'Adolf Hitler : modifier par la
violence militaire les rapports économiques et sociaux en faveur du
« Herrenfolk » du jour. Cette option, en s'imposant au devant de la scène,
surdétermine toutes les conjonctures politiques, car la poursuite du
déploiement de ce projet fragiliserait à l'extrême toutes les avancées que
les peuples pourraient obtenir par leurs luttes sociales et démocratiques.
Mettre en échec le projet militariste des Etats Unis devient alors la tâche
première, la responsabilité majeure pour tous.
L'agression militaire ne s'arrêtera pas aux pays qui en sont les victimes
directes jusqu'à ce jour. Au delà le contrôle militaire de toute la planète
vise directement la Russie, la Chine, l'Inde et l'Iran soumettant ces pays
au chantage permanent d'interventions militaires conduites à partir des
bases militaires permanentes que les Etats Unis installent dans le Moyen
Orient et en Asie centrale, comme elle s'emploie à subalterniser l'Europe
par le contrôle exclusif par Washington des plus importantes ressources
pétrolières de la planète. De la même manière le Plan Colombie constitue
une menace permanente d'intervention dirigée principalement contre le
Brésil. L'establishment de Washington ne cache pas ses intentions : il a
horreur des « grands pays », qui pourraient un jour ou l'autre lui
résister. Il est décidé à empêcher par tous les moyens y compris militaires
que ceux-ci ne parviennent à se développer suffisamment pour le pouvoir.
Le combat pour mettre en échec le projet des Etats Unis est certainement
multiforme. Il comporte ses aspects diplomatiques (défendre le droit
international), militaires (le réarmement de tous les pays du monde pour
faire face aux agressions projetées par Washington s'impose – ne jamais
oublier que les Etats Unis ont utilisé les armes nucléaires quand ils en
avaient le monopole et y ont renoncé pendant le temps où ils ne l'avaient
plus) et politiques (notamment pour ce qui concerne la construction
européenne et la reconstruction d'un front des Non Alignés).
Le succès de ce combat dépendra de la capacité des esprits à se libérer des
illusions libérales. Car il n'y aura jamais d'économie mondialisée
« authentiquement libérale ». Et pourtant on tente et on continuera à
tenter par tous les moyens de le faire croire. Les discours de la Banque
mondiale opérant comme une sorte de Ministère de la propagande de
Washington concernant la « démocratie » et la « bonne gouvernance », ou la
« réduction de la pauvreté » n'ont d'autres fonction comme le bruit
médiatique organisé autour de Joseph Stiglitz, découvrant quelques vérités
élémentaires, affirmées avec autorité arrogante, sans néanmoins en tirer la
moindre conclusion remettant en cause les préjugés tenaces de l'économie
vulgaire. La reconstruction d'un front du Sud, capable de donner à la
solidarité des peuples d'Asie et d'Afrique et à la Tricontinentale, une
capacité d'agir sur le plan mondial, passe, elle également, par la
libération des illusions d'un système libéral mondialisé « non
asymétrique » qui permettrait aux nations du tiers monde de surmonter leurs
« retards ». N'est-il pas ridicule de voir des pays du Sud réclamer « la
mise en œuvre des principes du libéralisme ; mais sans discrimination
aucune », bénéficiant alors des applaudissements nourris de la Banque
mondiale ? Depuis quand la Banque mondiale a-t-elle défendu le tiers monde
contre les Etats Unis ?
Le combat contre l'impérialisme des Etats Unis et son option militariste
est celui de tous les peuples , de ses victimes majeures d'Asie, d'Afrique
et d'Amérique latine, des peuples européens et japonais condamnés à la
subordination, mais tout également du peuple nord américain. Saluons ici le
courage de tous ceux qui « au cœur de la bête », refusent de se soumettre
comme leurs prédécesseurs ont refusé de céder au Mac Carthisme des années
1950. Comme ceux qui ont osé résister à Hitler ils ont conquis tous les
titres de noblesse que l'histoire peut décerner. La classe dominante des
Etats Unis sera-t-elle capable de revenir sur le projet criminel auquel
elle s'est ralliée ? Question à laquelle il n'est pas facile de répondre.
Peu, sinon rien, dans la formation historique, de la société des Etats Unis
l'y prépare. Le Parti unique du capital dont le pouvoir n'est pas contesté
aux Etats Unis n'a jusqu'ici pas renoncé à l'aventure militaire. Dans ce
sens la responsabilité de cette classe prise dans son ensemble ne peut être
atténuée. Le pouvoir de Bush junior n'est pas celui d'une « clique » - les
pétroliers et les industries de l'armement. Comme dans toute l'histoire
moderne des Etats Unis le pouvoir dominant n'a jamais été autre que celui
en particulier d'une coalition d'intérêts segmentaires du capital (mal
qualifiés de « lobbies »). Mais cette coalition ne peut gouverner que si
les autres segments du capital l'acceptent. A défaut tout arrive dans ce
pays d'autant moins respectueux en fait du droit qu'il paraît l'être en
principe. Evidemment quelques échecs politiques, diplomatiques, et peut
être même militaires, pourraient encourager les minorités qui, au sein de
l'establishment des Etats Unis, accepteraient de renoncer aux aventures
militaires dans lesquelles leur pays s'est engagé. Espérer plus me paraît
aussi naïf que pouvaient l'être les attentes qu'Adolf Hitler finisse par
s'assagir !
S'ils avaient réagi en 1935 ou 1937, les Européens seraient parvenus à
arrêter le délire hitlérien. En réagissant seulement en Septembre 1939, ils
se sont infligés les dizaines de millions de victimes. Agissons pour que
face au défi des néo-nazis de Washington, la riposte soit plus précoce.
https://www.alainet.org/de/node/107030?language=es
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